Je
me sens lâche de ne pas partir
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en pied de message
Novembre 2008
Bonjour,
J'ai découvert votre site en 2003 et depuis, je viens régulièrement
lire les témoignages. Je ne pensais pas qu'un jour j'enverrai
un message car j'ai pu lire la vie épouvantable que vivent certaines
femmes. Mon histoire est similaire sur beaucoup de point. On retrouve
le même profil pour tous ces hommes violents. Lorsqu'on lit ces
récits, on se reconnaît dans énormément de
détails. Cela fait 9 ans que je vis avec cet homme. Un premier
enfant arrivé un an après notre rencontre et un deuxième
après une fuite et un retour "inévitable" avec
lui. Il faut savoir qu'il a déjà deux enfants qu'il ne
voit plus et qu'il a vécu avec une autre femme avant moi (laquelle
il a quitté soi-disant car elle n'acceptait pas ses enfants !!!
mais il me compare sans arrêt à celle-ci !!!! la regrettant
!!!Bref, cela a commencé doucement. Dès le début
de notre rencontre, première crise de jalousie au bout d'une
semaine. Je l'ai laissé tombé mais il est revenu me chercher.
Plusieurs détails de son comportement au début me déplaisaient
fortement, sa jalousie, sa possessivité, ses remarques quelques
fois désobligeantes mais au début, on passe dessus, pensant
que cela ne va pas durer. On se voile la face. Bref, bébé
arrive, achat d'une maison, déménagement avec un bébé
de 3 semaines dans une caravane car maison en travaux. Pendant ma grossesse,
jamais une main ni un calin sur mon ventre, bref, je portais ce bébé
seule, c'est sûr mais quand même ! Je me souviens qu'ayant
eu une infection urinaire, "Monsieur" m'avait dit un soir
en me couchant que je le "dégouttait" ! Première
parole choquante qui reste gravée à vie. Ensuite, je me
souviens d'un ourlet de pantalon que je piquais pendant qu'il l'essayait
et comme ça n'allait pas comme il voulait sans doute, me traite
de bonne à rien. Déjà j'aurai dû m'alarmer
sur ce non respect. Mais bon, y' a aussi de bonnes choses. Suite à
une soirée organisée pour un proche par ma famille, crise
de jalousie pendant la semaine suivante parce qu'un de mes cousins m'avait
pris dans ses bras pour me remercier. Traitée de tous les noms
pendant une semaine, de "putain, de salope".... et j'en passe.
N'ayant à la base pas vraiment confiance en moi, je me suis laissée
manipulée et le pire c'est que je pensais que j'étais
nulle et ne valait rien. J'ai fait une dépression post-natale
pas soignée qui a duré dans le temps. Mais je pensais
toujours que c'était moi qui ne valait rien et bien sûr,
"monsieur" vous enfonce doucement dans ce négatif que
vous avez de vous-même .Donc, régulièrement, des
critiques sur tout ce que je fait, le ménage mal fait, "monsieur"
passe derrière et fait ses commentaires, les repas n'en parlons
pas "qu'est-ce qu'on bouffe comme merde aujourd'hui", "t'es
vraiment q'une merde, excuse-moi de te le dire, mais t'es qu'une pauvre
fille", "t'a vu ta gueule", "et dire que je baise
ce gros cul"... Bon, je vais pas faire toute la liste mais ce sont
des paroles parmi les plus vexantes... Sans parler de mon travail, "on
se demande comment ils te supportent là- bas", "t'es
coincée de toutes façons"… Première gifle
la veille de mon anniversaire, et le lendemain j'avais trente personnes
à la maison soit un an après la naissance de notre premier.
Je pars illico, dans la nuit car c'est en rentrant de soirée,
d'ailleurs arrosée donc forcément ! Encore de la jalousie
! A cette époque nous voyons encore un peu de monde et sortons
un peu. Notre fils est en garde pour une fois. Je pleure, hurle, manque
de me planter en voiture... Je ne sais pas où aller. Me réfugie
chez ma tante. Il m'appelle trois heures après car il a cuvé
un peu. Me dit qu'on se sépare, qu'on vend la maison.... Bref,
je retourne, bien obligé puisque j'avais des invités à
recevoir.
Suite à une visite chez mon médecin parce que ça
n'allait plus, fin 2002, celle-ci me fait parler et découvre
le problème et c'est là qu'elle me dit que tout cela n'est
pas normal que là je prends conscience ! Je ne me rendais pas
vraiment compte avant que ça n'était pas normal. J'ai
donc commencé un traitement anti-dépresseur, et je commence
à remonter la pente doucement, comme si je sortais d'un sac et
voyais la lumière en haut. Un soir début 2003, encore
des réflexions pendant le repas, et là, je n'en peux plus
et je réponds comme jamais je ne faisais avant pour éviter
tout débordement. Je me lève et le menace moi aussi et
me retournant je reçois un coup sur la tempe et là ça
part en vrille devant notre petit de 2 ans et demi. Je finis par terre,
moitié assommée, rouée de coup de pieds et plus
je lui disais d'arrêter plus il tapait, et je ne voyais que mon
fils hurler... ça me remonte rien que de l'écrire et j'ai
envie de hurler de douleur, tant physique que morale. Je réussis
à me relever à prendre mon fils, je me réfugie
dans sa chambre et là il continuer de me donner des coups de
pieds dans les fesses (c'est encore plus insultant) et me menace avec
son cran d'arrêt. Je ne sais plus qui j'ai en face de moi. Je
veux m'en aller mais il récupère le petit et m'en empêche
et tout d'un coup de calme et me dit d'arrêter de pleurer en regardant
le petit. Forcément, c'est moi la méchante que pleure
et qui fait du mal. Je l'ai cherché... je passe la nuit je ne
sais comment, me lève et me fait peur en me voyant dans la glace,
yeux au beurre noir et surtout très mal au coccyx (forcément
après radio, fracture). J'emmène mon fils chez la nourrice
qui me fait réagir : il faut que tu ailles chez le médecin.
Ce que je fais mais étant en retard au travail, je pars au travail.
Finalement, je récupère mes affaires et celle de mon petit
le matin et me réfugie chez ma mère. Dépôt
main courante à la gendarmerie car trop peur. Bref, pendant un
mois, harcèlement au téléphone, regrets, pleurs,
manipulation avec mon fils, et moi trop faible et voulant régler
toute seule mon problème, je retourne la veille de la rentrée
à l'école de mon petit, surtout que j'ai très peur
de lui et que je ne veux pas qu'il s'en prenne à ma famille.
Tout le monde me tourne le dos, je ne vois plus personne. Je ne sors
pas sans lui sinon j'ai la gueule. Nous sommes en 2008, je continue
à prendre des réflexions mais je suis plus forte (ce que
je crois). Mon message est trop long et j'en ai encore beaucoup à
dire. En 2004, après la naissance de notre second, j'ai voulu
partir mais re-menace de mort sur moi et mes enfants et lui... Je suis
toujours avec lui. J'ai pris encore des coups en mars 2008 et il y a
15 jours de ça. Je me dégoutte car je me sens lâche
de ne pas partir et dès que je lui dis qu'on ne peut plus continuer
comme ça, menace de se suicider ou alors que je ferais mieux
de m'en mettre une. En résumé, c'est un cercle vicieux.
Et surtout je n'ai pas le courage de devoir affronter ce qui va se passer
si je pars : harcèlement, menaces...Je travaille à plein
temps, j'assume mes enfants toute seule (jamais ne m'aide pour l'école,
la maison, leur faire leur bain...) mais comment font les autres me
dit-il ! Sans parler que pendant 4 ans, il est resté sans travail
et que je rentrais le soir, "monsieur" assis devant sa télé.
Il déprimait. Forcément, boisson aussi. Apéro midi
et soir. Et que je lui dit qu'il ne peut s'en passer "T'es coincé,
tu sais pas vivre!" Et bien sûr, je paye pratiquement tout,
emprunt maison, voiture, edf, assurance, école... La vie rêvée
quoi ! Mais lui nous paye les sorties resto et autre futilités...
Bon, je me plains mais comment font les autres qu'il me répond
!Je vais stopper mon message car je pense qu'il est vraiment trop long.
Et je ne vous ai pas encore tout écrit. Vous pouvez me répondre
sur cette boîte mail. Merci de m'avoir lue.
Pauvre pomme.
Bonjour,
Je pense qu'en mettant votre témoignage en ligne, vous recevrez
suffisamment de messages "des autres", lesquelles vous diront
sans doute ce qu'elles font dans une situation aussi intolérable.
Pour ma part, je vous conseille vivement de porter plainte - et non
pas de vous contenter d'une main courante - en écrivant par lettre
recommandée avec accusé de réception au procureur
de la République au tribunal de grande instance de votre département
et en joignant certificats médicaux et témoignages. Ainsi,
cet homme sera tenu de modifier son comportement à votre égard
car il devra sans doute répondre de ses actes devant la justice
(contrairement à une main courante qui n'a pas de suites judiciaires).
Votre travail vous permet d'avoir une certaine autonomie ; dans l'attente
d'un nouvel appartement, au cas où vous seriez décidée
à partir, vous pourriez trouver un hébergement provisoire
dans l'un de ces centres :
* http://www.sosfemmes.com/ressources/contacts_chrs.htm
Parallèlement, je vous invite à vous adresser au juge
aux affaires familiales du tribunal de grande instance de votre département
afin qu'il vous aide à statuer sur l'organisation de la séparation
notamment par rapport aux droits de visite et d'hébergement que
cet homme pourrait réclamer au niveau des enfants. Mieux vaut
régler la situation clairement et précisément justement
pour que vous ayez le moins possible de comptes à rendre à
ce monsieur. Pour plus de renseignements, je vous recommande de contacter
le centre d'informations sur les droits des femmes, le plus proche de
votre domicile ; c'est gratuit :
* http://www.infofemmes.com/index.php?option=com_content&task=view&id=22&Itemid=1
Mais avant toute chose, vous devez réfléchir et préparer
peut-être votre départ :
* http://www.sosfemmes.com/violences/violences_partir.htm
J'ai besoin de votre accord explicite pour éventuellement publier
votre témoignage avec cette adresse. J'attendrai votre réponse.
Cordialement,
Chantal POIGNANT
Conseil
Bonjour,
Je vous remercie pour la rapidité de votre réponse.
J'ai réfléchi au fait de faire paraître mon témoignage
et je vous autorise donc à éventuellement le publier.
Merci pour vos conseils et surtout pour ne pas juger nos choix.
Pauvre pomme.
ver85@laposte.net
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