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Message ou FAQ

 

"Indemnisée" pour un viol en réunion

Email en pied de message.
Juin 2004

Bonjour je m'appelle Delphine. J'ai 24 ans. J'ai été victime d'un viol collectif à l'âge de 19 ans. Quatre types (dont 1 que je connaissais un peu, et 3 inconnus) m'ont mis un couteau sous la gorge, m'ont attaché les mains et obligée à des fellations, ils m'ont ensuite sodomisée tous les quatre.
J'ai porté plainte. Le viol a été reconnu et qualifié par la justice, mais l'identité de mes agresseurs n'a pas pu être prouvée. Un seul a été mis en cause, puis relâché car "manque d'éléments" pour prouver sa culpabilité. J'ai été (soi-disant) "indemnisée du préjudice subi" par une somme d'argent qui m'a été octroyée par la justice.
Mon témoignage est succint car j'aurai beaucoup plus à dire. La justice francaise, les lois, sont à revoir. Il semblerai que ce pays ne soit toujours pas prêt à punir correctement le crime de viol.
J'ai peur pour les autres filles qui croiseront le chemin de ces quatre ordures. La voix des victimes n'est pas suffisament entendue. Je viens de créer une association de femmes victimes de viol à Paris (le but est de rompre l'isolement en mettant les victimes en relation, en proposant des activités, des sorties, des groupes de soutien). Nous sommes déjà six, et soutenues par le Collectif Féministe Contre le Viol.
Hormis cela, je souhaiterai communiquer avec d'autres femmes ayant subi des violences sexuelles. Les dégâts que ce viol a commis sur ma vie sont considérables. J'ai besoin d'échanges, et autorise vivement la communication de mon adresse e-mail : Delphineplan@hotmail.com
N'hésitez pas à m'écrire SVP
Bon courage à toutes. Delphine.

Août 2004

Bonjour c'est de nouveau Delphine. Suite à mon premier message sur votre site, j'ai reçu beaucoup de messages. Je vous remercie de pouvoir nous permettre de nous exprimer. Je voudrai que mon message ci dessous soit également diffusé. Il s'agit de mon témoignage "complet".
La première fois je n'avais pas osé tout écrire.
Je vous recommunique mon adresse e-mail, car souhaite pouvoir échanger avec d'autres victimes : Delphineplan@hotmail.com
En vous remerciant encore de votre engagement pour nous aider. MERCI, MERCI, MERCI.

Témoignage :

Au moment des faits,il y a maintenant cinq ans, j'étais étudiante à la Fac de Lettres de Nice. J'avais une chambre en résidence universitaire. Lors d'une soirée, j'ai été droguée à mon insu (a priori on a mis un produit dans mon jus d'orange).
Quand je reviens à moi, je suis allongée sur le lit de ma chambre universitaire, j'ai les poignets attachés. je suis entièrement nue. il y a quatre types au dessus de moi. il y en a un qui me colle une lame de couteau sous la gorge, et me dit que "j'ai pas intérêt à bouger". je tremble, j'y comprend rien. je les supplie de ne pas me faire de mal. L'un d'eux me répond qu'ils ne vont me faire "que du bien". impossible de détacher mes poignets. J'ai un mal de tête atroce qui me plombe, certainement à cause de ce qu'ils m'ont fait prendre. Celui avec le couteau n'arrête pas de me dire de "la fermer" parce que je pleure. J'arrive pas à m'arrêter. Ils me disent que c'est "de la faute de Fred", qu'il n'avait qu'à pas "me tourner autour". Fred c'était mon meilleur ami à la résidence universitaire, comme un grand frère venu de la Réunion (il n'y a jamais rien eu entre nous qu'une grande amitié, mais apparement eux ont vu les choses autrement). Je n'y comprend rien, ils me parlent de Fred... ils m'ont dit, pour utiliser leurs termes exacts, que j'étais "une petite pute de trainer tout le temps avec ce sale blackos". Ils m'ont dit que je méritais "une punition", et "qu'après ça", c'est à eux que "j'appartiendrai".
Avec le couteau enfoncé sous ma gorge, ils m'ont forcée à faire des choses, après ils m'ont baillonnée la bouche. Ils m'ont frappée, cognée la tête contre le mur parce que je pleurais (d'où le trauma crânien constaté à l'hôpital).
Ils m'ont violée avec le manche de ma brosse à cheveux, et avec une de leurs bouteilles de bière. Ensuite, ils m'ont violée les uns après les autres, à plusieurs reprises, en me mettant sur le ventre, sur le dos...
Je suis restée baillonnée, attachée toute la nuit, à subir leurs assauts et à attendre qu'ils arrêtent ou qu'ils me tue pour mettre fin à tout ça. Ils ont abusé de moi pendant des heures, jusqu'à ce que je m'évanouisse.
Quand je me suis réveillée, j'étais nue sur le lit, détachée, ils étaient partis. j'étais complètement paumée, perdue. j'ai eu le réflexe d'appeller une copine pour qu'elle m'emmène à l'hôpital. J'y suis restée 6 heures.
Quelques jours après, j'ai quitté la région, abandonnant mes études et tout le reste.
J'ai porté plainte; les viols et sévices ont été reconnus par les expertises. L'instruction est, au jour d'aujourd'hui, toujours en cours, car les enquêteurs n'ont pas retrouvé les quatres.

Ceux qui m'ont fait ça doivent être contents car ils ont réussi facilement à me séparer de Fred : peu de temps après avoir appris ce qu'il m'est arrivé, il a coupé les ponts avec moi, sans plus d'explications.
Ceux qui m'ont fait ça ont anéanti ma vie.
Il faut savoir que je n'avais jamais eu de rapport sexuel avant les faits, j'ai perdu ma virginité avec le manche de cette brosse à cheveux.
Je voudrai pouvoir dire un jour, à ceux qui m'ont fait ça, que, quelque soit la justice des hommes (de toutes façons trop peu sévère par rapport à ce que j'ai enduré), la justice des Dieux, elle, sera sans pitié pour ce qu'ils m'ont fait.
Je voudrai dire à l'entourage des victimes, aux amis, que leurs rôle, soutient et compréhension sont essentiels, même si c'est dur. Ne fermez pas les yeux sur la souffrance des autres, même si c'est difficile. Si vous aviez subi ça, et que tout le monde vous abandonne, vous le prendriez comment ?

Pour terminer, je voudrai dire aux garçons et aux hommes, qu'il faut arrêter ça. Une femme a beaucoup plus à offrir par amour que sous la violence.
Les hommes ne sont absolument pas supérieurs aux femmes. Sans les femmes vous n'existeriez pas. J'ai compris une chose, en tous cas, c'est que de violer une femme est un signe énorme de faiblesse et de lâcheté.

Delphine

 

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