J'ai
besoin de partager ma souffrance
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Avril 2005
Bonsoir,
Je ne sais pas vraiment pourquoi je vous écris là précisément
ce soir, mais je ressens actuellement le besoin de partager ma souffrance.Si
mon témoignage pouvait en plus être utile à 1 seule
personne, ce serait encore mieux. Je viens d'avoir 30 ans, je suis maman
solo d'un adorable petit garçon de 3 ans et je suis en cure analytique
depuis bientôt 1 an avec un psychanalyste très compétent.
J'avais 14 ans, j'étais en conflit avec des parents absorbés
par leur travail. Un soir j'ai rejoint une copine qui était avec
son petit ami et une bande de copains à lui, j'étais en
mobylette. On m'a proposé de l'alcool, des pétards...
"ils" ont à moitié cassé ma mobylette,
tout le monde est parti se souciant peu du fait que ma mobylette était
en panne, qu'il était 4 h du matin et que j'habitais à
6 ou 7 km , tout le monde est parti, sauf 1, il s'appelle Manu, il a
dit qu'il souhaitait me "dépuceler". En contrepartie
de quoi, il réparerait ma mobylette. J'ai dit non, que je repartirais
à pied. Il m'a allongé par terre en m'écrasant
de tout son poids, il a déboutonné mon pantalon, l'a baissé
et il m'a pénétré. Quand ce fut fini, il s'est
rhabillé, à allumer une cigarette, puis il est monté
sur sa mobylette et il est parti. Je suis rentré à pied
en poussant ma mobylette. Je ne me souviens même plus précisément
la réaction de mes parents lorsque je suis rentrée à
6h du matin, sale, hagard, la mobylette et le casque abîmés.
Quelques jours plus tard la "dite" copine me propose de la
rejoindre, je m'exécute, ni elle ni moi n'évoque ce qui
s'est passé le week-end précédent; au mieux, ils
pensent que tout était normal, personne ne dit rien.... La fameuse
bande (ils sont entre 4 et 8) nous rejoint. Et la tout s'éclaire,
je suis "La grosse salope"... pour tout le monde, Manu ayant
raconté une version toute différente des évènements
à ses copains. Et tout s'enchaîne... j'ai subi 6 mois de
viols en réunion (à 3 ou 4),humiliations, violences physiques,
je préfère vous passer les détails. Je suis évacuée
par le SAMU car j'ai inhalé trop de trichloréthylène,
je ne suis qu'à moitié consciente, mais j'arrive à
demander aux infirmiers "qu'ils me tuent". Le répit
vient avec la rencontre d'Antoine mon premier amour. les 6 premiers
mois furent merveilleux.
A partir de ce moment, ma vie est devenue un "grand n'importe quoi".
A 15 ans, j'étais en garde à vue au poste de frontière
près de Maastricht pour trafic de hashich, puis j'ai développé
une pelade sur la moitié de mon crâne, je suis passée
aux drogues dures, je ne pensais qu'à me "défoncer",
j'ai consulté(sur décision de justice et par choix) un
psychiatre chaque mercredi (sur une période de 18 mois environ),
tout était bon pour me "défoncer", mon premier
amour m'a quitté, j'ai touché le fond. Je multiplie les
conquêtes sexuelles, je deviens un objet.J'adopte un look punk
et je cotoye donc des gens violents "sexe drogue et rock'n roll".
Premier séjour en hopital psychiatrique suite au meurtre d'une
jeune fille, meurtre perpétré par mon petit ami du moment.
Officiellement pour toxicomanie et comportement dangereux.
2 mois plus tard je ressors, bien décidé à "ce
que tout ça" s'arrête. Je pars en post-cure, dans
un centre fermé dans les vosges, j'y reste 48h.Retour chez mes
parents, "ça" recommence, la drogue, les relations
sexuelles, Nouveau séjour à l'hopital psy, puis le jeune
frère de ma mère m'accueille chez lui, loin de chez moi
en ardèche. Je rechute la-bas et suis admise dans un autre hopital
psy. A la suite de quoi, j'entame une post-cure en famille d'accueil.
J'irai au bout de ma cure par attachement pour une chienne. j'avais
alors 19 ans. Je me suis inscrite au lycée pour reprendre mes
études, j'ai embarqué ma chienne et j'ai pris un appartement
à plus de 900 km de chez moi. Pour moi c'était une nouvelle
vie, ici personne ne me connaissait, je ne connaissais personne, il
n'y avait donc aucune raison qu'on me prenne "pour une grosse salope",
effectivement j'ai eu une période d'alcamie, où j'ai rencontré
des gens formidables, on m'a aimé, j'ai aimé.J'ai fait
des études, j'ai travaillé en tant que formatrice en comptabilité,
j'ai vécu avec 2 hommes différents, mes problèmes
de drogue étaient casiment résolus. En revanche j'ai eu
des périodes d'alcoolisme, ce qui m'a fait perdre mon travail
(j'ai démissioné).
J'ai toujours eu des problèmes dans mes relations aux autres,
et bien sur dans mes relations sexuelles; j'ai eu et j'ai encore des
problèmes alimentaires. A 26 ans, j'ai recontacté le petit
ami qui avait perpétré le meurtre 10 ans plus tôt,
j'ai eu avec lui des relations sexuelles dont est né mon fils.
Lui est reparti en prison.
Quand mon fils est né, j'ai perdu pied à nouveau et lorsqu'il
a commencé à parler, j'ai pris conscience que je devais
pour lui me faire aider. il m'a fait prendre conscience de ce que j'avais
fait (un enfant avec un homme violent et assassin), il m'a fait prendre
aussi conscience de tout ce qui m'était arrivé à
14 ans.
J'ai fait le vide autour de moi, je me suis complètement isolée,
je ne supporte plus rien ni personne, c'est ce qui m'a amené
chez mon psy. Je commence à voir le bout du tunnel, je sais qu'il
est loin mais j'aimerais tellement être libérée
et heureuse les 30 prochaines années, pour l'avenir de mon enfant,
pour son psychisme, son équilibre.
La psychanalyse me semble la seule issue possible.
J'ai parlé des évènements qui se sont déroulés
lorsque j'avais 14 ans, pour la première fois il y a 6 mois.
Les auteurs n'ont jamais été inquiété, j'ai
pris conscience que j'avais été abusé lorsque j'ai
rencontré mon psy actuel, le délai de prescription était
passé de quelques mois.(ah l'inconscient!)
Je prends encore ponctuellement de la drogue, mais je suis cette fois
sur la bonne voie! je consulte de 3 à 6 fois par semaine, c'est
très dur mais cette fois j'ai l'impression que cette souffrance
ne sera pas vaine. Mes parents me donnent de l'argent pour ma psychanalyse,
c'est la seule chose qu'ils ont jamais su faire.
C'est la première fois que je me livre comme ça.... merci
de m'avoir "écouté".
amicalement
ingrid
ps: e-mail sur laposte.net : loulouteuh@laposte.net
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