Dois-je signaler les faits au procureur?
Janvier 2012
Esmeralda
a été victime d'un viol de la part d'un « ami ».
Elle
se demande si elle ne va pas écrire au procureur pour signaler les
faits.
Le
début de la communication date d'un an environ.
Bonjour, Merci
pour votre réponse, cependant je ne suis toujours pas parvenue à
finir cette lettre et à l'envoyer, j'ai fini le brouillon mais je ne
l'ai pas copié, je n'y arrive pas c trop difficile, c'est en partie
assumer ce qui s'est passé que d'écrire cette lettre, chose que je
n'arrive pas à faire, c'est la pire chose que j'ai pu subir dans ma
vie, la thérapie n'avance pas vraiment je suis quelqu'un qui a
beaucoup de mal à extérioriser les choses et à ça n'aide pas avec
la psychothérapie, dans mes projets je n'arrive pas à avancer non
plus, je déprime je dors, je fais des crises de boulimie sans plus,
j'ai commencé du babysitting ce mois ci et j'ai laché mes études,
je suis devenue une obsédée du controle, je cherche à tout
controler tout prévoir avant que ça n'arrive. J'ai
beau me dire que c'est la vie des fois on tombe des fois non, j'ai
beaucoup trop de mal à vivre avec, ca ne m'aide pas à affronter mes
peurs.
Je
n'arrive même plus à m'énerver quand je suis énervée je garde
tout pour moi je n'arrive pas à sortir quoi que ce soit. Quels
conseils me donneriez vous?
Esmeralda
Bonjour, Ce
n'est pas à vous "d'assumer" ce qui s'est passé! Le
premier sens d'assumer, c'est "prendre à son compte ; se
charger", bref se responsabiliser : vous n'êtes pas responsable
de ce que vous avez subi. Le deuxième sens, c'est " accepter
consciemment une situation, un état psychique et leurs conséquences"
: vous vivez très mal les conséquences de ce que vous avez subi et
c'est légitime puisque vous avez été victime. Vous ne parvenez pas
à supporter les conséquences de cette agression, dont ces peurs,
qui vous harcèlent. Là encore, c'est "normal" que vous
n'acceptiez pas cette situation, que vous n'avez pas choisie et dont
vous n'êtes pas responsable. Vous n'avez pas à "assumer"au
sens de "supporter" mais vous devez au contraire vous
"décharger". Or, comme vous le dites justement, vous êtes
dans le "contrôle" ce qui va à l'encontre de la thérapie.
En avez vous parlé avec votre thérapeute? Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Agent
de conseil
Je
lui en ai parlé du contrôle mais en quoi en parler m'aiderait
à changer ?
Esmeralda
Parce
qu'en prenant conscience que vous voulez contrôler tout, vous prenez
conscience, que ce contrôle vise tout simplement à vous éviter
d'affronter vos angoisses. En acceptant de "vous laisser
aller" vous n'êtes plus prisonnière d'une problématique
hermétique. Peut-être auriez vous besoin aussi de séances de
sophrologie, de relaxation, par ailleurs...
CP
Puisque
la solution ce serait d'arrêter d'être obsédée par le contrôle
dans tout ce que je fais en connaitre l'origine ne suffit pas??
Esmeralda
En
connaître l'origine ne suffit pas certes mais permet d'adapter les
modalités de la thérapie pour vous amener à lâcher prise!
Vous-même vous pourriez alors être amenée, puisque vous
connaissez votre mode de fonctionnement, à différer un peu ce
fonctionnement mais cela demande du temps et un véritable
investissement thérapeutique. Faites vous un peu
confiance! Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Bonjour, Ce
qui me bloque completement c'est le fait que j'ai vécu cette
evenement comme la destruction de mon corps comme s'il avait
reellement ete brisé à cause de mon education dure et religieuse ou
je devais rester vierge jusqu'au mariage pour preserver mon corps
comme une ancienne statuette sacré d'un musée et du coup j'ai
beaucoup de mal à vivre normalement la peur d'être "brisée à
nouveau" est toujours tres presente je n'arrive meme pas à me
concentrer sur une activité que je fais tellement cette douleur est
présente. Alors comment se faire confiance dans ces
conditions. Merci d'avance pour votre réponse.
Esmeralda
Toutes
les victimes ressentent ce sentiment d'avoir été brisées et hélas,
car elles ne sont en rien responsables du fait d'avoir été
victimes, elles ressentent aussi de la culpabilité parce qu'elles
imaginent qu'elles auraient pu s'enfuir, ne pas être là à cet
endroit, à ce moment, qu'elles ont été trop naïves etc...mais
comme vous avez en plus le poids de la religion, sans doute que votre
"culpabilité" ou plutôt ce sentiment apparemment
paradoxal de culpabilité se fait entendre encore plus fort. En fait,
cette "culpabilité" est l'ultime moyen pour une victime de
lutter contre son sentiment d'impuissance face à ce qu'elle a
subi. Car le sentiment d'impuissance totale n'est pas facile à
admettre pour qui que ce soit... Pour pouvoir survivre, il faut ne
pas être abattue : tant qu'on se dit qu'on peut ou pourrait faire
quelque chose, on reste en vie. Est-ce que vous comprenez tout ce qui
peut paraître "paradoxal" dans le traitement du
traumatisme? Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Bonjour, Merci
pour votre réponse, En se répétant que l'on n'y est pour rien
n'atténuerait il pas la culpabilité? Que voulez vous dire par
faire quelque chose, avancer dans la vie, participer à des activités
par exemple? Parce que malgré tout ce que je fais je me sens
toujours aussi abattue. Comment continuer à vivre avec cette
douleur, j'ai le sentiment que je ne pourrai pas aller bien tant que
je ne l'aurai pas "effacée", mais c'est bien la chose que
je ne pourrai pas faire. Vivre avec je ne sais pas comment m'y
prendre pour cela. Cordialement.
Esmeralda Bonjour, Je
reviens tout juste de mes congés. Non seulement, il n'y a pas de
remède miracle mais en plus, il vous restera toujours quelque chose,
une trace, de cette douleur : un traumatisme ne s'efface jamais
justement, il laisse même avec le temps des marques qui peuvent plus
ou moins bien cicatrisées et certaines auront des cicatrices
"pathologiques", tout comme des lésions corporelles graves
peuvent avoir des réactions inflammatoires parfois. Vraiment,
vous devriez vous impliquer dans un processus thérapeutique de
soutien où l'on vous aidera pour vivre avec cette douleur qui
perdure ou / et à la transformer. Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Bonjour
madame, je voulais vous souhaiter avant tout une bonne année
, concernant mon travail thérapeutique ce n'est pas efficace, la
psy ne me guide pas suffisamment je ne sais pas ce qu'elle cherche
exactement j'ai beau le lui demander ce n'est pas clair et ca
m'enerve car je n'avance pas je sais que cela prend du temps cela
va faire 2 ans dans 3 mois que je suis suivie et je
n'arrive toujours pas à vivre avec et je bloque la dessus j'ai
gonflé l'evenement et je ne suis obsédée que par cela je passe mon
temps à lire de la psychologie ou à aller sur internet pour
essayer de me guérir toute seule pour essayer d'être ma propre psy
puisque toutes mes tentatives vers d'autre médecins ont été
inefficaces jusqu'à présent et malgré que j'ai évolué
depuis trois ans maintenant que les evenements se sont deroulés j'ai
arreter les cours je ne cesse d'analyser tout mes faits et
gestes à en avoir des migraines pour avancer sur la thérapie mais
rien n'y fais je veux guérir et ça ne marche pas je ne veux pas
vivre rien faire d'autre qu'essayer d'avancer là dedans tant que ce
probleme ne sera pas reglé je ne souhaite pas ni faire de sport ni
aller en cours ni meme voir mes amis, j'en peux plus. je suis trop
dure avec moi meme je sais bien mais j'ai toujours ete comme
ca. Merci d'avance pour votre aide. cordialement. Esmeralda
Bonjour,
Merci
pour vos voeux.
Pour ma part, je vous souhaite que cette nouvelle
année vous permette de desserrer l'étau de la culpabilité, à
partir de laquelle vous vous condamnez inconsciemment bien-sûr, à
ne pas "guérir"; certes, vous "voulez guérir"
car vous souffrez trop mais en même temps, votre inconscient vous
dit que "ce serait trop facile de s'en sortir ainsi", sans
doute parce qu'au fond de vous, vous avez perdu votre propre estime
et votre liberté de penser puisque vous êtes sans arrêt en train
de vous analyser.
Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Bonjour,
J'ai
le sentiment que mon corps a été détruit pas seulement pour les
raisons dont je vous ai déjà parlé mais aussi car je percevais
très négativement les hommes avant de rencontrer celui qui m'a
violée, ma mère (paix à son âme) me disait que les
"hommes sont des chacals qui dévorent les femmes comme des
morceaux de viande", je vous dis cela car c'est une phrase
qu'elle me répétait souvent et qui m'a particulièrement marquée,
au moment où j'ai rencontré ce jeune homme, en effet je me suis
sentie d'autant plus détruite par cet evenement car c'est réellement
un chacal qui m'a dévorée comme un morceau de viande et aussi
incroyable que cela puisse paraître c'est comme cela que je l'ai
vécu, comme la destruction de mon corps et de mon âme, comme
dissoute par cet homme.
Comment
pourrais je m'y prendre pour moins culpabiliser?
Cordialement.
Esmeralda
Bonjour, D'abord
en investissant véritablement le cadre de la thérapie, c'est à
dire qu'il vous faudrait prendre conscience qu'une thérapie se joue
dans un cadre, un espace symbolique dans lequel se développent les
processus psychiques : ce n'est pas une simple conversation mais une
sorte de travail qui se fait entre le professionnel et le patient,
avec un contrat plus ou moins explicite, certes verbal mais qui a son
importance. Quand vous écrivez que "je ne sais pas ce
qu'elle cherche exactement", elle, le sait ou fait des
hypothèses et bien évidemment, ne peut vous le dire directement :
il vous faut respecter les phases de son travail (spécifique) vis à
vis de vous... En fait, ce n'est pas elle qui doit chercher mais
vous... Ainsi, un thérapeute n'est pas un guide au sens premier
du terme, ni un conseiller d'orientation :
il permet au patient de comprendre son cheminement psychologique, les
processus dans lesquels il s'est engagé, d'où la nécessité pour
ce patient d'être en confiance pour mieux pouvoir s'interroger sur
lui-même, sur ses modalités comportementales avec l'aide du psy qui
reçoit et renvoie les interrogations, les doutes, les certitudes du
patient ; c'est ce qu'on nomme "la technique" du transfert
en psy.
Pourrais je publier, même anonymement, votre témoignage
et notamment cette partie sur la thérapie et votre état
psychologique?
Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Bonjour,
Merci d'avance.
Oui, vous pouvez le publier à
condition que ce soit anonyme, ou sous le pseudo Esmeralda.
Cordialement.
Esmeralda.
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