Cet
horrible sourire
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en pied de message
Avril 2010
bonjour,
voilà quelques jours que je me suis décidée à
faire lire mon histoire (anonymement, mais la faire lire quand même)
et je suis enfin tombée sur votre site...
je voulais savoir si il est possible de publier ce témoignage..
j'ai écris ce texte il y a 2ans... aujourd'hui il m'est enfin
possible de le relire, de le réécrire sans en souffrir...
et je suis assez fière d ce chemin.. je voulais pouvoir dire
aux autres personnes qu'il est possible d'être heureux malgré
une histoire douloureuse et je pense aussi que cette démarche
me permettra de tourner encore un peu plus la page...
je vous joins le texte....
et vous remercie par avance de l'attention que vous portez à
mon mail
confidence
Nous étions
quatre copines inséparables… en réalité deux « petits
couples » !!! Ma « moitié »,
je l’avais rencontrée en maternelle, et depuis que nous avions
3ans, nous ne passions pas un jour sans nous voir… (si nous avions pu
habiter ensemble… hihi hihi)
Au CE1, nous nous sommes retrouvées à 4… inséparables…
On inventait des jeux de toute sorte, sans autre matériel que
notre imagination et la nature…
Nous habitions des petits villages espacés de quelques kilomètres…
petits, tous petits villages où tout le monde connait tout le
monde, au milieu des champs, des bois…
Avec le groupement scolaire, nous allions dans la même école,
nous étions dans la même classe.
A, M, Cl et Ca… rares étaient les disputes… la vie était
belle, nous étions heureuses épanouies…
La première séparation a été lors du passage
en 6ème : dans 3 collèges différents.
Une autre séparation à l’entrée en 4ème
où il y a eu 4 collèges différents.
Nous avons toutes pris des chemins différents. A certains moments
il fut difficile de communiquer.
Aujourd’hui encore il peut être difficile de s’entendre pour certaines…
parce que nous nous sommes perdues de vue, parce que nos chemins s’éloignent…
La vie propose des choses que nous interprétons chacun à
notre manière…
La vie propose différents chemins…
Dans la vie il y a des bonnes choses et des moins bonnes mais toutes
nous enrichissent.
Je crois que la chose la plus difficile qui me soit arrivée jusqu’à
maintenant, en 26ans de vie, c’est l’évènement qui a provoqué
une grosse cassure dans notre groupe… envers Cl en particulier…
Elle habitait au début dans un village un peu plus éloigné.
Nous n’aimions pas son père : imbu de lui-même, macho…
et moi personnellement, j’étais mal à l’aise avec sa mère,
mais nous allions chez elle, nous nous amusions bien dans la ferme.
Nous savions que son père et sa mère ne s’entendaient
pas… les enfants ça comprend beaucoup de chose, même si
on ne leur dit rien…
Et puis sa mère est partie… elle est partie avec un menuisier
du village…
Elle est partie avec ses filles, partie dans une ville voisine... partie
juste avant l’entrée en 6ème.
Alors Cl nous a invitées… non, non pas toutes en même temps !
L’une après l’autre ! Il faut tout de même ménager
les parents !!
Nous faisions souvent du covoiturage, des services rendus entre grande
personnes pour faire manger, amener, ramener trimbaler les enfants…
Aussi lorsque Cl m’a invitée, mes parents se sont arrangés
avec le menuisier pour qu’il m’amène chez mon amie…
Dans son atelier, j’étais curieuse de tout, il m’expliquait,
me montrait, gentiment…
Il ne me quittait pas des yeux… certainement pour ne pas que je me blesse
avec les machines.
Il faisait des puzzles encastrables : des animaux, des arbres…
c’était beau, ça sentait bon le bois…
Au moment de partir, il a insisté pour que je me mette devant
et pas derrière. Même si je n’en avais pas le droit… j’ai
bien hésité, mais… moi, j’allais pas désobéir…
même devant tant d’insistance et devant ma grande envie de faire
comme les grands… bien que je fut une petite fille sage et soucieuse
du respect des lois, des règles, me voilà installée
sur le siège passager avant, ceinture bouclée, toute contente
d’être à cette place !
Nous commençons à rouler… à sa question, je réponds
que je ne connais pas la route…
Et c’est là que commence ma peur…
Il empreinte des toutes petites routes… son regard me paralyse…
Il commence à me caresser… la cuise gauche… puis le sein gauche…
Il roule très lentement, me caresse, sourit…
Son sourire et son regard me glacent…
Je sens que c’est pas normal, je sens que c’est grave…
J’ai peur…
Il me dit que si ça me dérange je dois lui dire…
Mais je ne peux pas…
J’ai peur…
Mais comment faire ??? C’est un adulte, autorité reconnue,
mes parents m’ont confiée à lui…
J’ai peur…
Et puis je ne sais pas ce qui se passe, ça me dépasse !!!!!!
Je ne comprends pas
J’ai peur
Je ne crie pas, je ne parle pas, je ne pleure pas…
J’ai peur….
Au bout d’un moment, qui me parait une éternité, il s’arrête…
nous sommes seuls, perdus au milieu de la cambrousse…
J’ai peur…
Il commence à se rapprocher de moi…
Il veut m’embrasser…
J’arrive à tourner la tête…
Il me propose d’aller dans le bois…
Ma panique est à son comble, l’anormalité, le danger,
plus forts que jamais…
J’arrive tout de même à balbutier un « non »
et j’ai la chance d’être entendue…
Je ne trouve
pas de mots pour décrire ce que j’ai pu ressentir…
Je le sens encore au fond de mes tripes…
J’étais choquée, paralysée, je me suis sentie prisonnière
de cette voiture, je ne pouvais même pas sortir tellement j’étais
paralysée, et puis … perdue au milieu de rien… j’aurais fais
quoi ??? Et puis… qui sait ce qu’il aurait pu me faire hors de
cet habitacle ???
Je sentais, comme il m’avait proposé de sortir, qu’il ne ferait
pas bon être hors de cette voiture avec lui…
Il m’a expliqué que c’était notre secret, que je ne devais
le dire à personne…
Je ne me rappelle pas ses mots exacts… je me rappelle que je ne devais
rien dire sinon ça irait mal pour moi…
Il a redémarré… il a continué la route, comme si
de rien n’était…
J’avais peur…
J’avais envie de fuir, de crier, mais je ne pouvais pas…
J’ai été soulagée de sortir de cette prison…
Et pourtant…
Nous sommes arrivés comme convenu chez des amis de la mère
de mon amie, qui avaient une piscine…
Il était aux anges : 3 petites filles en maillot de bain
à observer…
Et toujours ce sourire sur sa figure… ce sourire qui m’effraie…
Je voudrais le noyer…
Il est au bord de la piscine, ne nous quitte pas des yeux.
J’ai peur…
Je suis débordante de rage que je ne peux exprimer…
Je dois me taire, ne rien faire savoir…
Je l’éclabousse, j’y mets toute ma force, toute ma colère…
mais il ne bouge pas
Et il sourit toujours !!!
Ça m’enrage encore plus !!!!!
Je n’ai pas de mots assez forts… même la rage c’est faible..
Je découvre
ensuite la nouvelle maison de mon maie, ça me plait beaucoup…
sauf cet homme…
Ce sourire…
J’ai toujours peur…
Nous prenons ensemble le repas du soir.
Mon amie, sa sœur, sa mère semblent être heureuses avec
cet homme… cet horrible monstre…
Et encore et toujours ce sourire sur sa sale gueule…
Je ne me suis pas mise à côté de lui exprès,
mais il ne cesse de me regarder, de me sourire…
Cet horrible sourire. Je voudrais le taper, le mordre, lui cracher dessus !!!!!!!
Je voudrais crier que c’est un monstre, je voudrais le tuer…
Mais à quoi bon bouger… petit fille que je suis que pourrais-je
faire contre cet adulte ? Autorité reconnue ? Que pourrais-je
faire contre cette famille unie et heureuse ?
Je ne peux pas parler, je n’ai pas le droit de dénoncer…
Je ne veux pas non plus avouer cela à mon amie qui semble heureuse
près de lui…
Et puis surtout pas dire quoi que ce soit devant lui… qui sait ce qu’il
pourrait faire ???
Il me fait très peur, il me terrorise.
J’ai le sentiment qu’il pourrait me tuer s’il savait que je raconte
quelque chose…
Et je tiens à la vie moi…
Je tiens à revoir mes parents, ma sœur, mon frère… à
revenir dans ma maison si rassurante, protectrice…
Je n’ose même pas appeler mes parents pour leur dire de venir
me chercher : ça pourrait paraitre louche, je ne suis plus
un bébé, je ne peux raisonnablement pas prétexter
avoir peur, ou que mes parents me manquent… ça éveillerait
des soupçons…
Je ne peux donc rien faire, rien dire…
Colère, fureur, rage resteront là, au fond de moi… dans
tout mon être…
En fait je m’en sens envahie, mais je ne peux rien en montrer… il faut
faire semblant, cacher tout ça et faire bonne figure… faire la
copine heureuse d’être là…
Et se contenir, subir, jusqu’à demain…
Espérer, prier (même si je ne sais pas comment on fait)
pour qu’il ne fasse rien avant qu’on vienne me chercher…
Trouver de bonnes raisons, faire en sorte, s’arranger pour ne jamais
rester loin de mon amie, de sa sœur ou de sa mère…
Ouf ! il est temps d’aller dormir…
Au moins pendant la nuit… tout le monde dort…
Enfin…
Moi je dors… une lumière me réveille…
« Cl, éteint la lumière !!! »…
La lumière reste…
Alors j’ouvre les yeux… mon amie dort, elle dort profondément…
Et pourtant c’est éclairé !!!
Mais, HA ! Horreur !! il est là !!!!
Dans l’encadrement de la porte, avec une grosse lampe braquée
sur mes fesses… et toujours son sourire…
Mes petites fesses de préadolescente peu couvertes car il fait
chaud…
La colère remonte, la fureur est là…
Cl dort toujours…
Je me recouvre, me retourne…
Je boue de rage…
J’ai peur, je suis terrifiée…
Je pensais qu’il dormait, je pensais que je serais « tranquille
dans cette chambre avec mon amie…
Elle dort toujours, la lumière est toujours là…
J’ai peur, je me cache, je ne bouge plus..
Je voudrais disparaitre…
Je ne suis même pas soulagée quand il part…
J’ai peur qu’il revienne…
J’ai du mal à dormir… la nuit passe… lentement, mais elle passe…
Je rentre chez moi…
Je n’ai toujours pas le droit de dire quoi que ce soit, j’ai toujours
peur, je ne suis pas bien…
Oui ça se voit même si j’essaye de le cacher…
J’ai la nausée, je ne mange rien, j’ai mal…
Je suis malade, je vomi…
Je ne peux rien dire, j’ai trop peur…
Je tourne la chose dans tous les sens, je suis terrorisée, meurtrie,
blessée, douloureuse…
Je ne sais quoi faire de tout ça… je ne sais comment aller mieux…
Finalement, un soir, dans la salle de bain, je me confie à ma
sœur…
Lui faisant promettre de ne rien dire à personne…
Parce que j’ai peur des conséquences, des représailles…
J’imagine qu’il pourrait me tuer…
Mais j’ai confiance en ma sœur… il ne dira rien… il ne le saura pas…
et ça m’aidera peut être un peu ?
De toute façon je craque…
Je lui raconte, tout… je ne pense pas du tout à ce que ça
peut lui faire de se voir confier tout ça…
C’est ma grande sœur, la personne en qui j’ai le plus confiance…
Je suis en pleurs… je n’arrive pas à la regarder…
Je n’arrive pas à me défaire de ce que j’ai ressenti…
Je suis encore paralysée, terrorisée…
Mais la fureur, la colère, la rage sont partie…
Reste la peur, l’angoisse, la terreur…
Je dors mal, je suis toujours malade… mes parents s’inquiètent,
tout le monde s’inquiète…
Je n’ai que peu de souvenirs…
Je me souviens que j’étais vraiment malade…
Je me souviens de cet inconfort extrême…
Je me souviens de ce temps infini pendant lequel j’ai gardé ça…
Je me souviens d’être restée enfermée…
Je me souviens de cette terreur immense, envahissante…
Je me souviens de cet horrible sourire…
Je me souviens d’une nuit…
Une nuit où j’ai vomi même ce que je ne mangeais pas…
Une nuit où je me suis retrouvée assise sur le lit où
mes parents étaient…
Une nuit où je leur ai tout raconté…
Soulagée de pouvoir poser ça…
Mais la peur est toujours là…
Et oui que va-t-il se passer maintenant que j’ai dévoilé
mon secret ???
Je dis bien à mes parents qu’il m’était interdit de leur
raconter, de raconter ça à qui que ce soit…
Ils sont horrifiés, outrés…
Ils sont dépités… impuissants ??
Ils me disent qu’ils vont aller le voir…
Ça me terrifie… ils me garantissent que je ne crains plus rien…
Ils vont me protéger…
Je comprendrais plus tard qu’ils se sentent coupables…
Je ne sais plus comment tout ceci s’est passé après… ma
mémoire me fait défaut…
Ou bien je fais défaut à ma mémoire ??
Il y en a eu du temps…
Il y a eu ce jour où, lors d’un gouter ? D’un petit déjeuner ?
Mes parents m’ont annoncé qu’ils étaient allés
voir ce monstre…
Mon père était plutôt passif, même s’il a
grandement soutenu ma mère, il était plutôt effacé,
décontenancé… je ne trouve pas les mots adéquats…
Ma mère, très remontée, lui a dit ses quatre vérités
à ce montre…
Je me rappelle avoir été très fière d’elle,
très satisfaite de sa réaction forte et dynamique.
J’imagine que si elle avait pu, elle lui aurait tapé dessus…
cassé la gueule… je fantasme qu’elle aurait pu le tuer…
Quelques temps plus tard (je dirais au maximum un mois, mais ma mémoire
a perdu la notion du temps…) une plainte a été déposée
contre cet homme… en fait, mes copines avaient aussi eu des soucis avec
lui en allant chez Cl.
Il ne les avait pas touchées apparemment, mais il avait eu des
paroles, des regards mal placés… traumatisants…
Considérant que j’avais assez souffert mes parents n’ont pas
voulu que je témoigne…
Mon père l’a fait pour moi…
Considérant que ce n’étais pas si grave que ça
la justice n’a fait qu’une mince enquête et laissé courir…
Cela m’a bien outré… j’apprendrais bien plus tard que Cl et sa
sœur avaient menti pour le protéger… se protéger ???
Et la vie a poursuivi son chemin…
Je suis rentrée en 6ème… j’ai eu mes règles… ma
mère l’a annoncé fièrement à toute une assemblée
de copines à elle… je ne savais pas ce que c’était, j’avais
honte qu’on dévoile mon intimité… j’avais mal... toujours
très mal au ventre lorsque j’avais mes règles…
Je suis passée en 5ème… on me prenait encore pour un garçon…
Je n’étais pas du tout à l’aise avec la gente masculine,
je n’étais pas du tout à l’aise avec ma féminité,
je n’étais pas du tout à l’aise avec moi-même…
Je pensais que c’était l’adolescence… je me demandais combien
de temps ça allait durer…
Je me suis construite de façon assez particulière… mais
j’ai grandi… comme j’ai pu, mais j’ai grandi…
Pas très longtemps après, je me suis rappelée d’autres
choses précédentes, avec un autre monstre… j’ai longtemps
douté de ma mémoire… mais je sais maintenant que je n’ai
rien imaginé.
Cela n’a pas eu le même impact car j’étais beaucoup plus
petite et donc je me rendais bien moins compte de ce qui se passait,
je ne pensais pas ça grave…
C’était un secret, mais pas grave, et je pouvais arrêter,
fuir beaucoup plus facilement…
Je devais avoir tout juste 5 ou 6 ans mon père était assistant
maternel… il gardait un ado… cet ado m’a montré son sperme, m’a
léché le sexe pour le « nettoyer »…
a voulu prendre sa douche avec moi…
Toutes ces images, je lai ai comprises après… bien après…
ça m’a fait peur… d’autant plus peur que je pensais avoir imaginé
ce la… je me sentais donc « folle »…
J’ai mis longtemps avant de pouvoir en parler avec mes parents… j’en
ai parlé avec mon père… il m’a dit qu’il ne savait pas…
mais que c’était possible puisque il avait empêché
l’ado de prendre sa douche avec moi…
Aujourd’hui je me rends compte qu’elles m’ont moins traumatisé,
mais que ça a du accentuer les choses…
Aujourd’hui j’ai le sentiment de m’être enfermée pour pouvoir
vivre avec ça.
J’ai voulu cacher ça, faire comme si ça n’était
pas arrivé, mais ça n’est pas possible…
Je me suis construite enfermée, limitée…
J’étais une jeune fille sage, respectueuse des règles :
je n’ai jamais fais le mur, jamais désobéi vraiment à
mes parents…
J’avais trop peur… de quoi je ne sais pas vraiment… des gens ?
du monde ? de la société ?
J’étais bonne élève…
J’étais calme… peut être trop…
Bien du mal à m’intégrer, la risée de mes camarades
au collège…
Je me rappelle m’être sentie plus d’une fois une autre personne
que moi… bien loin de ma personnalité…
Je me rappelle avoir eu très souvent envie d’être, sans
pouvoir le faire… avoir encire de faire sans oser…
Je me rappelle avoir eu honte, avoir eu envie de passer dans les murs,
avoir eu envie de devenir invisible…
Là
je suis perdue… ça fait un bon moment que je n’ai pas écrit
car je ne sais pas dans quel ordre mettre les choses… parce que je suis
perdue…
Je ne sais plus par où commencer… enfin continuer…
Tout ça à cause de gestes absolument… inqualifiables d’un
homme sur une petite fille…
En fait je me suis renfermée, enfermée, pour me protéger…
je ne m’en rendais pas compte, je m’en suis aperçue très
tard… pendant très longtemps j’ai mis ça sur le dos de
l’adolescence…
Elle a certainement joué un rôle… mais… maintenant je sais
qu’il y avait autre chose…
Je me suis longtemps sentie coupable… sans le savoir… je ne lui en voulais
pas… enfin… je m’en suis prise à moi-même au lieu d’exprimer
ma colère… et encore aujourd’hui… … …
Je me suis longtemps sentie mal avec ma féminité… je me
suis souvent dis que si je n’avais pas été une fille…
Que je l’avais peut être provoqué de part ma féminité,
mes formes à peine naissantes…
Maintenant je sais que ce n’est pas de ma faute… raisonnablement je
sais… mais il est encore difficile de se débarrasser d’idées
avec lesquelles on a grandi…
En écrivant ces mots aujourd’hui, je m’aperçois que tout
est encore bien présent dans mon corps… trop présent…
Je retiens, de garde, je n’exprime pas assez… du coup je somatise…
On m’a longtemps prise pour un garçon… ça ne me plaisait
pas biensur… mais je ne faisais pas grand-chose pour paraitre plus féminine…
Je ne savais pas, tout vêtement en tantinet peu moulant ou décolleté
ou montrant mes jambes me paraissait vulgaire… pas sur les autres, mais
sur moi-même c’était impensable. Encore aujourd’hui il
est des circonstances dans lesquelles certains vêtements me mettent
mal à l’aise… …
Au travail notamment… oui, je travaille en psychiatrie adulte, je suis
jeune…
Mais je pense que ça n’a pas grand-chose à voir avec les
habits…
Je veux dire que je suis mal à l’aise avec les patients. Hommes
surtout, mais aussi avec les patientes qui abordent un sujet délicat
pour moi, genre sexualité…
Je veux dire que même avec de habits très conformistes,
qui ne dévoilent rien, je me sens mal à l’aise…
Pas que avec les patients…
M’enfin je dois objectivement dire que ça va mieux aujourd’hui.
Il n’y a aucun doute là-dessus
Il faut que je positive !!!!
Ah oui, positiver, me satisfaire de ce que je fais… c’est compliqué…
Je pense que me sentant coupable, j’ai tout mis en œuvre pour toujours
faire bien, mieux, chercher la perfection…
J’ai toujours voulu que mes parents, surtout mon père, soient
fiers de moi…
Mais je me suis enfermée dans un système où je
n’étais jamais satisfaite…
Ah… les paroles des parents aussi… où mon père me disait
toujours que je pouvais mieux faire…
Jamais satisfaite et donc incapable…
Et encore plus incapable question rencontres amoureuses..
Imaginez bien que j’en rêvais… mais que j’ai mis bien du temps
à « oser » sauter le pas…
L’année de mes 20ans, je me suis dit qu’il n’était plus
possible que je reste vierge, inexpérimentée…
J’ai décidé qu’avant la fin de l’année je devrais
avoir fait l’amour au moins une fois…
Lorsque j’ai fêté mon anniversaire avec les copines, en
boite, j’avais bien bu, ce qui m’a aidé à me dévergondé
un peu, mais je savais encore ce que je disais…
Une amie m’a fait faire le tour de la boite en criant partout et à
tout le monde que j’avais 20ans !!!
Nous sommes tombées sur 2 noirs… chacune de nous a été
entrainée par l’un deux.
Celui qui m’a entrainée n’était pas celui qui me plaisait
le plus, mais ne me suis vite aperçue qu’en réalité
il était plus sympa…
Il était grand, costaud, rentre dedans mais respectueux… il me
reste un souvenir de délicatesse…
Là le hasard a fait que j’ai deviné qu’il venait du Cameroun…
Là… je me suis dit que c’était lui qui allait prendre
ma virginité…
Nous avons échangé nos numéros, nous avons beaucoup
discutés cette nuit là…
Ça
me rappelle la nuit après mon premier baiser… je n’avais pas
dormi de la nuit tellement j’étais excitée… il était
beau, noir… et pourtant en y réfléchissant je pense que
ma sœur avait du en partie orchestrer cela…
Il faudra que je lui demande…
Cela n’avait pas duré bien longtemps…
Après j’étais sortie avec un gars qui avait une tête
de moustique, il ne me plaisait pas, mais moi je lui plaisais et c’était
flatteur de plaire, de faire fondre…
Et puis un autre inaccessible… un gars dont j’ai été longtemps
amoureuse… je pense que je ne lui était pas indifférente,
mais il faisait ses études en Norvège… il a donc préféré
ne pas entretenir la relation…
Ah ! Les inaccessible… je ne pouvais que difficilement « sauter
le pas », même pour les baisers, puisque j’étais
moi la fille renfermée, cachée, timide, toujours attirée
par les garçons les plus « beaux », les
plus populaires… donc inaccessibles !!!
Maintenant je suis certaine que ces gars étaient populaires,
mais peu intéressants…
Mais revenons
à mes 20ans… la second fois où nous nous sommes vus j’avais
décidé que ça serait « le grand soir ».
Après avoir passé un peu de temps dans une fête
de village, avoir ramené une copine chez elle… nous avons commencé…
il était doux de recevoir des caresses… des sensations inconnues
pour moi… très agréables… puis le grand moment arrivant,
je suis très déçue… je me dis : »
merde si c’est ça faire l’amour c’est nul »… puis
il me regarde… me demande si je suis vierge… « oui »
timide, rougissante… puis il me dit que j’aurais du lui dire avant,
qu’il aurait pu me faire mal… et qu’il est désolé, qu’il
n’y arrive pas…
Déçue et culpabilisante… je me dis que il n’y arrive pas
car c’est moi, je lui fais pas envie, je suis vierge à mon âge…
Je dois vraiment avoir l’air très sérieuse car ce n’est
pas ce soir là qu’il m’a demandé pourquoi une fille si
belle, si charmante que moi était encore vierge…
Nous nous sommes vite, très vite, revus… ce qui m’a rassurée
un peu…
Et cette fois les sensations étaient au rendez-vous. A tel point,
et il m’a demandé cela plusieurs fois, que lorsque l’on a eu
fini, que je me suis recoiffée, il m’a demandé si c’était
bien moi la même C.
Il m’a dit que ce n’était pas possible que je sois vierge parce
que j’étais douée… et pourtant… ce doit être inné !!!
Ce fut mon premier amour… mais l’histoire a été complexe…
Je me suis aperçus bien plus tard que j’entretenais des histoires
avec des gars distants, des histoires qui n’aboutissaient sur rien…
Des histoires que j’imaginais mais n’étaient pas réellement
comme je le voulais… où j’étais en permanence dans l’attente…
En fait j’attirai les hommes qui ne voulaient pas s’engager… et quelque
part ça m’arrangeait !!!
J’ai pris conscience de ça… et bien d’autres choses…
Et j’ai rencontré A.
A avec qui c’est simple, c’est beau, c’est agréable…
Au départ je n’y croyais pas, je me posais beaucoup de questions
et en fait il suffit de profiter !!!
Voilà
quelques temps que je n’ai pas écris…
Quelques temps de vacances pendant lesquelles j’ai présenté
A à ma famille… qui se sont bien passées… très
bien même !!!
Maintenant je réalise que je grandi, que je peux faire ma vie
à moi…
Relisant quelques passages, je vois que certains sont au présent,
d’autres au passé… je ne vais pas modifier cela… j’ai écris,
j’ai posé, déposé toute cette histoire… une petite
partie de mon histoire… de ma vie…
Ça m’a fait du bien…
J’ai pu aussi en parler avec A et il a été très
compréhensif, attentif… ça m’a beaucoup aidé aussi.
J’ai encore du chemin à faire, mais j’ai déjà bien
avancé et j’en suis fière !
Je ne voudrais pas que cette histoire gâche ma vie, d’où
cette démarche d’écriture, de thérapie…
Je crois que je voudrais bien que mon histoire soit lue… et qu’elle
ne paraisse pas comme dramatique.
Qu’elle montre que c’est dur, mais qu’on peut profiter de la vie malgré
tout… qu’on peut être heureux…
C’est peut être avant tout pour moi-même que j’écris
ces mots là… mais ça c’est une autre histoire je crois !!!
Bonjour,
Merci, pour ce "beau" témoignage qui parle de résilience,
laquelle "n'est pas une recette miracle" ni une simple capacité
à s'épanouir malgré le trauma (voir l'excellent
livre sous la direction de Joyce Aïn "Résiliences:
réparation, élaboration ou création?"
chez Erès.
Il faut noter l'étayage "performant" de vos parents
(votre mère surtout) et le fait que votre parole a été
entendue, sans aucun doute, reconnue.
La souffrance, la maltraitance, peut anéantir les êtres
mais peut aussi devenir un ressort qui pousse certaines personnes à
se développer ; tout dépend cependant des liens initiaux
d'attachement qui ont pu être tissés avec l'entourage,
les proches, notamment les parents et qui constituent une grande part
de notre "personnalité".
Nous publierons avec plaisir votre histoire.
Je suppose que ce mail est anonyme et peut donc être inscrit sur
la publication ? Cordialement,
Chantal POIGNANT
Conseil
Bonjour,
merci de votre réponse si rapide.
je suis heureuse que mon témoignage puisse être publié.
le travail que j'effectue en ce moment sera il me semble ainsi plus
complet...
mes réticences, mes résistance commencent à fondre,
et mon corps à se réparer: j'ai déclencher un diabète
et une hypothyroidie tous deux autoimmuns... et comme tout commence
à rentrer dans l'ordre, il me semble que tourner les pages du
passé consolidera cette progression, cette avancée vers
le bien être!
merci encore, merci pour la référence bibliographique.
bonne fin de journée à vous
confidence
ps: oui cet email est anonyme... il peut être publié sans
soucis
confidence@lavache.com
Bonjour,
Et ainsi, vous pourrez renseigner certaines personnes, qui je crois,
pourraient vous contacter sur le processus de réparation que
vous avez mis en oeuvre.
Merci de votre participation.
Cordialement,
Chantal POIGNANT
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