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Trente-deux heures de garde à vue

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Novembre 2009

Bonsoir Madame,
J'ai lu avec intérêt les témoignages de ce site. J'avoue que j'ai cherché le témoignage de ma femme mais je ne l'ai pas trouvé. En effet, en février dernier,  elle a proféré des accusations graves contre moi: violences conjugales.
Il est vrai qu'elle a eu un certain nombre de symptômes post-traumatiques notamment après son accouchement que l'on trouve décrits sur votre site et qui sont assez troublants: colères incontrôlées, agressivité, évitements phobiques. Il est vrai aussi qu'elle a fait de l'anorexie à une période où nos relations étaient bien meilleures. Ceci peut venir aussi d'un traumatisme remontant à l'enfance.
Voici mon histoire, belle à l'origine, terrible à l'arrivée. Pouvez-vous la lire et me donner votre avis, étant entendu que le psychiatre actuel de ma femme ne veut rien me dire par respect du secret médical et que je me retrouve seul avec toutes mes questions sur le passé récent et le pourquoi des réactions de ma femme?
J'ai rencontré ma femme il y a plus de 8 ans. Celle-ci étant de la région de Venise, notre belle histoire commençante m'a amené à prendre souvent le train de nuit pour la rejoindre le week-end. Puis, mariage en 2002.
Comme je travaillais et ma femme pas à cette époque, elle a accepté de me suivre à Paris. J'avais bien noté son souhait de travailler et je le respectais. Comme ma femme (je l'appellerai S.) avait déjà travaillé en France et en Belgique, je ne me faisais pas trop de soucis pour son adaptation.
En fait, cette dernière a été difficile. Je l'avais sans doute sous-estimée. Cependant, tout changement de pays (surtout s'il a un coté plus définitif) entraîne un certain déracinement. Je me suis vite rendu compte que S. m'en attribuait la responsabilité. Elle me répétait qu'elle avait tout abandonné pour moi (famille, amis etc.) et que je me devais de l'aider. C'est d'ailleurs ce que je lui avais promis de faire et ce que j'ai essayé de faire. Mais il y a eu des événements contrariants, sans doute des erreurs de commises mais qui avaient leur justification au départ . Il faut bien reconnaître que nous ne maîtrisons pas les événements de la vie et que les meilleures intentions du monde ne suffisent souvent pas. C'est vrai que j'ai fait embaucher ma femme par un ami dont l'entreprise a fait faillite. C'est vrai aussi que S. a accompli des CDD (avec proposition de CDI) dans les deux sociétés où j'ai moi-même travaillé depuis 10 ans. Et c'était bien-sûr moi qui avait proposé ma femme pour ses contrats. Les erreurs et les coups "gagnants" pouvaient s'équilibrer ou ne pas s'équilibrer; j'étais un peu coupable. Et j'essayais en contrepartie d'être attentionné, mais cela ne produisait pas l'effet souhaité.
Nous nous aimions cependant, et je pensais que les réactions un peu exagérées de ma femme cesseraient si sa situation professionnelle se stabilisait. A l'époque, les moments désagréables étaient compensés par des instants de bonheur que S. a sans doute complètement oubliés aujourd'hui.
Et puis il y a eu le problème de l'enfant qui n'arrivait pas. Comble de malchance, j'en étais semble-t-il la cause. On sait la souffrance des couples qui n'ont pas d'enfant mais est-ce normal pour autant d'en rendre responsable le conjoint? J'étais dans une situation assez difficile. S. ne voulait pas voir d'amis (il est vrai plutôt les miens car nous étions à Paris). L'arrivée des faire-parts de naissance provoquaient un drame. Il m'est même arrivé d'attendre quelques jours pour lui annoncer telle ou telle naissance ou telle ou telle grossesse pour ne pas gâcher un week-end par exemple.
Ma femme a fait une première dépression en 2005, doublée d'anorexie. Je l'ai amenée voir un psychiatre. Je n'en connaissais pas à l'époque. J'étais assez catastrophé mais les choses se sont un peu améliorées en quelques semaines.
Chaque été, nous allions en Italie pour les vacances. Parfois aussi en hiver ou au printemps. J'essayais de permettre à ma femme de retrouver sa famille le plus possible. Et je m'entendais bien avec ma belle-famille italienne.
Par chance, une grossesse s'est enfin déclenchée suite à une stimulation ovarienne. J'accompagnais presque toujours ma femme pour les piqûres. Que pouvais-je faire d'autre?
La grossesse fut difficile mais la bonne nouvelle se concrétisa le 27 juin 2007 par la naissance de deux jumeaux (garçons et filles).
J'ai vraiment cru qu'un nouveau départ nous attendait. S. serait heureuse comme mère et peut-être aussi professionnellement parlant. Elle avait fait des CDD et rien n'était fermé de ce coté-là (je précise que je lui ai permis de travailler dans les deux sociétés où j'ai travaillé moi-même depuis 8 ans). Je me trompais complètement. D'abord, sur le plan physique, ma femme a fait des malaises. On a dû appeler SOS médecin ou les pompiers un grand nombre de fois. Du point de vue de l'agressivité aussi. Elle avait fréquemment des crises de colère contre moi. Et comme je suis de nature angoissée, je ne savais pas la laisser parler et me retirer dans ma chambre. D'où des conversations houleuses, lors de l'hiver 2007-2008.
On a pensé à la dépression post-partum. Il a fallu une bonne année pour que S. aille mieux.
Les vacances de septembre 2008 en Sicile marquent notre dernier moment heureux passé ensemble.
Puis, en octobre 2008, S. m'avoue avoir moins de sentiments pour moi. Je ne me suis pas affolé et l'ai même remerciée pour sa franchise. J'ai pensé que cela n'avait rien de définitif et que cela se produit chez tous les couples.
Mais les situations de tension se sont multipliées. Pour un rien, ma femme se mettait en colère et les choses s'envenimaient lorsque je lui faisais part de mon incompréhension. Selon elle, j'étais idiot si je ne comprenais pas.
Le 6 février 2009, il y eut un incident tandis que je m'apprêtais à amener mes enfants à la crèche. Je précise que c'est moi qui les portais à la crèche, qui allais les chercher, qui leur donnais le bain, qui faisais les courses et le ménage (du moins une bonne partie). Suite à une de ses colères, S. me claqua violemment la porte d'entrée au nez. Sachant que les enfants étaient présents, je l'ai réouverte pour expliquer à ma femme que ce n'était pas convenable. Mais elle s'est ruée sur la porte et a poussé de toutes ses forces. J'ai compris que c'était peine perdue et ai lâché. Ma femme s'est fait un peu mal au poignet.
Cela ne nous a pas empêchés d'aller chez Ikea le samedi 7 puis le samedi 14 février.
Puis, le dimanche 15 février, je décide d'aller au cinéma. Je propose à ma femme qui accepte. Je lui laisse choisir le film, ce qui n'est sans doute pas une bonne idée. Elle choisit "Noces rebelles", sorte d'anti-Titanic qui nous fait assister à la descente aux enfers d'un couple. A la fin, la femme meurt en tentant d'avorter chez elle.
En sortant du cinéma, je demande à ma femme ce qu'elle a pensé du film. Elle me répond:" ne t'en fais pas, je ne suis pas enceinte de toi...". Puis il s'ensuit une discussion animée au terme de laquelle je dis à S.:" si c'est pour être désagréable comme ça, tu peux retourner en Italie". Ma femme, qui avait essayé de me frapper avec sa chaussure s'en va d'un pas pressé.
Quelques heures plus tard, après avoir baigné les bébés, les avoir nourris puis couchés, je m'inquiète du non-retour de leur mère. Je l'appelle sur son portable. C'est alors qu'elle me dit qu'elle est au commissariat de police où elle a porté plainte contre moi!
Une femme policière, qui a entendu sa déposition, me demande si S. peut rentrer sans craindre des représailles. Je lui dis que bien-sûr elle peut rentrer. Elle est ramenée par la police en voiture, ce qui est un bon point de la part de celle-ci. Le lendemain, je me présente au commissariat pour essayer de comprendre et l'on me répond que sans convocation, on ne peut rien me dire. Inquiet, je rencontre un avocat quelques jours plus tard et celui-ci me dit qu'il ne se passera vraisemblablement rien de plus et que S. a dû déposer une main-courante.
Il se passe ensuite 3 mois sans incident, hormis une discussion animée le dimanche de Pâques. Nous étions invités chez des amis (les miens, il est vrai) et S. n'était pas en forme. Comme à chaque fois que nous avions à honorer une invitation d'ailleurs.
Entre temps, nous avions passé une semaine en Italie pour des vacances, certes pas idylliques, mais convenables tout de même.
Je suis convoqué au commissariat le 11 mai 2009 à 10 h et arrive à 9 h pour expliquer que je dois aller travailler (la convocation était arrivée le 7 mai au soir, veille du w.e. du 8 mai). On m'annonce que je suis... en garde à vue pour 24 heures. Il s'ensuit des interrogatoires, la mise des menottes aux poignets pour tout transfert et bien-sûr la cellule. Impressioné, je finis par "avouer" selon leur formule. Sauf que ces aveux sont à décharge puisqu'ils décrivent des faits qui ne correspondent pas à la réalité de la petite blessure de ma femme au poignet. On m'emmène faire des empreintes ADN puis on me confronte à ma femme qui... enfonce le clou et prétend que je l'ai violentée depuis 5 ans! Personne ne se préoccupe de savoir ce qu'il s'est passé pendant les 3 mois. La présomption d'innocence est un terme inconnu des services de police et, bien-entendu, personne ne me dit que le médecin judiciaire qui a ausculté ma femme a demandé une expertise psychiatrique de celle-ci.
La garde à vue dure 32 heures. A l'issue de celle-ci, je suis placé sous contrôle judiciaire et suis interdit de mon domicile. Je n'ai pas non plus le droit de voir ma femme jusqu'au 9 juillet, date de l'audience devant la Chambre correctionnelle. Je peux voir mes enfants, que je verrai le week-end... n'habitant plus chez moi. Cela va donc durer 2 mois environ. A l'audience, je suis blanchi par la Justice. Le procureur ne demande même pas de peine contre moi, estimant qu'il a pu se passer beaucoup de choses entre le 6 février et le 15 du même mois et que S. a pu soulever une valise trop lourde (sous-entendu, elle a fait ensuite une dénonciation calomnieuse). La Présidente du tribunal épingle aussi un peu ma femme qui voulait... le divorce pour faute. Mon avocat ne savait plus trop s'il devait plaider devant cette unanimité!
Mais mon retour à la maison se fera dans la douleur. Ma femme cherchant contre moi la faute ... qu'elle n'avait pu trouver auparavant. Son père que j'avais pu rencontrer et qui se disait neutre (peut-être pensait-il que sa fille allait gagner?) a tenté un faux témoignage contre moi mais la police l'a envoyé balader.
Il est intéressant de noter que j'ai toujours essayé de rentrer en contact avec ma belle-famille qui m'a fui depuis le début de cette affaire. La réciproque n'est pas vrai.
Ma femme a fait appel du jugement mais au civil seulement, pour des dommages-intérêts. L'action au pénal est donc éteinte.
Elle a également demandé le divorce. Je suis contraint de l'accepter, malgré ma foi catholique. Il est vrai que la vie est plus importante que le mariage...surtout si celui-ci vous conduit au commissariat!
C'est d'ailleurs ma théorie que ma femme a inventé ce stratagème craignant que je refuse le divorce pour raisons religieuses. L'attitude de mes beaux-parents est énigmatique. Je m'entendais très bien avec eux, surtout avec ma belle-mère. Celle-ci est restée en retrait dans cette affaire. Ou bien ils ne sont pas dupes mais ne veulent pas prendre partie contre leur fille de peur de ne plus voir leurs petits enfants. Ou bien, S. les a convaincus. Après tout, ses difficultés d'avant ou après naissance trouveraient là une explication toute faite.
De mon coté, personne ne croit à ses histoires. Ni ma famille, ni mes amis, ni notre médecin traitant, ni nos voisins etc.
D'ailleurs, je m'occupe énormément de mes enfants et on me voit tous les jours à la crèche. Ce n'est pas une preuve, bien-sûr, mais cela cadre assez mal avec les accusations proférées contre moi.
Voilà mon histoire récente. J'ai voulu vous la raconter en détails. Je pense avoir été assez honnête dans ma façon de présenter les choses, même s'il est difficile d'éviter le parti pris.
Je me pose donc tout un tas de question. Que s'est-il passé lors de la grossesse et de l'accouchement? Ma femme a-t-elle eu quelques réminiscences traumatiques? Pourquoi cette hostilité soudaine à mon égard, sans commune mesure avec notre vie d'avant? Moi qui ne demandait qu'à être heureux ensemble, avec nos deux enfants.
Ou bien est-ce simplement qu'après un épisode dépressif, ma femme veut refaire sa vie? On dit que les divorces sont très nombreux suite aux dépressions.
Et le médecin actuel de ma femme peut-il s'être fait manipuler par me femme... ou bien l'avoir remontée contre moi?
J'ajoute tout de même une chose qui a son importance: ma femme a vu pendant 6 mois un psychiatre (automne 2007- printemps 2008) qui a accepté de me parler dernièrement et qui avait décelé une névrose chez ma femme avec conflits anciens non réglés.  Les relations s'étaient fortement dégradées entre ma femme et lui et elle a fini par le dénoncer... à l'Ordre des médecins.
Cordialement
D.

Bonjour,
Votre témoignage, pour difficile qu'il soit, met cependant en lumière des points positifs, lesquels, au-delà de votre situation personnelle, montrent que les procédures ne sont pas toutes à "blâmer" :
- la justice a fait son travail, en prenant en compte la plainte de votre femme et en l'instruisant, puis en rendant un non-lieu suite à un défaut de preuves ; même si vous trouvez que vous avez été suspecté à tort et que vous en avez souffert évidemment, vous avez été quand même entendu et votre parole a eu la même valeur que celle de votre femme.
- le principe du secret professionnel est sauvegardé, puisque le psychiatre actuel de votre femme ne veut pas vous dire ce qui se passe lors des consultations, ce qui n'a pas été le cas pour le précédent et, pourtant, il ne vous avait vraiment pas dévoilé grand chose concernant votre femme puisque "nous sommes tous des névrosés" et avons tous, plus ou moins, à gérer des conflits anciens !
Toute notre vie consiste justement à trouver un point d'équilibre, en utilisant "au mieux" nos mécanismes de défense d'une façon souple, afin d'assurer au "Moi" une certaine protection contre les stimuli internes et externes qui pourraient menacer cet équilibre.
Ces mécanismes de défense sont donc adaptatifs au sens où ils permettent au "Moi" de conserver une cohésion.
Mais, quand ces mécanismes de défense se rigidifient et deviennent chroniques, ils deviennent de moins en moins adaptatifs.
Il est possible que votre femme ait à se débattre contre des angoisses anciennes réactivées par la naissance des enfants comme il est envisageable qu'elle puisse souffrir d'une angoisse due à son mode de vie actuel qui ne la satisfait pas car, en fait, le conflit névrotique résulte d'un antagonisme interne entre monde pulsionnel et exigences de la vie sociale.
La dépression est souvent pour le névrosé une "occasion" de permettre aux conflits refoulés de refaire surface et de pouvoir les traiter.
Il s'agit donc d'une crise de croissance dans laquelle les "masques qu'il a longtemps porté ne tiennent plus" et dans ce sens la dépression peut avoir un aspect régulateur.
Apparemment, votre femme est en train d'émerger d'un malaise non-dit et peut-être est-elle en train de se remettre en question et vous avec...
C'est ce qu'elle semble avoir décidé en demandant le divorce et en souhaitant "refaire sa vie".
Cette remise en question est évidemment douloureuse pour vous aussi en vous obligeant à revenir sur la position de chacun dans le couple.
Peut-être que, votre femme souffre d'avoir un mari trop "parfait" dont elle se sent dépendante car vraisemblablement vous occupiez jusque là une place "forte" dans la famille aux yeux de tous ?
Peut-être a-t-elle envie de vous disqualifier ?
Si votre femme le souhaite, vous devriez tenter de sauver ensemble ce qu'il est possible encore de sauver en entreprenant une thérapie conjugale.
Qu'en pensez vous ?
Votre témoignage est très intéressant : me permettez vous de le publier, même avec une adresse anonyme, ce qui vous permettrait d'avoir d'autres avis ?
* http://www.sosfemmes.com/faq/email_anonyme.htm
Cordialement,
Chantal POIGNANT
Conseil

Bonsoir Madame,
Merci pour votre réponse.
J'ai proposé à ma femme que l'on voie un conseiller conjugal ou que l'on fasse une thérapie de couple mais elle s'y est opposée jusqu'à présent. Mon médecin aussi (je suis suivi depuis février dernier) m'a dit que j'étais trop gentil avec ma femme. C'est très intéressant ce que vous dites. Elle a sans doute voulu me disqualifier, mais de quelle manière !
Oui, j'accepte d'être publié pour avoir encore d'autres avis et d'entrer en contact éventuellement avec ces personnes, si elles en sont d'accord.
Encore merci.
j.durand906@laposte.net

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