[page d'accueil] [retour messages, FAQ et réponses] | @

Message ou FAQ

 

J'ai été violé enfant

Email en pied de message
Mars 2007

Je suis marié, j'ai une petite fille et il y a quelques années je manifestais beaucoup d'intérêts pour les témoignages sur ce site medemandant parfois pourquoi je m'interessais tant à ces femmes violées.
Il y a 10 jours, au cours de ma psychanalyse que j'ai entrepris depuis de très nombreuses années, remonte à ma mémoire une horreur : à l'âge de 5 ans, alors que je me trouvais en colonnie de vacances pour une période de 15 jours, un homme m'a violé sans réserve pendant toute une semaine jusqu'à ce que je trouve les ressources nécessaires pour tomber malade et que je sois mis en quarantaine. Je n'ai rien dit à personne et c'est 40 ans plus tard que je fais face à la douleur et à l'horreur qui n'a pu être exprimée à l'époque avec si je puis dire tous les intérêts de retard pendant ces 40 années. Les souvenirs remontent, des sensations, des cris, mais surtout des douleurs comme jamais je n'aurais imaginé pouvoir rencontré.
Et puis la thérapie, la prière me permet d'encaisser le tsunami mais je suis maintenant dans la seconde vague...
J'ai compris aussi et c'est la raison de mon message que mes premiers pas dans la vie sont d'une certaine manière marqués d'une empreinte, celle du sexe d'un autre. Finalement dans la construction de ma relation à l'autre, s'érige toujours devant moi, de façon consciente ou inconsciente mais bien souvent je m'en rends compte c'est conscient une espèce d'écran du physique, du sexe de l'autre qui m'empèche complètement d'appréhender une relation naturelle. Relation masculine ? Je n'ai pas d'ami homme
Je ne peux rentrer en contact qu'avec les femmes que je comprends bien mais l'écran est toujours là. Il vient d'abord s'interposer. J'ai comme l'impression que par ce que m'a fait l'agresseur si petit il m'a en quelque sorte configuré dans un monde qui se résume en trois mots : moi - le sexe ou le physique - l'autre.
Ce constat est terrible. Je m'en dépatouille depuis des années sans y mettre des mots mais j'en souffre vraiment. Cela me demande toujours un effort énorme pour dépasser cette réduction et accéder ainsi à toute l'intégralité de l'individu qui me fait face mais dès lors que je me sens plus las, plus fatigué, cet écran est alors plus prégnant, plus résistant.
Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguité, ce que je décris est une tension intérieure qui m'habite depuis que je suis adolescent sans qu'elle se traduise par des passages à l'acte. C'est justement parce qu'il n'y a pas de passage à l'acte que cela procure des tensions extrêmes issues de cette salissure abjecte qui finalement n'arrête pas encore de me salir et tout ce que j'ai fait pour construire ma dignité.
Alors j'aimerais savoir comment ça se passe pour d'autres femmes, abimées aussi, trop tôt dans leur vie. J'ai besoin de savoir parmi cette population si vaste que nous formons tous où est-ce que je me situe dans cette géographie de la souffrance. Comment avec votre histoire personnelle faites-vous ou avez-vous fait pour gérer l'après ?
Il m'est autant important de savoir si ce que je vis est malheureusement normal ou au contraire plutôt hors norme et de connaître aussi ce que vivent d'autres pour ne pas être centré que sur ma seule douleur et sur ma seule histoire par rapport à ce point précis.
Merci.

Bonjour,
Vous savez, les traumas sont toujours inégaux, puisqu'ils surviennent à des moments différents "sur des constructions psychiques différentes" et chacun réagit donc différemment et gère différemment son traumatisme et les suites de son traumatisme, suivant sa vulnérabilité du moment, ses rencontres affectives et sociales, lesquelles peuvent l'aider à se restaurer ou au contraire aggraver ses souffrances.
Tout dépend des points d'appui que chacun pourra et saura trouver sur sa route, des processus de réparation mis en oeuvre et de ce que les psys nomment "la résilience".
D'après ce que vous m'écrivez, vous commencez juste à élaborer votre traumatisme, lequel, trop violent, a court-circuité à l'époque, vos possibilités de représentation et vous n'avez eu d'autre choix, comme processus de défense pour vous sauver du fracas, que d'enfouir les sévices dans votre mémoire.
"Quand l'environnement est rempli d'horreur, l'enfant se vide pour ne pas souffrir ou se voile la face pour ne pas voir le réel terrifiant".
Et quand l'affectivité se réveille, l'enfant n'a pas appris à la gouverner, d'où votre impossibilité aujourd'hui, à gérer "l'ensemble" et cette impression d'un monde réduit à 3 choses : vous, le sexe et l'autre, comme vous le dites si bien.
Avec l'aide de votre thérapeute, vous allez apprendre à métamorphoser l'horreur de votre traumatisme, de manière à pouvoir intégrer la vie dans sa totalité et accepter de renouer avec les émotions, qui font la richesse d'une existence quand elles ne sont pas dévastatrices et trop intenses.
Prenez le temps, de continuer le travail thérapeutique sérieux, que vous avez commencé.
Pouvez vous me tenir au courant de votre évolution ?
Cordialement,
Chantal POIGNANT
Conseil

Merci pour votre réponse Chantal et je puis vous affirmer déjà que la résilience n'est pas un concept pour moi dans ma vie jusqu'à aujourd'hui même si je dois affronter à nouveau une horreur. Je me sens néanmoins comme emprisonné, étouffé et je ressens le besoin d'échanger avec celles qui ont traversé la même chose. Echanger pour comprendre, avancer à plusieurs. J'ai ma meilleure amie, une soeur, connue à l'âge de 7 ans, violée à 13 ans dont je découvre l'histoire en découvrant la mienne il y a peu et je découvre aussi sa difficulté dans sa relation à l'autre, différente de la mienne. Ces échanges nous ont fait avancer. Je voudrais échanger avec d'autres femmes pour les mêmes raisons peut-être par votre intermédiaire, j'espère, c'est important pour moi. C'est comme insuffler de l'air à la démarche réparatrice et thérapeutique.
Après la douleur psychique considérable pendant 10 jours, je découvre les tourments psychologiques difficiles, ma psy en vacances et une image de moi même fortement dépréciée qui ne trouve son second souffle que dans l'écoute de l'autre, loin de moi, le plus loin de ce moi blessé qui m'étouffe.
J'ai envie d'échanger aussi pour ne pas me sentir seul. C'est idiot car je sais que nous sommes innombrables mais je me sens seul même si ma femme me comprend comme personne d'autre et ma psy est exceptionnelle. Malgré des personnes d'exception, me manque peut-être cette amie qui vit au Canada.
Je ne peux pas dire que je sois terré dans un mutisme mais j'éprouve une solitude, vraisemblablement celle ressentie quand je quittais la pièce où il avait épuisé toute son énergie sur moi et que je remontais dans le silence l'escalier qui me ramenait au dortoir.
Ce n'est pas d'un échange négatif avec d'autres femmes que je souhaite et qui nous plomberait mais au contraire de la justesse et de la mesure pour s'édifier par les échanges. Nous sommes déjà assez plombés par cette intrusion sauvage pour mériter plus de douceur dans les mots et les propos.
Merci de votre patience et de votre attention

Bonjour,
Votre souci de communiquer avec d'autres personnes, ayant subi des sévices semblables aux vôtres, m'amène à vous suggérer la "thérapie psychocorporelle de groupe" comme pratique d'aide, pour "sortir" momentanément du tête à tête de la thérapie individuelle et, surtout, en complément avec celle-ci.
"Le groupe favorise le changement grâce à un champ d'exploration qui complète, potentialise et peut relancer le travail en individuel" ; ainsi, il existe des stages qui s'intitulent : "à la rencontre de la colère", "le stage deuil", "le stage sexualité"...
Ces stages agissent comme des révélateurs, ils ne prétendent pas guérir mais donnent des clés, qui permettent d'ouvrir des portes, afin de mieux "traverser" la vie ; peut-être, devriez vous en parler à votre thérapeute, pour connaître son opinion sur ce sujet ?
Dans l'immédiat, vous me faites part de votre désir d'échanger avec d'autres personnes, par l'intermédiaire du site SOS Femmes ; je pourrais vous proposer de publier votre témoignage avec un e-mail, à partir duquel, les internautes pourraient vous joindre ; je vous demande cependant un petit délai et, surtout, votre propre autorisation à cette publication.
Cordialement,
Chantal POIGNANT

Concernant votre suggestion de thérapie psychocorporelle et après discussion avec ma thérapeute, compte tenu de ma très grande sensibilité, je ne vais pas retenir pour l'instant cette idée. En revanche, je vous donne mon autorisation pour publier mon témoignage avec l'email avec lequel nous communiquons.
Merci encore

ecoutecl@yahoo.fr

[page d'accueil] [retour messages, FAQ et réponses] | @