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Message ou FAQ

 


Je rêvais d'un prince charmant

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Juin 2013

Chaque jour un peu plus.
Je rêvais d’un prince charmant, il le fut jusque dans ses coups, il avait toujours cette délicatesse de ne pas me « marquer », de ne pas me saigner.
Je rêvais d’un amour inconditionnel, il le fut au-delà de tout,  Il a fait de moi sa chose, et je ne le nie pas, je n’osais pas,  ce « je » n’existait pas.
Je rêvais de construire sur ce « nous deux », Il s’est affirmé en faisant de moi un vide, que je ne comblais pas.
Je suis devenue une autre.
Je n’ai rien vu venir, la première insulte chassa la première menace, la première étreinte forcée me fit oublier la première claque, le premier bleu enleva un peu de tout cela.  Le temps de réaliser, et la peur de partir fut plus grande que celle de rester.
Chaque année de plus en plus de femmes déclarent être victimes de violences conjugales. Et cette impression étrange, que ce que je vivais était différent. Il disait m’aimer entre 2 claques, il était des plus doux quand il ne me crachait pas sa haine au visage, il promettait de changer lors de ses crises les plus noires...Et je revenais à chaque fois vers lui, portée par cet amour que je lui vouais, sans condition, me foutant de tous ces spots télévisés, car ce que nous vivions était forcément différent…
Il n’y a jamais eu de « nous », j’ai mis du temps à le comprendre, il y avait lui et seulement lui, j’étais une apostrophe, un appendice, son « quelque chose d’inutile et d’encombrant… »Seule la douleur que je ressentais me rappelait que j’étais vivante.
La lutte contre la violence faite aux femmes a été déclaré "grande cause nationale 2010" par le gouvernement. Moi, qui portais la honte de ses coups, honte tenace et laide, qu’aucune campagne publicitaire n’aurait pu laver. Honte du regard si lourd que mes voisins portaient sur moi.
Pas un… pas un ne fut touché par la grâce de cette campagne, et n’a essayé d’appeler la police lorsqu’il hurlait et ravageait l’appartement. Personne… personne n’est jamais intervenu, quand en public, il me trainait par les cheveux…
je n'ai jamais compris comment cet « impossible » était devenu mon quotidien… Il savait alterner violence physique et psychologique, ne me laissant aucun répit.
J’étais sa victime, une victime qui aimait son bourreau, revenant vers lui constamment. J’étais devenue experte dans l’art de la dissimulation, rien ne transparaissait au travail, rien sur ma façon de me comporter, je gardais le sourire, sourire derrière lequel je cachais la misère et la tristesse de mon quotidien, sourire qui me permettait de croire que tout n’était pas si noir. Je m’accrochais à ce « pire » qui existait pour d’autres…je connaissais tous les chiffres de la violence conjugale, ces 8% seulement qui osaient porter plainte…8%.
Tout ce que je faisais n’était jamais assez bien, j’en étais arrivée à un tel point de conditionnement, que j’étais persuadée avoir un problème, que mes gestes pouvaient l’irriter naturellement, que mes paroles forcément maladroites pouvaient le rendre « malheureux » ! Alors étant incapable de « maitriser » ses colères, ne faisant jamais rien d’assez bien, comment j’aurais pu réussir à porter plainte ? Comme j’enviais ces 8%...
Ce chaque jour un peu plus, m’a été quelque part salutaire. J’en étais arrivée à un point où je ne retenais plus mes larmes, où je devenais terrifiée quand il rentrait à la maison, où certaines phrases chocs de ces spots publicitaires ont enfin trouvé écho. Je sursautais pour un rien, me suis même cachée certains matins dans le placard, attendant qu’il parte, voulant l’éviter à tout prix.
Ce chaque jour un peu plus, où vous savez que ce sera forcément pire, où vos enfants préservés jusqu’ici, assistent terrifiés à une première scène, où votre fils de 9 ans, s’assoit sur votre lit en vous demandant « pourquoi maman, supporter tout ça » ?
Aux coups, les phrases chocs, et le regard terrifié de mes enfants mêlé à cette vision si juste, si évidente de mon fils, m’ont été salutaires. J’ai rejoint les 8%.
Ce texte, je l'ai écrit il y a 2 ans...
2 ans après où j'en suis? La distance, l'ordonnance restrictive obtenue grâce à ma plainte, et surtout le fait qu'il ait été reconnu coupable m'ont fait avancée...
Ce n'est pas facile, c'est même un sacré challenge que d'avancer seule avec ses enfants, de devoir leur donner le meilleur, tout en faisant le deuil d'un tel traumatisme, d'un homme que l'on a terriblement aimé.
Mais cela est POSSIBLE.
2 ans après, je pleure devant l'écran en écrivant ces mots.
2 ans après, les insultes et menaces sont toujours là...
2 ans après, j'ai décidé de me soigner, car psychologiquement si abîmée...
Mais je sais, que j'ai fait les bons choix pour mes petits et moi.
beaucoup de choses restent à faire, je souhaite seulement guérir de tout ça.
2 ans après, je suis juste une plaie béante, qui souffre d'une douleur sans nom, qui rejaillit de manière incontrôlable.

Bonjour,
Vraiment, j'aimerais que vous m'autorisiez à publier ce témoignage personnel certes mais qui parlera certainement à d'autres.
J'aimerais que d'autres vous écrivent, vous soutiennent et vous disent, que cette plaie béante se refermera mais laissera toujours une cicatrice.
J'aimerais que vous consultiez ce site :
*

Mémoire traumatique et victimologie

Site de l'association Mémoire Traumatique et Victimologie, créée en 2009 et présidée par le Dr Muriel SALMONA, spécialiste des psychotraumatismes dus aux violences. Mémoire Traumatique et Victimologie est une association de formation, d'information et de recherche sur les conséquences psychotraumatiques des violences. Elle a pour but d'améliorer l'identification, la protection et la prise en charge des victimes de violences par une meilleure information du public et par la formation des professionnels impliqués, d'améliorer leur orientation et leur accès à des soins spécialisés de qualité, et aussi d'améliorer la connaissance et compréhension des conséquences des violences, dans l'optique de lutter contre toutes les violences et d'améliorer leur prévention.
http://memoiretraumatique.org/

J'aimerais savoir si vous vous êtes rapprochée d'une association, d'un groupe de paroles pour continuer à avancer, pour vous accompagner dans votre désir de vivre et de reconstruire.
Dans l'attente,
Cordialement,
Chantal POIGNANT
Agent de conseil

bonsoir,
Ravie de votre retour, vous pouvez publiez mon histoire et diffuser mon mail, je serai volontiers joignable pour toutes celles qui le souhaiteront. Porter plainte, moi qui était terrifiée par cet homme, m'a SAUVÉ la vie.
J'ai essayé de me rapprocher de groupes de paroles, les coordonnées m'avaient été laissées par l'Unité médico légale de Versailles. Beaucoup de numéros n'étaient plus attribués. le temps passant, j'ai laissé facilement tombé.
Mais aujourd'hui, des mois après, la douleur est présente, plus douloureuse que jamais, inexplicable parfois...Je ne suis plus la même. J'ai tellement "refoulé" pour faire face au quotidien, à la famille, aux enfants, que je ne contrôle plus rien, tout explose, en larmes, en cris, en pensées morbides parfois...
Le site que vous m'avez indiqué est parfait, je vais prendre rdv. J'en ressens un besoin vital.
Merci pour vos conseils.

* authentika11@hotmail.fr

 
      

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