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Le parcours du combattant Email
en pied de message _Bonjour,_ Je vous ai contactée pour la 1^ère fois le 10 juillet 2009 pour connaître l’adresse d’un psy spécialisé en traumatologie car je venais de découvrir les articles de Muriel Salmona « abus sexuels et situations paradoxales de dépendance à l’agresseur ». Depuis début 2007, je passais des heures et des heures à chercher sur Internet pourquoi je n’arrivais pas à tourner la page, pourquoi j’étais si mal au point d’envisager l’irréparable. J’avais demandé à mon médecin une adresse psy pour régler un problème relationnel, il m’avait proposé le CMP mais j’avais peur qu’ils puissent l’identifier. J’avais alors demandé l’adresse d’un psy dans la ville voisine mais il n’avait personne à me recommander. C’est en saisissant le mot « viol » que fin août 2007 j’ai découvert votre site. Je n’avais, jusqu’alors, jamais pensé à utiliser le terme « abus sexuel » dans mes recherches. Dès les 1ères lignes j’ai cru lire mon histoire, c’était ce que j’avais vécu dans le cabinet d’un kiné et que je refusais d’admettre depuis plus d’un an. Je ne pouvais plus attendre, malgré ma honte, j’ai imploré mon médecin de me diriger immédiatement vers un psy. Comme je ne voulais pas que mon mari l’apprenne, j’ai alors accepté le CMP de ma ville. Je pensais naïvement que puisque j’avais cerné le problème, j’allais enfin pouvoir arrêter de culpabiliser et me reconstruire. Mais ce n’était que le début d’une longue période de remise en question. Tous me poussaient à le dénoncer mais je passais mon temps à lui trouver des excuses. Je ne voulais pas croire le psy qui le décrivait comme un pervers. Je n’avais rien cherché mais je l’avais laissé faire et j’y avais même pris du plaisir, j’étais donc responsable de ce qui m’était arrivé. De plus, au lieu de fuir, j’y étais retournée, j’éprouvais de la compassion pour lui, je pensais que je pouvais l’aider. Pour le psy, mon comportement n’était pas celui d’une adulte mais d’une gamine de 10 ans. Mon ego en a pris un coup, mais je voulais comprendre comment j’avais pu en arriver là, j’étais prête à tout entendre. J’ai souvent eu l’impression de me ridiculiser, d’être plus nulle que la moyenne. Je n’arrivais pas à l’accuser, ni à lâcher prise. C’était une obsession, je ressassais sans cesse les différentes étapes. Il fallait que j’arrête de le défendre, de me détruire. Début 2008, j’ai décidé de dénoncer ses agissements à son confrère, ce dernier a proposé de servir de médiateur. Alors qu’il n’avait pas réagi à mes précédents courriers, il a enfin accepté de m’écouter et j’ai demandé à le rencontrer. Je leur ai donné une copie de votre dossier « abus sexuel » pour expliquer ma démarche. Au fond de moi, j’espérais encore que tous se trompaient. Je voulais croire que c’était parce que j’avais, par la suite, adopté un comportement provocateur qu’il avait été déstabilisé. Mais il a reconnu avoir juste fantasmé sur mes fesses et s’être amusé à remonter entre mes jambes, n’avoir pensé qu’à lui, n’avoir jamais envisagé de relation avec moi. Il ne comprenait pas où était le problème, pour lui, j’étais consentante. Je refusais d’admettre les faits. Comment avais-je pu me tromper à ce point là, à mon âge, avec mon expérience ? J’ai raconté à mon psy que j’avais osé le rencontrer, il s’est moqué de moi. Il m’a reproché de m’être mise à nue devant lui, m’a assuré qu’il avait dû prendre plaisir à me voir souffrir. Je ne voulais pas l’entendre. Je n’en ai plus reparlé, je ne lui ai jamais avoué que je l’avais revu. J’étais venue pour régler mes comptes mais il ne cherchait ni à se défendre, ni à m’accuser. Je le retrouvais comme je l’avais imaginé fragile, timide, j’éprouvais toujours de la compassion pour lui. Je voulais lui pardonner mais il ne semblait pas comprendre l’impact psychologique d’un tel jeu. Il exprimait des regrets pour ce qu’il avait fait mais aucun remords pour le mal qu’il m’avait fait. A notre 3^ème rencontre, je n’ai pas supporté son manque d’empathie, son indifférence face à ma détresse, nous nous sommes quittés froidement, il n’a plus voulu me revoir. J’ai essayé de me raisonner mais je n’arrivais toujours pas à en parler sans pleurer, je n’arrivais toujours pas à l’accuser. La psychiatre du CMP m’a alors demandé si je ne prenais pas un certain plaisir à me positionner en victime. Cela a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, même les psys ne pouvaient pas me comprendre, j’ai alors décidé de me débrouiller seule. J’ai lu et relu vos articles, je l’avais vécu comme un abus sexuel mais je refusais toujours d’admettre qu’il avait sciemment profité de sa position dominante. Je ne pouvais plus continuer à fuir la réalité. En août 2008, j’ai enfin téléphoné au n° vert « S.O.S VICTIMES » qui m’a orienté vers une association d’aide aux victimes. Je pensais jusqu’alors qu’il fallait porter plainte pour être aidée. Pourquoi mon médecin ne l’avait-il pas proposé ? J’avais besoin d’un autre avis, je m’y suis rendue 4 ou 5 fois, la psy était sensibilisée à ce genre de problème, elle comprenait ma détresse, que j’y sois retournée. Elle ne m’a pas jugée et m’a rassurée, mes réactions n’étaient pas anormales. Elle m’a conforté dans ma décision de le dénoncer. Mais elle ne comprenait pas que je n’arrive pas à retourner ma colère contre lui, que je continue à lui trouver des excuses. Je voulais le dissuader de recommencer mais je ne voulais ni ruiner sa carrière, ni monnayer ma détresse, ni étaler ma vie en public. J’ai alors envisagé de porter plainte à l’ordre des kinés, mais personne ne connaissait leurs procédures. Début janvier 2009, j’ai avoué à mon mari ce qui m’était arrivé, j’avais enfin décidé de porter plainte. Il ne m’a pas soutenu, pour lui, j’avais laissé faire, j’étais donc consentante. Il ne voulait pas en entendre parler. Je ne savais pas si j’aurais le courage et la force d’aller jusqu’au bout de la procédure. Je voulais montrer que je progressais mais j’avais toujours besoin d’aide aussi, je n’ai pas compris quand la psy m’a dit que ce n’était plus la peine de revenir que je pouvais me débrouiller seule. Dès le départ, j’ai bien stipulé que je ne voulais pas de ses excuses, que c’était trop tard. Je voulais juste que la profession prenne position pour éviter que cela ne se reproduise avec d’autres, je savais qu’il y en avait au moins une autre. Il a reconnu être l’initiateur de gestes sexuels à mon égard mais a argué que j’étais consentante, que j’avais réclamé à plusieurs reprises. J’ai n’ai jamais nié avoir réclamé à deux reprises, mais c’était plus tard, par provocation, parce que je ne voulais pas qu’il soit le seul à décider. J’ai réaffirmé que je n’avais rien cherché, qu’il avait joué avec mon corps, contre mon gré, sous couvert d’actes thérapeutiques, qu’il s’était servi. J’y étais ensuite retournée parce que je n’ai jamais pu admettre qu’il avait trahi ma confiance, je croyais qu’il m’appréciait et me respectait. Mais le seul but de la commission de conciliation était la signature du P.V pour que cela n’aille pas plus loin. On m’a reproché de ne pas croire en la sincérité de ses excuses, je me suis sentie acculée. Il m’était viscéralement impossible de signer, c’était me renier une nouvelle fois. Alors qu’elle avait condamné son comportement contraire au code de déontologie, la commission a, contre toute attente, soutenu son mémoire en défense. J’aurais porté plainte parce qu’il avait mis fin, contre mon gré, à cette relation ambiguë allant même jusqu’à m’accuser d’être l’initiatrice de ses massages sexuels. Devant autant d’absurdité et d’incompétence, j’ai pensé, plusieurs fois, abandonner. Même les deux amies qui me soutenaient dans ma démarche étaient scandalisées par la tournure des événements. J’étais seule contre tous, mais si pour lui cela faisait 3 ans et c’était déjà loin, pour moi c’était hier. J’avais tout retranscrit pendant des heures pour tenter de tourner la page. J’ai pu contredire sa version des faits en les reclassant dans l’ordre chronologique et en donnant des dates précises. Il s’est étonné de ma mémoire mais n’a pas contesté ma version. Je savais que j’étais dans mon bon droit mais je me sentais, malgré tout, toujours coupable d’y être retournée. Je pensais être quelqu’un de sensé, je n’arrivais pas à trouver d’explication rationnelle. Depuis le début, je tenais le coup grâce à une sévère addiction au sport, c’était mon adrénaline, ma façon de lutter pour essayer de ne plus y penser. J’ai toujours refusé les médicaments, je savais que c’était trop tentant. En juin 2009, c’est en lisant l’article de Muriel Salmona que j’ai enfin pu comprendre tous les mécanismes que j’avais mis en place. J’avais cru sombrer dans la folie face à l’incompréhension et à une certaine exaspération de la part de professionnels sensés m’aider. Je me sentais si impuissante à régler mon problème que j’avais même envisagé l’éventualité d’un internement. Quand vous m’avez répondu que j’avais dû subir un viol psychologique, vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela m’a soulagé, enfin quelqu’un comprenait ce que j’avais ressenti et que je n’arrivais pas à formuler. Je n’étais donc pas devenue folle. La 1ère chambre disciplinaire a désigné un rapporteur (kiné formé psycho), j’ai été convoquée. J’ai enfin eu l’impression d’être écoutée et entendue par quelqu’un de compétent dans ce domaine. J’ai même envisagé de retirer ma plainte sous certaines conditions puisque mon but semblait atteint. Mais il n’a pas respecté ses engagements et pendant 3 mois, je n’ai plus eu aucunes nouvelles. Je doutais de plus en plus de la partialité de telles instances. J’arrivais au bout du délai de prescription de 3 ans, j’ai paniqué. Je vous ai contacté à nouveau, vous m’avez donné le n° d’une association, je les ai appelé 2 ou 3 fois, ils m’ont aussi conseillé de porter plainte en pénal mais j’habitais beaucoup trop loin. J’ai longuement réfléchi, je me suis même renseignée auprès d’un avocat. J’avais ses aveux écrits mais cela me rendait malade d’en arriver là, de tout recommencer. Je savais aussi que mon mari ne l’aurait pas accepté, je n’ai pas pu franchir le pas. C’est ma colère contre l’ordre des kinés qui a décuplé ma volonté d’aller jusqu’au bout de ma démarche. Pour bien monter mon implication, j’ai décidé, malgré ma peur, d’assister à l’audience, j’ai demandé à une amie de m’accompagner. J’étais tétanisée, au bord des larmes et je n’ai pas pu le regarder en face. Quand on m’a donné la parole, j’ai préféré qu’ils me posent leurs questions. Je n’ai pas fait l’impasse, contrairement aux conseils de la psy, sur celles concernant le fait que j’y sois retournée. Le juge ne partageait apparemment pas le point de vue des psys qui poussent les victimes à porter plainte. Je lui ai alors donné en partie raison car lorsque j’avais enfin décidé de porter plainte, j’avais découvert, à ma grande stupeur, qu’ils ne pouvaient pas m’aider et se retranchaient derrière le secret médical. Le juge m’a alors demandé ce que voulait dire la phrase « /Violences sexuelles et situations paradoxales de dépendance à l’agresseur liées à la mémoire traumatique, la dissociation et aux conduites dissociantes » /car lui ne la comprenait pas. Je lui ai répondu de façon évidente que pour moi c’était clair, que lorsqu’on était passé par là, on savait ce que cela voulait dire ; il n’a pas insisté. Considérant que le kiné ne contestait pas avoir pris l’initiative de gestes intimes à mon égard, que de tels attouchements, même s’ils s’étaient poursuivis avec mon consentement, étaient incompatibles avec l’exercice de la masso-kinésithérapie et constituait un manquement au principe de moralité édictés par le code de déontologie ; il a été sanctionné par un blâme. Une copie du P.V d’audience a été transmise à différents organismes ainsi qu’au procureur de la république, personne n’a fait appel de la décision. Je n’ai pas retrouvé l’intégralité des arguments développés dans mes différents mémoires mais je n’ai pas, non plus, fait appel. J’avais osé aller jusqu’au bout de ma démarche, mon but était atteint, ils avaient enfin pris position et condamné ses agissements. Par contre, je n’exclus pas de faire remonter les dysfonctionnements et maladresses que j’ai pu constater dans le traitement de mon dossier. Je pensais naïvement que les mentalités évoluaient, qu’en le dénonçant, quelqu’un allait bouger. Mais force est de constater que dans le domaine, c’est la loi du silence qui règne en maître. Ils préfèrent dissuader la victime de poursuivre sa plainte plutôt qu’avoir à juger un confrère. J’ai gagné une bataille mais pas la guerre. Toutes mes croyances, toutes mes certitudes ont été ébranlés par ce « jeu » sexuel que je n’avais pas souhaité. Je suis loin d’être naïve mais sûrement trop respectueuse de l‘ordre et de l’autorité. Dans d’autres circonstances j’aurais osé parler, je me serais défendue, je ne me serais jamais laissée humilier à ce point. J’ai cherché vainement des articles et des témoignages similaires à ce que j’avais vécu mais les sites « abus sexuel ou agressions sexuelles » sont toujours associés à « mineurs ». Pour les adultes je n’ai trouvé que des articles concernant le harcèlement sexuel au travail. Dernièrement j’ai lu quelques articles de journaux concernant des plaintes en pénal contre des kiné ou psys. Aujourd’hui, je m’étonne, pourquoi n’y a-t-il pas de dossiers traitant des adultes victimes d’abus sexuel dans le cadre thérapeutique, est-ce un sujet tabou? Il existe des campagnes de sensibilisation sur les violences faites aux femmes, le harcèlement sexuel au travail, on commence à parler des violences psychologiques au sein du couple. A quand une campagne sur les agressions sexuelles faites sans violence sous couvert d’actes thérapeutiques? Témoignage
: J’ai 50
ans, je suis mariée, je n’avais jamais fait un écart et
pourtant je me suis laissée piéger. Je croyais que j’avais
une relation privilégiée, que mon kiné m’appréciait
et me respectait, je lui faisais confiance. Mon unique but était
ma guérison rapide. Je restais souvent seule pendant mon immobilité
forcée, je trouvais le temps long. Les séances de rééducation
étaient ma seule sortie. J’appréciais qu’il soit aux petits
soins pour moi mais je savais que j’étais vulnérable et
je ne voulais pas d’ambiguïtés dans la relation. J’ai toujours
gardé mes distances, nous nous sommes toujours vouvoyés.
Mais au fil du temps, ses massages sur ma jambe, en fin de séance,
quand j’étais à plat ventre, me mettaient de plus en plus
mal à l’aise. Ils restaient pourtant dans les limites thérapeutiques.
J’ai alors tenté à plusieurs reprises d’éviter
ses massages qui me perturbaient mais il m’a assuré qu’il faisait
pour le mieux, qu’il connaissait son métier. Bonjour, Re bonjour, J'apprécie
toujours autant la pertinence de vos commentaires, j'aurais sûrement
dû vous contacter plus tôt, mais je n'ai jamais pris plaisir
à être victime, bien au contraire. Il fallait réellement
que je touche le fond pour demander de l'aide. Contrairement à
ce qui m'a été reproché, cela n'a jamais été
par orgueil que je refusais d'admettre les faits mais parce que cela
m'était tout simplement insupportable. Cordialement |