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Je fais un travail psy pour essayer d'éclairer un passé un peu trouble

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Juin 2011


Bonjour,
Je suis divorcée depuis 6 ans, et depuis 6 ans, je fais un travail psy pour essayer d'éclairer un passé un peu trouble et lacunaire. Depuis 6 ans, je suis considérablement aidée par mon médecin généraliste et deux psychologues avec lesquelles j'ai fait des séances d'hypnoses et d'EMDR pour retrouver la mémoire. Je suis désormais intimement convaincue que j'ai subi dans mon enfance un (plusieurs ?) viol(s) (agressions, abus sexuels ?). Mon combat maintenant n'est plus de retrouver les faits précis mais de faire taire tous les processus de protection, de défense mis en place de façon complètement inconsciente pendant presque 30 ans.
J'ai fait un long chemin, compris beaucoup de choses, mon regard sur les hommes et sur moi a changé, malheureusement mon comportement lui ne change pas. Mon corps a peur, en permanence, même si ma tête lui dit qu'il peut être en confiance et se laisser aller. Mon corps refuse d'être approché, regardé, touché, aimé ... Je voudrais changer, je voudrais que mon corps s'apaise, qu'il s'allège aussi (parce que je suis intimement convaincue que ces quelques kilos en trop impossibles à perdre ne sont là que pour faire fuir), je voudrais être aimée, je voudrais pouvoir me laisser aimer. Je me demandais alors s'il existait des thérapies, des hôpitaux spécialisés où je pourrais par exemple réapprendre le contact, le regard, où je pourrais également partager mon vécu, mon ressenti, me sentir un peu moins seule aussi, me dire que tout ce que je traverse, ressens est ressenti par d'autres.
Je ne vois pas l'issue ... 6 ans c'est long et je me sens à bout, sans espoir. Je n'ai plus l'impression d'avancer, je ne sais plus quoi faire pour avancer.
Je vous remercie de m'avoir lue et n'ose espérer une réponse.
E.

Bonjour,
Votre message méritait, de toutes façons, une réponse. Ne serait-ce que pour le témoignage inestimable que vous nous envoyez.
Je tiens à appuyer la clarté de votre récit, le choix de vos mots, qui nous rendent votre ressenti tellement proche et vrai : ce que vous écrivez reproduit fidèlement un parcours authentique où les blessures du corps et de l'âme sont liées.
Six ans, c'est à la fois long et peu, si ce que vous suspectez est avéré :
* http://www.sosfemmes.com/violences/viol_consequences.htm
Je vous encourage à vous orienter vers ce site, où sans doute, vous trouverez nombre d'indications (nous connaissons M.Salmona) :
* Mémoire traumatique et victimologie
Site de l'association Mémoire Traumatique et Victimologie, créée en 2009 et présidée par le Dr Muriel SALMONA, spécialiste des psychotraumatismes dus aux violences. Mémoire Traumatique et Victimologie est une association de formation, d'information et de recherche sur les conséquences psychotraumatiques des violences. Elle a pour but d'améliorer l'identification, la protection et la prise en charge des victimes de violences par une meilleure information du public et par la formation des professionnels impliqués, d'améliorer leur orientation et leur accès à des soins spécialisés de qualité, et aussi d'améliorer la connaissance et compréhension des conséquences des violences, dans l'optique de lutter contre toutes les violences et d'améliorer leur prévention.
http://memoiretraumatique.org/
Par ailleurs, sachez que la méthode Ericksonienne pourrait peut-être vous aider. Mais parlez en aux professionnels qui vous suivent, et ne consultez qu'après avoir vérifié l'appartenance du thérapeute Ericksonien à une liste d'aptitude.
Peut-être accepteriez vous d'être publiée dans notre espace échanges afin d'obtenir des contacts?
Cordialement,
Chantal POIGNANT
Agent de conseil

Bonjour,
Je vous remercie très sincèrement pour votre réponse rapide et encourageante. Ca fait du bien de savoir qu'il y a derrière cet écran une personne qui entend, qui écoute et qui comprend. Ca me fait énormément de bien également de savoir que 6 ans c'est peu pour guérir d'un passé douloureux alors que moi je m'en veux de plus en plus de n'être pas capable d'en sortir plus vite.
Je suis retournée lire cette page que vous m'aviez conseillée http://www.sosfemmes.com/violences/viol_consequences.htm. Je l'avais pourtant déjà lue plusieurs fois, il y a de cela pas mal de temps, notamment au moment où je n'arrivais pas à croire que l'on puisse rayer de sa mémoire des événements traumatisants. Aujourd'hui les mots de cette page ont une autre résonnance, ils me parlent encore davantage et m'aident à accepter mon statut de victime, ils m'aident à prendre conscience de la gravité de ce que j'ai vécu, des conséquences et me donnent envie de prendre le temps. J'ai besoin d'être reconnue comme victime je crois ... Je hais ce mot.
Je suis entièrement d'accord pour que vous communiquiez mon adresse mail pinael@hotmail.fr , notamment parce que je me souviens avoir passé des heures (en vain !) pour trouver des témoignages de personnes n'ayant gardé comme unique souvenir d'une agression que ceux gravés dans le corps, ceux qui ne laissent aucune image, aucun visage, aucun lieu mais qui ne laissent également aucun doute. Alors si mon témoignage, mon expérience peut aider ... Et peut-être les témoignages d'autres pourront-ils m'aider moi aussi à passer ce cap qui semble pour l'heure infranchissable.  
Je vous remercie encore pour ce temps que vous nous consacrez à tous.
E.
pinael@hotmail.fr

Bonjour et merci infiniment pour votre participation.

Le mot "victime" peut en effet être "haïssable" puisqu'il met en évidence l'impuissance de la personne qui subit et donc une impossibilité de contrôle sur son propre "être".
Le mot "victime" vient du latin "victima" qui définit une créature vivante offerte en sacrifice aux dieux (cité par E.Josse in "victime, une épopée conceptuelle" 2006) et d'autres parts, ce terme laisse parfois supposer l'obtention de bénéfices secondaires, symboliques ou non, qui viendraient en réparation de la fragilité...
Et la compassion, qu'une victime peut susciter, peut être différemment appréciée.
C'est la raison pour laquelle cette dénomination, me semble-t'il, revêt peut-être une certaine ambivalence.
A mon avis, ce qui caractérise une "victime" c'est  qu'elle a été frappée d'impuissance, ce qui ne veut pas dire que la victime est "faible" intrinsèquement. Mais force est de constater que, par exemple, un enfant n'aura pas les capacités pour réagir face à un adulte...
Le plus difficile parfois est d'admettre son impuissance.
Cordialement,
Chantal POIGNANT

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