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Message ou FAQ

 


Je ne sais plus trop où j'en suis aujourd'hui

Décembre 2011


Bonjour,
Je vous envoie ce message car je ne sais plus trop ou j’en suis aujourd’hui. Pour précision, j’ai 43 ans, 3 enfants (de 20, 18 et 13 ans) et je suis séparée du père de mes enfants. Je refais ma vie avec un homme depuis 2 ans mais nous ne vivons pas ensemble.  Je suis conseillère en insertion professionnelle au sein d’une association (je passe mes journées à assister des personnes en difficultés).  J’ai été élevée seule avec ma mère puisqu’elle a décidé de se séparer de mon père durant sa grossesse. Je n’ai ni frère, ni sœur. A l’âge de 17 ans, j’ai souhaité parler à mon père que je ne connaissais pas et qui a toujours vécu dans la même ville que moi, sans jamais venir me voir. La rencontre s’est mal passée, il m’a rejeté.  A l’âge de 10 et 11 ans, j’ai été victime d’abus sexuel, sans me souvenir exactement de la durée exacte des faits. Il s’agissait du cousin de ma mère. Je ne me souviens pas non plus de tous les actes commis sur ma personne, mais je sais qu’il y a eu des attouchements, fellation et surement pénétration puisque lors de mon 1er rapport sexuel consenti à 16 ans, je n’étais plus vierge (sans comprendre le pourquoi à ce moment là, puisque j’ai été dans le déni des abus durant de nombreuses années). Ma famille n’est pas au courant de ce qu’il s’est passé, je n’ai jamais eu le courage de parler, il n’y a jamais eu de plainte. Vers l’âge de 18 ans, j’ai eu quelques hallucinations lorsque des garçons s’intéressaient d’un peu trop près à ma personne (leurs visages se transformaient en monstre en quelques secondes dès qu’ils cherchaient à toucher mon corps, sans comprendre ce qu’il m’arrivait à ce moment là puisque j’étais encore dans le déni). Ces hallucinations ont duré quelques mois et ont cessé toutes seules.  Durant toute ma période d’adolescence (de 14 ans à 20 ans), j’ai pris des drogues, je buvais et je ne parvenais plus à être assidue au lycée ce qui m’a valu plusieurs renvois d’établissements.  A 19 ans, j’ai rencontré un homme qui avait le double de mon âge. Je pense avoir fait un transfert avec lui en le prenant pour un pseudo père. C’est avec lui que j’ai eu 3 enfants. Nous avons vécu ensemble durant 18 années, durant lesquelles il m’a maltraité psychologiquement et sexuellement. Il a également été violent avec notre fille qui a été placée durant quelques mois en foyer d’hébergement. J’étais dépendante affectivement de lui, et j’acceptais l’inacceptable. Je me suis séparée de lui, avec la peur au ventre et des menaces de sa part de défiguration, menace de mort sur nos enfants.  Quelques mois plus tard, j’ai repris contact avec un homme que j’avais aimé passionnément, également à l’âge de 19 ans. (Je l’avais rencontré en vacances et ça avait été le coup de foudre, j’avais momentanément quitté le futur père de mes enfants avant de revenir vers lui, le manque du père était trop important). Maintenant, cela fait 2 ans que nous sommes à nouveau en couple.  Mon problème est que je me rends compte que je suis à nouveau en train de tomber dans un schéma affectif particulier. Cet homme et moi nous nous aimons à nouveau, je vis une très belle histoire d’amour. Cependant, il a lui aussi une conception très particulière du sexe et cherche à me convaincre d’avoir des pratiques qui à la base, ne me correspondent pas. Pour être précise, il veut faire du « triolisme », c’est-à-dire des pratiques à trois (deux hommes et moi-même). Il me dit que c’est dans le respect, par amour et pour mon plaisir qu’il souhaite cela (et là, j’ai des doutes sur la sincérité de son amour). Le problème, c’est que je le laisse croire que cela me convient, m’excite. Malheureusement, je suis prête à céder à sa demande, juste pour ne pas le décevoir, ne pas le perdre, par dépendance affective. Je me mets dans des situations avilissantes, et c’est moi qui provoque ces situations, puisque je les encourage sans en avoir particulièrement envie…  Comment trouver le courage ou suffisamment de confiance en moi pour refuser des choses qui ne me conviennent pas ? Pourquoi toujours chercher un idéal amoureux, qui apparemment n’existe pas ? Pourquoi est-ce que j’aime un homme qui  cherche des pratiques sexuelles déviantes ? Et pourquoi est-ce que je panique dès qu’il faut lui dire non ?  J’ignore si vous pouvez m’apporter quelques éclaircissements sur mon comportement amoureux, me donner des conseils, mais écrire fait du bien. Quoi qu’il en soit, j’apprécie l’aide que vous pouvez apporter aux femmes.
Bien cordialement,
(Si vous le jugez utile, j’accepte que mon message soit diffusé, ainsi que ce mail : standupstandby@yahoo.com  ) 

Bonjour,
Vous dites être sujette à idéaliser vos partenaires mais cependant, dans ce témoignage, vous êtes extrêmement lucide et il me semble que vous êtes plutôt face à une problématique de "désidéalisation", processus pénible que vous avez tendance à repousser parce que justement, vous avez besoin d'idéaliser l'autre. L'idéalisation a ceci de défensif qu'elle inhibe la part agressive de chacun et protège des angoisses ; l'idéalisation, c'est un processus d'évitement ou d'annulation de ressentis perçus comme trop négatifs, qui soustrait la personne à l'ambivalence, l'ambivalence de nos sentiments par rapport au partenaire par exemple, d'autant plus que vous avez besoin de faire preuve d'une loyauté sans faille comme si, il en allait de votre propre image, et c'est ce qui vous rend si dépendante à l'égard de vos compagnons. En idéalisant votre partenaire, vous recherchez la confirmation de votre être, par l'affermissement du lien amoureux. A l'opposé, face au processus de "désidéalisation", vous craignez la mort de la relation alors que c'est peut-être un temps de "deuil" qui s'ouvre avec la réappropriation de votre être et la véritable reconnaissance de vos besoins. Mais pour cela, vous allez devoir affronter la figure du "manque", qui a peut-être à voir avec ces phénomènes hallucinatoires. Vous allez devoir affronter des temps de trouble, de frustration, de déception, craindre le "manque" et ne pas redouter l'expression de votre "agressivité" que vous ressentez comme une menace d'éclatement du lien avec votre ami. La relation avec votre compagnon n'a pas que des bons côtés ; vous avez mis le doigt sur les côtés déplaisants ; n'essayez plus de mettre ces côtés déplaisants hors du champ de votre conscience ; affrontez les et osez affirmer votre désaccord : ce n'est pas parce que vous aurez exprimé votre vision du négatif de l'autre qu'en échange vous serez vous-même, si j'ose dire (pardonnez moi l'expression), "négativée". Je reste à votre disposition. Il serait dommage que vous ne persévériez pas dans la recherche de vous-même, de votre voix, en entreprenant une réflexion psychologique. Soyez certaine que votre témoignage est riche et utile.
Merci.
Cordialement,
Chantal POIGNANT
Agent de conseil

Bonjour,
Je vous remercie de m'avoir répondu rapidement. Votre réponse me conforte sur le travail que j'ai à faire sur moi-même.  La peur du "manque", de la solitude est ce qui est prédominant en moi, et effectivement, c'est ce qui  m’empêche  bien souvent de "taper du poing sur la table". Je panique à l'idée d'être seule...et j'ai  compris, grâce à votre réponse, qu'idéaliser mes partenaires me permet de ne pas affronter des difficultés, des conflits. Il est bien sûr plus facile de se voiler la face. Les conflits et l'agressivité m'effraient et me font perdre tous mes moyens. Je fais toujours tout ce qui est possible pour les éviter, et je suis consciente que ce n'est pas ainsi que je parviendrai à me réapproprier mon être et être à l'écoute de mes besoins. (Je fais sans cesse passer les besoins des autres avant les miens). Et puis la solitude me donne la sensation de plonger dans le néant. Je vais poursuivre ma réflexion et agir en conséquence. Si je n'y parviens pas seule, je tenterai à nouveau de trouver de l'aide auprès d'un psychologue (à deux reprises, j'ai voulu démarrer une psychothérapie, mais je ne me suis pas sentie à l'aise avec le et la psy).
Bien cordialement

Bonsoir,
Vous pourriez lire "Les Idéaux" sous la direction de Guy CABROL et Hélène PARAT chez PUF 2010. J'y ai retenu cette expression : "L'idéal est un être de passage ; il soutient le passage". Surtout, si la mélancolie survenait, dépassez votre malaise et acceptez l'idée de vous faire soutenir.
Cordialement,
Chantal Poignant


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