Mon
amie a été violée Email
en pied de message Juillet 2007 Bonjour,
Je me permet de vous écrire parce que j'ai un réel problème
et je souhaiterais recevoir des conseils ou de l'aide pour y remédier.
Je me présente, je m'appelle Pierre, j'ai 22ans et mon problème
concerne ma petite amie, que j'aime énormément. Cela fait à
peine 2 mois que l'on est ensemble, enfin… disons plutôt remis ensemble.
En effet, nous nous étions connus il y a 4 ans mais l'histoire n'a pas
tenu du fait de nos âges respectifs (elle 15 moi 18) et de sa mère
qui est une habile manipulatrice égoïste. Aujourd'hui, nous nous sommes
retrouvés (elle a donc 19 ans et moi 22) et sommes décidés
à tenter de faire notre vie ensemble. Je l'aime vraiment beaucoup et je
sens en elle beaucoup d'amour également, mais aussi un besoin de moi, de
soutien, d'être un pilier pour elle. Ca risque d'être long,
alors je vous fait un bref résumé de tout ce qu'elle subit : divorce
de ses parents qui se déchirent et se sont disputé la garde de ses
2 jeunes sœurs (la mère n'en a strictement rien à faire d'elles
c'est juste pour pousser à bout son ex-mari qu'elle lui met des bâtons
dans les roues), difficultés liés à un nouveau train de vie
(appartements, travail en intérim qui la fait se sentir inutile, factures,
bref tous les aléas d'une vie de jeune adulte qui démarre et que
je ne connais pas grâce à ma mère qui est exceptionnelle).
Aujourd'hui elle se sent impuissante face à la condition de ses sœurs qui
vivent chez sa mère la semaine (elles font des allers-retours réguliers
à l'hôpital pour malnutrition, leur mère leur dit qu'elle
se moque d'elles, qu'elles sont des boulets, etc.) et de son père qui la
dénoncer aux services sociaux pour avoir la garde des petites mais qui
n'ose pas car sa nouvelle compagne menace de la quitter s'il a la garde permanente
de ses filles. Voilà, en gros parmi les soucis que mon amie rencontre en
ce moment, mais il en reste un majeur, qui concerne directement le sujet de ce
forum, et j'y viens. A chaque fois que je tentais une approche pour faire
l'amour avec elle, elle se dérobait, alors que je me souvenais que la première
fois qu'on était ensemble, elle avait une sexualité débridée.
Je me suis mis à me poser des questions sur moi-même, penser que
je ne l'attirait plus. Voyant cela, elle a fini par m'avouer qu'il y a plusieurs
mois, elle a été violée par quelqu'un qu'elle croyait être
un bon ami. Depuis, on en discute régulièrement, je fais tout mon
possible pour l'aider à remonter la pente, et des progrès sont visibles
de semaines en semaines (nous ne pouvons nous voir que le week-end). Je n'ai toujours
pas réussi à la toucher aux zones érogènes, et elles
non plus, ce qui est paradoxal sachant qu'elle n'a aucune difficulté à
s'afficher nue devant moi ou même partager mes douches. Mais je lui rappelle
régulièrement : je suis prêt à attendre encore très
longtemps qu'elle se sente prête à franchir le pas, je veux construire
ma vie avec elle et ce n'est pas cela qui m'arrêtera. Vous allez vous dire
" encore un gars qui veut une astuce pour réussir à coucher
avec sa copine " , et bien non, car je n'ai pas fini !! Ca fait pourtant
déjà beaucoup, non ? Pour ma part, tout irait bien s'il
n'y avait que ça, vu que les progrès se faisaient de jour en jour.
Oui, j'ai dit faisaient… Il y a, depuis 2 jours, un comportement d'autodestruction
terrifiant chez elle. J'explique brièvement l'histoire : il y a déjà
un certain temps, bien avant que nous nous remettions ensemble, elle avait donné
son PC (une vieille bécane largement dépassée) ainsi que
300 € à un ami d'un ami d'un ami (enfin vous voyez ce que je
veux dire) pour qu'il lui répare et le reboost un petit peu (300 € …
elle m'a dit ça j'ai hurlé au scandale mais bon…). Le truc, c'est
que ce type, au bout d'un long laps de temps, à encaissé l'argent,
gardé l'ordinateur mais n'a encore rien fait dessus. Ma copine commençait
donc à devenir insistante sur les coups de téléphone, jusqu'au
jour où il s'est énervé. Un jour, elle se déplace
jusqu'à chez lui, sa mère lui ouvre et lui explique qu'il est dans
le coma à la suite d'un accident de scooter, et qu'elle va s'arranger pour
qu'elle récupère son ordi au plus vite. Le truc (et c'est là
un peu où mon amie a abusé), le jour de la fête des mères,
poussée par ses proches, elle a rappelé cette femme pour avoir des
nouvelles de son fils et de son ordinateur : fureur de la mère (que je
trouve compréhensible étant donné que le type était
encore dans le coma) qui la menace de la taper etc. Depuis lundi, le comateux
s'est réveillé, et appelle ma petite-amie en la menaçant
" j'ai entendu dire que tu t'es embrouillé avec ma mère, j'vais
t'attraper tu feras moins la maline " enfin un truc dans le genre. Il a ensuite
continué a lui envoyer des messages de menace (que ma copine a effacé
!!! pardon mais des fois je me demande ce qui lui passe par la tête). Elle
finit par lui envoyer un autre message stipulant qu'il y avait eu un malentendu,
qu'elle souhaitait juste récupéré son PC (tant pis pour les
300 €) et qu'après ils n'entendraient plus jamais parler d'elle.
Après un long silence, il la rappelle et lui dit que s'il elle veut
le récupérer à tel endroit, tel jour, telle heure, toute
seule, et qu'elle ne doit en parler à personne…. Et qu'est-ce qui se passe
? Elle compte y aller !!! La seule chose que je sais c'est que c'est chez lui
(un immeuble de cité) un soir de la semaine (jeudi ou vendredi car ce soir
elle a sa sœur). D'où l'urgence de mon message et de la réponse
espérée. Je n'arrête pas de lui dire que s'il souhaitait
réellement lui rendre son maudit PC, il ne poserait pas de conditions telles
que celles-ci, le plus inquiétant étant le fait qu'elle doive garder
le silence. Tout ceci est extrêmement inquiétant. Je ne sais pas
quoi faire, elle ne cesse de me dire qu'elle ira, quoi que j'en dise, Je suis
terrifié à l'idée qu'il lui arrive quelque chose. Ce qui
me terrifie, c'est l'attitude et les propos qu'elle tenait hier soir au téléphone
et quand je suis allé la voir pour tenter de l'en dissuader. Elle semblait
en avoir assez de la vie, elle semblait résignée à se jeter
dans la gueule du loup. Elle me disait que s'il lui arrivait quelque chose, c'est
que ce serait son destin. Ensuite elle faisait comme si de rien n'était,
alors que je suis sûr que ça lui occupe l'esprit tout autant que
moi. J'ai peur qu'elle passe la soirée dans une cave… Je ne connais même
pas précisément la date et l'endroit ni l'heure, et je suis seul
au courant, que se passerait-il s'il lui arrivait quelque chose ? Elle refuse
catégoriquement que je l'accompagne ou bien d'y aller avec une bombe lacrymogène
ou un quelconque appareil de protection. Elle m'a seulement dit qu'elle comptait
ne pas s'habiller sexy. Tu parles, qu'est-ce que ça changerait dans l'esprit
d'un type qui prémédite peut-être une action méprisable
? S'il-vous-plaît, que puis-je faire ? Je me sens démunie
comme elle se sent démunie pour ses sœurs. Elle n'arrête pas de me
dire " T'inquiète pas, ce week-end tout ira mieux, après on
sera heureux ". Je ne sais pas ce qu'elle cherche, à se détruire
peut-être, mais je ne vois pas pourquoi un vulgaire ordinateur arrangerait
les choses entre nous, surtout que depuis deux jours elles se dégradent.
Elle est extrêmement perturbée par le fait de ne pas pouvoir
" me satisfaire " comme elle dit le week-end, j'ai beau lui répéter
que ce n'est pas grave rien n'y fait. Ca l'obsède complètement.
Sur les sites de témoignages de victimes que je consulte pour m'aider à
trouver une solution, beaucoup de femmes parlent de trouver un homme qui s'occupe
bien d'elle et que cela les aide considérablement… cela semble ne pas fonctionner.
Je vous écris car j'ai l'impression que mon cas est quelque peu unique,
vu que je n'en ai lu aucun de similaire. J'écris dans la précipitation
et l'urgence, comme les idées me viennent, alors je m'excuse si ce texte
vous parait un peu " décousu ". Je ne cesse de lui répéter
que s'il est se fait violer ou autre traumatisme possible qui est susceptible
de se produire, je ne vois pas comment on pourrait être plus heureux ensemble
après, ni comment tout pourrait s'arranger. J'ai l'impression d'une condamnée
qui va à l'échafaud sans sourciller, dans la résignation,
ayant baissé les bras et perdu toute envie de survivre. J'arrive
presque à m'imaginer que s'il ne se passe rien, elle serait déçue
vu le comportement qu'elle arbore. Je suis complètement chamboulé,
j'ai besoin d'aide et de conseils s'il-vous-plaît ! Quelques
petites précisions : elle refuse catégoriquement de porter plainte,
et n'envisage aucune consultation ou thérapie particulière pour
l'instant. Je pense avoir oublié encore des choses mais l'essentiel
est dit et j'attends votre réponse, espérant une solution.
Je vous tiendrais au courant de l'évolution de ce problème mais
pour l'heure, j'attend une réponse. Ce message peut-être
publié, c'est le dernier de mes soucis, en revanche je ne divulguerai aucune
information personnelle sur elle. Mon e-mail : crocop27@aol.com A très
vite j'espère et désolé pour la longueur de ce message.
Cordialement, Pierre A. P.S. : Depuis l'écriture de ce
message, je l'ai eu au téléphone, son père ne tient plus
à demander la garde permanente de ses soeurs à cause de sa nouvelle
compagne (ce qui aggrave considérablement son désarroi), elle semble
peu consciente du danger mais avoue qu'elle se moque totalement de ce qui pourrait
lui arriver et semble ne pas vouloir abandonner. Elle est persuadée que
sa disparition ne manquerait à personne, que je referai vite ma vie, que
sa famille l'oublierait vite. Je dois la rappeler ce soir pour en rediscuter.
Elle était en pleurs au téléphone, et à vivement réagi
quand je lui ai dit qu son attitude bornée la faisait ressembler à
sa mère. Voilà... toujours le même espoir d'avoir une réponse
rapide qui m'éclaircirait avant demain sachant que je suis à peu
près sûr qu'elle n'ira pas aujourd'hui (mercredi). Bonjour, C'est
vraiment urgent et délicat car votre amie adopte un peu un comportement
où l'action, le passage à l'acte, prime sur la réflexion
et cela parce qu'elle ne peut plus contenir son angoisse. La conflictualité
dépressive qui l'anime active des représentations de perte (lien
parental, familial...), lesquelles l'entraînent vers une envie de rupture
de ce cycle pénible, quitte à oublier toute prudence et "à
se jeter dans la gueule du loup", comme vous le percevez. C'est une envie
d'en finir avec les tensions qui s'accumulent et non pas un réel désir
de mort. Mais c'est quand même une menace pour elle, un danger, qu'elle
pourrait bien ne pas maîtriser, comme si elle voulait avoir la preuve, par
cet acte, de son impuissance ou d'un sentiment d'"abandon" inévitable. C'est
aussi, au contraire, une volonté de ne pas capituler et de décider
de sa vie, par contraste avec les évènements qui ont marqué
son existence. Il m'est difficile d'expliciter, d'autant plus que vous devez
réagir rapidement, pour la faire renoncer à son projet ; pour la
retenir, peut-être devriez vous lui dire que ses soeurs ont besoin d'elle
et qu'il serait préférable qu'elle se préserve ; dites lui,
que sa "mission" n'est pas de se mettre en danger pour un PC et que
vous n'êtes pas dupe sur le désespoir qui l'entraîne vers un
prétexte aussi fragile, que la recherche d'une solution ne passe pas par
ce prétexte et qu'elle met sa vie en danger inutilement, simplement pour
se prouver qu'elle a encore un certain pouvoir, oui mais un pouvoir destructeur
face à elle-même. Je reprends le fil de notre conversation après
réflexion. Cordialement, Chantal
POIGNANT Voilà,
par rapport aux témoignages auxquels vous vous référez, vous
avez retenu uniquement ce qui pouvait vous donner une image négative de
vous-même ; en effet, les personnes ayant subi des agressions sexuelles
ont, toutes, des difficultés à trouver une sexualité sereine
et épanouie, surtout d'ailleurs, quand elles se refusent à entreprendre
une thérapie : elles restent alors dans un profil post-traumatique avec
des "symptômes" que connaît votre amie, dans le sens où
l'acte sexuel reste empreint d'un sentiment de honte et de culpabilité
diffus. Les souvenirs résistent au temps et à la tendresse du
partenaire et viennent s'interposer dans leur relation. Seul, un travail psychologique
sur les représentations permettent d'en éloigner le poids. Mais
votre amie refuse toute approche de ce genre. Essayez de la convaincre de nous
écrire. Par rapport au danger que court cette jeune fille, ne pouvez
vous pas repérer l'adresse et alerter un ami ? Transmettez lui, en tout
cas, les numéros utiles : * http://www.sosfemmes.com/violences/violences_voisine_victime.htm#cidessous Tenez
moi au courant SVP. Cordialement, Chantal
POIGNANT Conseil
Merci
infiniment de votre réponse si rapide, cette attention me va droit au coeur.
Je ne vais pas tourner autour du pot : ça s'est arrangé, en
quelque sorte. Je m'explique, peu de temps après réception
de votre réponse, j'ai reçu un appel de mon amie. Elle voulait m'annoncer
une bonne et une mauvaise nouvelle. Je demande la mauvaise nouvelle : elle travaille
samedi matin (soulagement face à une telle banalité). Je lui demande
la bonne nouvelle : elle me dit "je suis arrêté sur le bord
de la route, sur le chemin du retour avec mon ordinateur dans le coffre".
Je lui demande alors s'il s'est passé quelque chose, elle me répond
qu'elle s'est fait insulter pendant un quart d'heure et que la mère a failli
la taper mais qu'elle l'a refroidi en la menaçant d'appeler la police.
Donc, tout se termine bien. Je suis extrêmemnt soulagé, et à
la fois partagé avec cette sensation de m'être fait avoir et que
s'il s'était passé quelque chose, pensant que ce ne ce serait pas
passé ce soir, j'aurai mis du temps à réagir et je n'aurai
rien pu faire. Bref, après avoir réfléchi quelque
temps, et surtout après qu'elle m'ait dit qu'elle se sentait elle aussi
très soulagée et contente d'avoir mis un terme à cette histoire
et qu'elle avait repris goût à la vie, j'ai décidé
de ne retenir que le sentiment de soulagement et non pas celui du petit-ami frustré
de n'avoir pas pu changer sa décision. Je me dis que votre analyse
était exacte et et qu'elle est satisfaite d'avoir en quelque sorte repris
le contrôle de sa vie. A moi maintenant d'essayer de lui rendre progressivement
goût à la vie, et tenter de l'aider à résoudre ses
soucis, en faisant mon possible pour m'occuper de ses soeurs par exemple. Qu'en
pensez-vous? J'espère que ce genre de situation ne se reproduira
plus. Et je vais lui toucher quelques mots au sujet de la proposition que vous
avez faite de vous écrire pour l'aider à remonter la pente. Je pense
que le fait de parler de ses problèmes n'est pas une barrière pour
elle, car je sais qu'elle écrit souvent tout ce qu'elle ressent dans une
sorte de journal, c'est plutôt le fait d'en parler à quelqu'un autre
qui la bloque, d'où ce refus d'aller consulter un professionnel. Je pense
effectivement qu'un "travail psychologique sur les représentations"
serait la meilleure des solutions, sachant l'effet formidablement reconstructeur
que cela a eu sur ma mère. C'est à elle de décider
de ce qu'elle fera, mais avez-vous des conseils à me donner pour l'accompagner
et la rassurer sur le fait que ce n'est pas dramatique de ne pas réussir
à combler mes désirs sexuels. Je fais ce que je peux mais j'avoue
commettre des maladresses par moments (comme l'achat d'un magazine FHM qui m'a
valu une scène terrible et qui l'a fait se remettre en question encore
une fois, j'ai d'ailleurs renoncé à m'abonner comme prévu
à cette revue). Voilà, je vous remercie encore pour l'aide
que vous m'avez apporté, et que j'espère vous apporterez (je n'en
doute pas) à mon amie si toutefois je la convains de vous écrire.
Cette fille est tout pour moi, et j'espère être à la hauteur
de ses besoins pour se reconstruire. Vous êtes un site d'utilité
publique et je vous conseillerez si je rencontre des personnes susceptibles d'avoir
besoin de l'aide que vous êtes en mesure de leur apporter. J'adresse mon
plus grand soutien aux femmes qui ont connu des violences et leur souhaite beaucoup
de courage pour remonter la pente. Merci encore, Sincères
salutations, crocop27@aol.com Ouf!
"tout est bien qui se termine bien" ; j'aime mieux çà
et il est vrai que votre amie semble avoir besoin de contrôler les évènements,
d'où ses angoisses quant à la sexualité qu'elle voudrait
"impeccable" ; en fait, elle se voudrait, elle-même, irréprochable
et ses exigences traduisent un fort doute sur ses propres qualités : elle
n'a pas confiance en elle mais cherche à cacher sa "fragilité"
dans une recherche de la "perfection". Dites lui que la perfection
n'existe pas, qu'on peut seulement atteindre une forme d'épanouissement
qui n'est que l'ajustement équilibré de nos qualités, de
nos manques, de nos failles, peut-être même de nos défauts,
tout ceci n'étant que le reflet de notre vécu, de nos expériences
qui ont fait que nous sommes nous-mêmes, mais toujours "en devenir",
toujours "inachevés" et que vivre consiste justement à
s'adapter à ces failles qui nous meurtrissent et à tenter de les
intégrer, de les dépasser. Autrement dit, la vie est un apprentissage
social, professionnel, affectif et sexuel ; rien n'est maîtrisable d'avance. Merci. Chantal
POIGNANT |