Je suis dans une situation atroce
Email
en pied de message Février 2013
Bonjour.
Je me permets de vous contacter car je suis actuellement dans une
situation atroce, et dont je n'arrive pas à me sortir... Je précise
que je souhaite rester anonyme.
Il
y a de cela trois ans et demi, j'ai rencontré un homme, quelqu'un de
gentil, amusant, attachant... Nous sommes très vite devenus bons
amis. J'avais à l'époque 14ans, lui venait d'en avoir 18. Après
quelques mois, je me suis aperçue que cet homme pouvait se montrer
cruel et manipulateur, mais je n'ai pas prit peur pour autant, il
avait toujours été parfaitement correct avec moi et il me disait
tout (du moins c'est l'impression que j'avais), il était mon
meilleur ami. Paradoxalement, je commençais à me brouiller avec
d'autres de mes amis, des amis de longue date, je me mettais à leur
en vouloir pour rien, je ne m'en rendais pas compte mais je
m'isolais, petit à petit, il prenait de plus en plus de place dans
ma vie. Après huit mois d'amitié presque sans nuages, notre
relation s'est transformée en une relation de couple. Au début tout
était tout beau et mignon, bien qu'une ombre gâchait ce tableau :
nous nous cachions, personne ne devait être au courant pour nous
deux et personne ne l'a été. Cependant, l'euphorie des premiers
mois est vite retombée, je n'étais pas du tout certaine de ses
sentiments car plus jamais il ne se montrait affectueux en dehors de
nos moments les plus "intimes". Malheureusement c'était
déjà trop tard pour moi, j'étais amoureuse adictée et pour rien
au monde, je n'aurais voulu le perdre. Parallèlement, mes relations
avec mon entourage (amis, famille) ainsi que mon travail scolaire se
détérioraient de plus en plus. C'est à peu près six mois qui ont
passé dans ce climat, il a commencé à me rabaisser, à me trouver
tous les défauts du monde, nous nous disputions de plus en plus
fréquemment... Puis les premiers coups sont tombés, et je ne
comprends toujours pas pourquoi. Ce soir là, il y avait l'alcool,
l'exaspération, mais moi, qu'avais je fais, je me le demande encore.
Les coups furent assez violents pour que je sois marquée. De cette
dispute ce soir la s'ensuivit une séparation à quatre mois, sur sa
décision et non la mienne, il disait qu'il ne pouvait plus me
supporter. Après un mois de dépression, les trois suivants furent
une délivrance, je reprenais goût à la vie, j'étais heureuse. Et
puis, il est revenu vers moi, jurant qu'il m'aimait et tout ce qui ça
avec (cependant il ne s'est jamais excusé). Moi séduite à nouveau
et comprenant que je ne l'avais jamais réellement oublié, j'ai
repris confiance en lui et lui ai accordé une seconde chance.
Cependant les choses n'ont fait qu'empirer... Deux mois plus tard,
j'ai à nouveau reçu des coups, cette fois il a frappé par
jalousie, deux fois à deux semaines d'intervalle, à chaques fois
j'étais marquée, cocard et divers bleus. Ça a fini par inquiéter
mes parents, qui on déposé une information judiciaire à la
gendarmerie. À ce moment la ce fut la fin pour moi de toute bonne
relation avec mes parents, j'ai fugué entre autres... Parce que je
savais pertinemment que la gendarmerie, ça allait très, très mal
passer. En effet, quand il l'a apprit j'ai eu le droit à toutes les
insultes du monde, il ne voulait plus me voir, mais moi aveuglée et
profondément amoureuse, j'insistais, j'essayais de me justifier
d'expliquer que je n'y étais pour rien car pour lui c'était de ma
faute... Malgré ça on se voyait toujours, j'allais le voir en
pleine nuit j'essayais de le "récupérer", l'amour rend
aveugle... C'est à partir de la qu'il a commencé à me frapper de
plus en plus régulièrement. À cette époque la, je venais
également de trouver un petit boulot en parallèle de mes études,
alors il a joué avec ça, me disant qu'il fallait que je lui achète
telle ou telle chose pour me faire pardonner... Et moi j'obéissais,
je n'imaginais même pas aller contre lui, d'autant plus qu'il me
menaçait, moi, ma famille, mes amis... Tous mes salaires y sont
passés pendant des mois et des mois je n'ai jamais dépensé un seul
euro pour moi... À côté de ça, il en demandait de plus en plus de
moi et les coups pleuvaient pour un oui pour un non, c'était
l'escalade de la violence. J'avais des bleus partout, tous les jours,
quasiment toujours au moins un cocard... J'essayais de cacher ça
avec du maquillage mais personne n'était dupe... Plusieurs fois il
m'a étranglée sévèrement, une fois il m'a frappée avec une
ceinture une autre fois avec un bâton, il m'a cassé le nez, une
fois il m'a tellement massacré la cuisse que j'avais un énorme
hématome, j'ai faillit faire un malaise et après je n'arrivais
quasiment plus à marcher pendant plusieurs jours. Et bien sûr,
c'était toujours de ma faute, je lui pourrissais sa vie, je méritais
ce qu'il me faisait et encore il était gentil... À cette époque
la, je n'ai jamais osé parler personne, pourtant les gens se
rendaient bien compte, certains m'ont tendu la main mais je n'ai
jamais trouvé la volonté de m'en sortir... Je me disais qu'il
fallait que je fasse tout bien comme il voulait, et qu'il se
calmerait, et que je finirais par retrouver l'homme que j'aime... Car
oui je l'aimais, je l'aimais éperdument, c'est pour ça que je le
couvrais, je n'ai même jamais dit que c'était lui que j'allais voir
le soir, pourtant à un moment c'était tous les jours que j'y
allais, bien que je sache ce qui m'attende. Finalement, après
quatres mois de ce régime, il s'est calmé, les coups se faisaient
moins fréquents, jusqu'à cesser complètement au début de cet été,
bien qu'il n'ai jamais stoppé de me rabaisser et de m'insulter...
Mais c'était tellement plus calme, on retrouvait presque notre
complicité... Je me disais qu'il m'aimait quand même, parce que
sinon avec tout le "mal" que je lui faisait il aurait coupé
les ponts depuis longtemps. Fin juin j'ai eu mon bac, je voulais
continuer mes études et j'en avais la possibilité, mais pour rester
avec lui j'y ai renoncé, j'ai augmenté mon contrat à mon travail
et je n'ai fait plus que ça. Mes parents étaient en désaccord
totale avec cette idée, ils m'ont donc trouvé un appartement, me
voilà donc à 17ans, vivre seule avec un loyer à assumer et tout ce
qui va avec, et un salaire de 650€ par moi. Mais lorsque j'ai eu
mon premier appartement, j'étais contente, je me disais qu'il
pourrait venir qu'on pourrait enfin passer du temps ensemble... C'est
en effet ce qu'il s'est passé et ce fut une catastrophe. J'étais la
pour le servir, il fallait que je fasse ce qu'il voulait quand il le
voulait. Il continuait de me rabaisser bien sûr, et la c'était tout
le temps, du matin au soir et même la nuit, en plus lui dormait
quand j'étais au travail, donc faisait des nuits blanches, et moi je
devais suivre ce rythme, ma santé en a pâtit... Et surtout, il a
recommencé à se montrer violent pour un oui pour un non... Pas
aussi fréquemment qu'avant mais tout de même... C'est à partir de
la que j'ai commencé a avoir du mal à le supporter, à ne plus
vouloir être la seule à donner... Au bout de quatres mois j'ai été
expulsée de cet appartement car il y avait eu des plaintes pour
tapage nocturne... Lorsqu'il l'a su il s'est calmé, il est même
redevenu tout gentil et mignon, moi qui pensais à le quitter encore
une fois je retombais sous le charme. Je suis donc retournée chez
mes parents le temps de trouver un autre appartement. À cette
période il me dit qu'il veut que dans le prochain appartement, il
veut qu'on emménage ensemble "officiellement"... Comme à
ce moment les choses vont plutôt bien en ce moment, cette idée
m'emballe... J'emménage dans un nouvel appartement début décembre.
Il emménage avec moi, bien qu'il ne paye rien, n'ayant pas de
travail. Sauf que les choses sont vites reparties comme avant, sauf
que la, je n'en peux vraiment plus. Avant l'amour me retenait à lui,
mais maintenant l'amour est mort, et seule la peur m'empêche de le
quitter... Je me sens violée a chaques fois qu'il me touche... Il me
dégoûte, il me dégoûte de la vie et me dégoûte de moi même...
Je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas à qui m'adresser... J'ai
parlé à une amie récemment, elle me dit de porterplainte mais je
ne m'en sens pas le courage... Je me sens seule, je suis en froid
avec ma famille et ne vois aucun ami à moi juste des amis à lui...
Je n'ai que 18ans et je vois déjà ma vie dans une impasse... Je ne
sais pas comment m'en sortir... Je ne veux plus le voir mais j'ai
aucun moyen de le mettre à la porte bien que l'appartement soit à
mon nom et les factures également... Je veux m'en sortir mais j'ai
peur, et j'ai honte aussi, je n'ose pas me dresser contre lui. Que
puis je faire ?
Cordialement
Klara
Bonjour,
Vous
avez été au bout de vos illusions avec ce garçon et aujourd'hui
vous admettez courageusement et lucidement la réalité : cette
histoire n'est pas une histoire d'amour mais une entreprise de
destruction à laquelle vous voulez mettre fin.
Votre
vie n'est pas dans une impasse comme vous le déplorez ; au
contraire, forte de cette expérience douloureuse, vous allez pouvoir
ouvrir votre existence vers d'autres horizons, en gardant bien en
mémoire cependant, les risques d'une relation "amoureuse"
où l'un prétend "aimer" en dominant et dévalorisant
l'autre ; vous saurez dorénavant qu'une telle relation n'est jamais
saine et entraîne toujours déceptions et souffrances. Vous serez
attentive à la manière dont votre ou vos prochains partenaires
manifesteront à la fois leur amour et leur désaccord (car un couple
a forcément des désaccords!) et ne tolèrerez plus jamais la
moindre insulte, le moindre comportement humiliant, le moindre
coup...
Avec
votre prochain "amoureux" vous veillerez à ne jamais
renoncer à vous et à vos projets, à vos liens familiaux et amicaux
car souvent, la personne manipulatrice et violente isole sa "victime"
pour mieux la rendre dépendante, pour mieux la contrôler, pour
mieux la garder sous son emprise quitte à installer un climat de
peur.
C'est
ce qui vous arrive aujourd'hui et vous redoutez à la fois les
réactions de cet homme et les regards de votre famille et amis qui
vous avaient mise en garde.
Et
peut-être aussi, votre propre regard car même si vous savez
maintenant et admettez que vous vous êtes trompée d'histoire
"d'amour", il n'est pas toujours facile de reconnaître un
"échec", d'autant plus que vous y aviez mise, dans cette
histoire, toute votre volonté, toutes vos convictions, toute votre
énergie.
Vous
n'avez pas à vous en vouloir et encore moins à avoir honte de
vous : vous étiez sincère.
Laissez
cette honte à ce garçon qui ne méritait certainement pas votre
"dévouement".
Je
vous conseille de reprendre contact avec vos parents et amis mais
d'abord, de vous orienter vers le centre d'informations sur les
droits des
femmes le plus proche de votre domicile actuel, où vous serez
soutenue psychologiquement et conseillée juridiquement.
Le
service est gratuit et peut rester anonyme.
Pourriez
vous m'indiquer votre département en étant assurée de toute ma confidentialité?
Dans
l'attente,
Cordialement,
Chantal
POIGNANT
Agent
de conseil
Bonjour
Je
vous remercie de votre rapide réponse.
J'habite
dans le V., dans la ville de H, je vous le précise car je n'ai aucun
moyen de transport et que la région est plutôt mal desservie au
niveau des transports en commun. Je tiens à vous préciser également
qu'il m'est impossible de sortir comme bon me semble, je dois
toujours avoir une "excuse valable", sinon il saura très
bien s'y prendre pour que je ne sorte pas, de plus il a connaissance
de mes horaires de travail. Je tiens aussi à vous préciser que
récemment, j'ai reçu par deux fois un courrier émanant des
services sociaux de ma ville qui mentionnait une suspicion de
violences conjugales. Malheureusement, les rendez vous qu'ils me
fixaient tombaient pendant mes heures de travail, je n'ai donc pas pu
m'y rendre, et comme il n'y avait pas de numéro dans les lettres, je
ne les ai pas appelés non plus. Plusieurs fois depuis j'ai songé à
m'y rendre moi même, mais la peur me bloque, même lorsqu'il n'est
pas la j'ai peur qu'il apprenne ce que je fais et m'en réprimande
ensuite... J'ai un peu reprit contact avec mes parents aussi,
principalement pour des questions "officielles" (papiers
etc.), j'essaye de voir un peu mes petites soeurs, mais toujours "en
secret", lorsqu'il dort par exemple, parce qu'il m'a clairement
montée contre ma famille par le passé, aujourd'hui il refuse
catégoriquement que je leur parle pour autre chose que le strict
nécessaire, et s'il venait à l'apprendre, ce serait encore des
insultes voir pire... C'est la même chose pour mes amis,
heureusement il n'a pas réussi à m'isoler complètement mais je
n'ai absolument pas le "droit" d'aller les voir, c'est à
peine si je peux leur envoyer des messages sans qu'il me fasse des
reproches, les rabaisse eux et moi... Je dois être toujours la pour
lui a sa disposition, prête à faire ce qu'il veut, je pense pouvoir
dire que je suis en un état de servitude complet vis à vis de lui,
j'ai l'impression d'être une esclave. Voilà aussi pourquoi je me
sens bloquée.
Vous
remerciant de vos conseils, cordialement.
Klara.
Bonjour,
Dans
votre ville, vous avez la chance d'avoir une permanence du centre
d'informations sur les droits des femmes ; vous y serez reçue
gratuitement et on vous aidera à faire le point sur votre situation
sans vous juger aucunement et ce, dans l'objectif de vous accompagner
dans les démarches, que vous aurez décidées ; alors n'hésitez pas
surtout!
* (adresse non communiquée par respect pour l'anonymat
de l'auteur)
Par
ailleurs, il semble bien que le service social soit particulièrement
développé dans cette ville ; voyez cette page : * (adresse non
communiquée par respect pour l'anonymat de l'auteur)
Profitez
du moment où vous êtes à votre travail pour prendre contact par
téléphone ou internet. C'est de cette façon que vous serez
protégée : en vous plaçant au centre d'un cadre social qui
définira avec vous les urgences. Pourriez vous me tenir au
courant? D'autre part, j'aimerais que vous me donniez
l'autorisation de publier votre témoignage car beaucoup de
jeunes-femmes, comme vous, sont déjà dans une telle situation et
n'osent pas, la plupart du temps, faire le premier pas vers le
service social adapté ou vers l'association de défense des droits
des femmes. Votre témoignage pourrait être rendu complètement
anonyme, paraître sans aucune adresse ou avec une adresse
anonyme. J'attends votre réponse. Cordialement, Chantal
POIGNANT
Bonjour. Je
vous remercie des informations que vous me donnez. Je vous tiendrais
au courant. Je vous autorise également à publier mon témoignage si
cela peut aider, l'adresse avec laquelle je vous écris est anonyme
vous pouvez donc l'y joindre. J'aimerai juste si possible, qu'il ne
soit pas fait mention de la ville ou j'habite citée plus haut. Je
vous remercie de votre soutien Cordialement.
Klara
bemyrapsberry@gmail.com
|