| Victime de viol, 
          je fais une thérapie et ...
 
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          en pied de message.Mai 2004
 Bonjour,Merci à toutes pour vos témoignages.
 En commençant à écrire, je ne sais même pas 
          si j'aurai la force d'aller jusqu'au bout.
 Cela fait 
          des années que je vais mal, avec des hauts et des bas, sans savoir 
          pourquoi, et en culpabilisant parce que je ne vais pas bien. J'ai 25 
          ans, et depuis l'âge de la puberté, je suis mal dans ma 
          peau.J'ai 25 ans, et je n'ai encore jamais eu de relation sexuelle (concentante). 
          Dès que j'ai une aventure avec un homme, je stoppe tout dès 
          qu'on en vient au sexe. Je ne supporte pas qu'il puisse me toucher. 
          Je me suis même demandée si je n'étais pas homosexuelle.
 Il y a 
          quelques mois, j'ai décidé d'aller voir une psy. Pourquoi? 
          Parce que je me suis fait violée, une nuit, en revenant tard 
          dans la nuit chez moi. Ce salaud, j'ai même pas vu son visage, 
          il a été violent, et il m'a violé. J'ai pas réussi 
          à me défendre. Et comble de tout, quand il m'a enfin laissée, 
          je me suis enfermée dans un grand silence. Je pensais qu'en n'en 
          parlant pas, j'oublierai. J'avais honte et me sentais sale, humiliée. 
          Pendant ces deux mois de silence, j'ai souvent pensé à 
          mourir, je regrettais que cet homme ne m'ai pas tué...Puis, j'ai enfin décidé à en parlé à 
          une personne, une psy, que je vois maintenant depuis 3 mois.
 Je pensais 
          que ça allais mieux, mais en travaillant avec ma psy, une ancienne 
          histoire, de mon enfantce, est remontée à la surface. 
          Je n'y pensais plus, et maintenant, tout revient, et ça me fait 
          peur. Je me rappelle, j'avais environ 9 ans, et quand je restais seule 
          à la maison avec mon père, celui-ci me mettait toute nu, 
          et il me touchait, il mettait ses doigts dans mon sexe, et il m'obligeait 
          à le touchait. Il me disait comment les grand faisaient l'amour, 
          et il me disait qu'il fallait que je lui fasse plaisir. Moi, comme une 
          pauvre conne, je faisais tout ce qu'il me disait, c'était mon 
          père, je l'aimais, je lui faisais confiance... Pourquoi??? En 
          plus, il me disais de ne rien dire, et moi j'obéissais Pourquoi 
          j'ai rien dit à personne? Pourquoi j'ai oublié pendant 
          si longtemps? Maintenant, 
          je comprends un peu mieux pourqoi je ne peux pas avoir de relation "normale" 
          avec les hommes, pourquoi ça me fait peur, et pourquoi je n'ai 
          pas confiance en eux. Mon père, 
          puis cet homme qui m'a violée, ont gâché ma vie, 
          maintenant, je comprends mieux, mais je sais aussi que jamais je ne 
          connaitrais le bonheur. J'ai gardé le silence trop longtemps, 
          et c'est trop tard pour en parler. Pouvoir 
          m'exprimer ici est tout de même un soulagement. J'ai honte, je 
          pleure, j'ai mal, mais je sais que vous ne saurez jamais qui je suis... Pourrais-je 
          un jour dépasser mon angoisse face aux hommes, pourrais-je un 
          jour oublier, pardonner...???Je vous souhaite à tous beaucoup de bonheur, malgré la 
          cruauté de la vie et des hommes
 Merci de 
          vos réponses et encouragements. Vous pouvez publier mon message, 
          mais surtout, que ce soit anonyme. Voici mon adresse: mmm3ggg@hotmail.com Bonjour,Lorsque vous aviez 9 ans, vous n'avez rien dit à personne parce 
          que, au fond de vous, vous saviez que si vous parliez, vous condamniez 
          votre père : de votre silence ou de votre parole dépendait 
          l'éclatement de la famille et c'est une responsabilité 
          beaucoup trop lourde pour une enfant ... Par ailleurs, vous étiez 
          agressée par la personne même qui était censée 
          vous défendre ou vous protéger : c'est un paradoxe la 
          plupart du temps ingérable pour une enfant. Votre père 
          a introduit dans votre vie d'enfant la sexualité adulte que vous 
          ne pouviez pas comprendre et pour laquelle vous ne pouviez mesurer tous 
          les enjeux. C'est entre autres choses ce qui provoque la honte chez 
          les victimes. Enfin, tout cela a développé chez vous un 
          sentiment de culpabilité, celui de la petite fille que son père 
          accuse de l'avoir séduit et qui se croit en effet coupable de 
          l'avoir fait ...
 Comme de très nombreux enfants victimes d'inceste, vous vous 
          êtes tu parce que vous avez pensé que c'était le 
          moins pire ... puis vous avez oublié.
 Ce phénomène d'amnésie est lui aussi extrêment 
          fréquent chez les enfants victimes de viol : pour pouvoir gérer 
          cette idée insupportable et porteuse d'une immense souffrance, 
          pour pouvoir survivre à l'insupportable, vous avez remisé 
          les souvenirs dans un coin de l'esprit où ils vous faisaient 
          moins souffrir mais n'en commandaient pas moins votre comportement.
 Dans ces cas d'amnésie, les souvenirs remontent, brusquement 
          ou petit à petit, de façon variable chez les individus 
          : ce peut être à l'occasion d'un événement 
          (décès du père, puberté, relation sexuelle, 
          divorce, ...) ou au cours d'une thérapie.
 Vous ne pourrez jamais plus oublier ... et tant mieux : ainsi, la question 
          est de savoir comment vous allez pouvoir reprendre la maîtrise 
          de votre avenir en vivant avec ce que vous avez vécu, comment 
          vous allez enfin pouvoir vous épanouir et avoir une vie affective 
          harmonieuse. Seule la thérapie peut vous y conduire et, contrairement 
          à ce que vous dites, il n'est pas trop tard pour en parler : 
          le temps est venu, justement. N'abandonnez pas votre thérapie.
 Dernière chose : vous pouvez poursuivre votre père jusqu'à 
          l'âge de vos 28 ans. Dans votre cas, le délai de prescription 
          est de 10 ans après votre majorité.
 Cordialement,
 Yves LAMBERT
 Merci pour 
          votre réponse.Vous me dites que je peux encore porter plainte contre mon père. 
          Mais comment? Comment pourais-je le supporter psychologiquement? Comment 
          l'affronter alors que je l'ai aimé (même si cette idée 
          m'étonne aujourd'hui)? Comment m'opposer encore à mon 
          frère qui m'a déjà si souvent accusé de 
          ne pas aimer mon père (quand j'étais petite, il me reprochait 
          de ne pas vouloir rester seule avec mon père. Mais moi je savais 
          ce qui m'attendais lorsque j'étais seule avec lui).
 Je ne sais 
          pas si j'aurai la force. De plus, 
          qui me dit que mon père ne niera pas les faits, lui qui m'a toujours 
          dit que j'étais méchante et menteuse quand je ne faisais 
          pas tout ce qu'il me disait. Je ne sais 
          pas quoi faire, je ne sais plus, je me sens trop seule pour porter cela.L'avenir me fait peur.
 Merci à 
          tous pour vos témoignages.Merci à vous pour votre site et vos réponses
 Cordialement mmm3ggg@hotmail.com Bonjour,Bien sûr, il est possible que votre père nie : ce sera 
          tout l'enjeu de l'instruction si vous portez plainte ... mais sachez 
          que les conséquences psychologiques sont typiques, ne peuvent 
          être simulées et sont facilement repérables par 
          les expertises psys auquelles victimes et agresseurs doivent se soumettre 
          : il est fréquent que des viols soient démontrés 
          longtemps après les faits, alors qu'il n'existe plus de preuves 
          matérielles ...
 Ceci étant dit, je comprends très bien la difficulté 
          dans laquelle vous vous trouvez : il pourrait être utile de vous 
          faire aider d'un professionnel pour prendre le temps de réfléchir 
          à tout cela. Vous pouvez aussi contacter le collectif féministe 
          contre le viol : SOS VIOLS 0.800.05.95.95 numéro gratuit et anonyme.
 Cordialement,
 Yves LAMBERT
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