Je m'appelle
Sylvie et je suis une femme violée
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en pied de message.
Septembre 2002
Bonjour,
Avant tout, je voulais vous remercier pour votre site qui m'a été
d'une grande aide et d'un grand réconfort au moment où
même ma mère s'est détournée de moi.
J'ai aimé un homme, il disait que j'étais la femme de
sa vie, il m'a imposé une sodomie une semaine après mes
28 ans. Puis il a fui les explications en se réfugiant lâchement
dans ses occupations quotidiennes puisqu'il est un individu socialement
intégré, un jeune trentenaire ambitieux, bien sous tous
rapports en apparence. Puis il n'a plus donné signe de
vie car il n'avait pas le courage d'affronter sa partie sombre en face
de moi.
J'ai eu la force au bout d'un mois de souffrance, de solitude et d'angoisse
de franchir la porte du commissariat et de dévoiler toute mon
intimité à la société. A présent,
j'ai le sentiment d'avoir accompli un devoir de respect envers moi-même,
ce qui me rassure sur mes ressources intérieures à surmonter
cette épreuve. Tout ne s'est pas éteint en moi, et surtout
pas mon instinct de vie, ma pulsion combative.
On m'a avertie que ma plainte avait peu de chances d'aboutir car l'agression
n'était pas "caractérisée". Un mois,
c'est trop tard. Les quelques marques physiques de l'abus ont eu le
temps de cicatriser. Il ne m'avait pas frappée. Parfois, je me
dis qu'il eût mieux valu qu'un sinistre détraqué
sexuel me menace dans un parking puis se satisfasse à mes dépens,
alors j'aurais peut-être eu droit à un peu plus de compassion
de la justice des hommes.
Quant à la blessure interne, un psychologue chargé de
m'expertiser m'a reproché d'avoir dramatisé, le viol n'étant
que le résultat d'un rapport de forces comme il en existe dans
tout couple normal. Conclusion : cet acte ignoble était acceptable
dans un tel contexte. Autant vous dire que j'étais encore plus
dégoûtée. We live in a man's world.
Néanmoins, j'ai décidé de consulter un autre psychologue,
une jeune femme, qui déjà ne me juge pas, ne minimise
pas ma souffrance et essaie de m'aider à comprendre pourquoi
ma relation a dérivé de la sorte. Me comprendre, le comprendre,
savoir comment je vais dépasser cette tragédie, mon avenir
avec le sexe opposé...
Je vous écris aujourd'hui pour redonner espoir et courage aux
femmes victimes de leur conjoint. Vous avez raison de ne pas oublier
même si votre entourage vous contraint au silence. Ne diluez pas
votre douleur dans le quotidien, elle vous prouve que vous êtes
une femme et non pas un objet insensible dont il peut disposer. Ne vous
laissez pas emmurer dans le non-dit, seules la parole ou l'écriture
peuvent vous guérir, croyez-moi. Il existe des personnes qui
savent accueillir votre secret, gardez confiance.
Je souhaite partager mon expérience de femme violée avec
d'autres soeurs de souffrance, que nous soyons solidaires dans notre
lutte contre la complaisance masculine. Elles peuvent m'envoyer leurs
e-mails à : syliu@guetali.fr
Je souhaiterais également que des professionnels de santé
m'éclairent un peu plus sur la psychologie des violeurs. Comprendre
mon agresseur m'aide à le vaincre. Merci d'avance.
Bon courage à toutes,
Sylvie syliu@guetali.fr
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