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Message ou FAQ

 

Il a fait de moi une esclave en prison.

Email en pied de message.
Septembre 2001

Bonjour,
En réalité, je ne sais pas vraiment par où commencer; je suis un peu perdue. Je m'appelle ***, j'ai 21 ans et je ne sais plus du tout où j'en suis ni ce que je dois réellement faire. Peut-être pourrez-vous m'aider, peut-être pas, mais je pense que ce dont j'ai le plus besoin, c'est de soulager mon coeur de tout ce poids qui me pèse depuis si longtemps.
Je viens de découvrir votre site, en surfant au hasard sur Wedoo, dans la rubrique "femmes". Je ne pensais pas qu'il puisse exister un tel site, qui parlerait de tant de choses qui me sont devenues familières, et malheureusement, presque habituelles. J'ai lu déjà une bonne partie des témoignages avant de me décider à vous écrire pour vous faire part de ma situation. J'en pleurais en lisant et j'en pleure toujours actuellement. Je suis devenue très sensible
ces derniers temps, je pleure pour de petits riens, de plus en plus souvent. Voilà, j'ai osé prendre le temps de vous écrire et pourtant les mots ne veulent toujours pas sortir.
J'ai rencontré mon petit ami il y a 8 ans; j'avais 13 ans. C'était un garçon formidable, d'une gentillesse extrême et il est vite devenu mon meilleur ami. 2 ans plus tard, en décembre 1995, nous sommes passés du stade d'amis au stade de "couple". Dès la première semaine, il a changé. il n'a pas de suite commencé à être violent mais il a manifesté une jalousie extrême. Il ne supportait pas que je sorte seule ou que je vois des ami(e)s sans lui. Par amour, j'ai
donc commencé à me détacher de mes amis et à ne plus les voir. Je trouvais ça normal, je me disais que c'était de l'amour et qu'il fallait passer par là; que ça lui passerait. Mais petit à petit, je me suis retrouvée prisonnière de son jeu.
Je ne sortais plus du tout, hormis pour aller en cours et je me suis renfermée sur moi même. J'ai toujours été très timide mais je crois que ma relation avec lui n'a rien fait pour arranger les choses. Au contraire, quand on fait des connaissances (ce qui arrive très très rarement vu qu'on ne sort jamais) il me rabaisse, m'humilie en racontant que je suis très timide et en se
moquant ouvertement. Mais à cette époque, je pouvais encore tout lui pardonner. J'étais jeune, amoureuse et qui plus est, c'est mon premier amour.
Lorsque j'ai eu 17 ans et demi, j'ai eu quelques problèmes avec ma mère: elle avait une liaison et a mis mon père hors du domicile conjugal. J'ai eu du mal à accepter la situation et mon ami était là, près de moi. Dès mes 18 ans, il m'a proposé de venir vivre avec lui, ce que j'ai immédiatement accepté, sans même réfléchir.
Ça a été le début de tout. J'aurais du réfléchir à deux fois. J'ai tout quitté. Pour lui j'ai même abandonné mes rêves de devenir avocate, j'ai quitté l'université au bout de quelques mois, parce qu'il me voulait près de lui. Et il a commencé à devenir violent. Ses crises de jalousie,
je ne les supportais plus et j'ai voulu le quitter. C'est alors qu'il a fait des menaces de se tuer et il a eu un accident de scooter. Je m'en suis voulue et je suis restée avec lui. Cela fait aujourd'hui presque 6 ans que je suis là. Il lit mon courrier, écoute mes messages (de toute
façon, je ne peux pas recevoir de coup de fil d'amis et ne peux même pas donner mon numéro de portable), lit mes mails, surveille tout, fouille mon sac...
Pendant toutes ces années, je lui ai tout pardonné. Je souffrais de ne pas vivre ma jeunesse comme tout le monde, et je pense qu'il y aura toujours un vide en moi mais je lui pardonnais, je me disais qu'il changerait. Je croyais à ces belles promesses. Après nos disputes si fréquentes, il regrettait toujours. Il s'excuse et me supplie, et moi, faible, je l'écoutais.
En octobre, pour ne pas que je m'ennuie trop à la maison, il m'a fait installer une ligne internet, pensant que ça m'amuserait. Je lui en suis reconnaissante quand même car
ça m'a permis de découvrir autre chose. Je me suis fait des ami(e)s sur un site de dialogue en direct et sur un forum.
Bien sûr, il ne sait pratiquement rien de cela et je suis obligée de prendre une autre adresse que celle qu'il m'a faite pour "vivre" un peu plus librement mais il a des doutes évidemment. Un jour, il est entré plus tôt que prévu et j'étais sur un salon de discussion; je ne faisais rien
de mal et pourtant... les coups ont commencé à s'abattre.
J'ai tenté deux fois de le quitter mais il est toujours revenu me chercher et je l'ai toujours suivi, par peur et par faiblesse. Il y a quelques mois, j'ai fait une dernière tentative pour le quitter, après une violente dispute. Je suis partie en pleine nuit (il travaille de nuit). il est
venu me rechercher après son boulot et je l'ai suivi mais il a promis une dernière fois de ne plus recommencer. J'ai vraiment cru en sa promesse car cette fois il avait l'air sérieux. Je lui ai dit à ce moment-là que je le quitterais définitivement si cette fois il recommençait. Et j'ai fait la promesse à mon meilleur ami "virtuel" de le quitter si ça recommençait. Mais dans mon coeur, depuis que j'en ai parlé avec cet ami, il y a quelque chose qui a changé. J'ai fermé les yeux pendant 5 ans mais je viens de les ouvrir; et le réveil fait très mal. Je me rends compte à présent que le coeur n'y est plus, j'ai pardonné oui mais je n'arrive plus à oublier. Certaines blessures ne cicatrisent jamais, surtout au coeur et là j'ai bien l'impression qu'il m'a guérie d'aimer à tout jamais. il n'y a plus d'amour dans mon petit coeur, plus de joie. Je ne mange presque plus, je dors difficilement la nuit (je réfléchis très tard) et je n'ai plus de gout à rien. Mon ami "virtuel" me pousse à agir, à prendre une décision avant de le regretter. Il est vraiment de très bon conseil, et étant plus âgé, il a de l'expérience que je n'ai pas bien évidemment. Pendant tout un temps, il m'a redonné du courage, de la confiance en moi. Il m'a aidée à surmonter une partie de ma timidité, à m'affirmer et on fait le week-end de petites séances virtuelles d'auto-confiance si je peux dire. Il y a quelques jours, j'en étais encore à espérer que c'était la fin, que j'allais enfin pouvoir y arriver, m'envoler (alors que je me voyais comme un oiseau auquel Il aurait coupé les ailes); j'avais commencé la lecture de "rose madder" et tout ça me faisait beaucoup réfléchir. J'avais pris conscience du fait que j'étais encore jeune, que j'avais la vie devant moi et qu'il me fallait le quitter avant de me réveiller, à 60 ans, avec ce vide toujours présent... Ce qui m'a retenue, c'est la peur
de sa réaction, et, je l'avoue, la peur de LUI faire du mal en le quittant. Car magré tout ce qu'il m'a fait subir, je sais qu'il m'aime et que je lui dois beaucoup de choses. Je me sentais prête malgré tout à franchir le cap mais... il a recommencé, cette semaine. Et malgré mes promesses, je suis restée. Je n'ai pas osé le quitter.
Il s'est une fois de plus excusé bien sur, et comme d'habitue, il dit que c'est ma faute, que je le provoque... et depuis une semaine je me dis que j'ai eu tort de croire que je pouvais m'en sortir.
J'ai reperdu espoir. Et voilà que je tombe sur votre site... j'avais besoin de me confier à quelqu'un qui comprendrait vraiment et voilà, c'est ce que j'ai fait.
C'est un véritable roman que je viens d'écrire et je m'en excuse mais j'en avais besoin. Ça m'a soulagée en quelque sorte. Merci de m'avoir lue.

rose.madder2@caramail.com

Bonjour,
Merci de votre email que j'ai lu avec beaucoup d'attention.
Vous êtes sous l'emprise depuis longtemps maintenant d'un homme "typiquement" violent qui cherche à avoir le contrôle sur vous et votre vie. Il ne changera pas sans avoir recours, lui, à une psychothérapie de fond. Ses promesses ne seront jamais tenues. Vous devez absolumment échapper à cette vie car l'enfer ne fait que commencer. Votre ami virtuel a raison. Vous êtes jeune, la vie est devant vous, ne la gachez pas.
Vous ne devez rien à votre compagnon : vos "dettes" éventuelles sont effacées par les violences subies, la jalousie maladive (pathologique) et les tentatives d'emprise totale sur vous. Par ailleurs, vous devez savoir que ce type de relation avec un homme violent génère toujours chez la victime le sentiment de sa propre faute : la victime se sent coupable ... contre toute raison. Défaites-vous de ce sentiment : il est infondé. Vous êtes une victime.
En outre, vous ne lui devez rien parce qu'on ne doit rien à quelqu'un qui vous a mis en prison, qui vous a coupé de vos ami(e)s, qui vous a fait abandonner vos projets pour mieux devenir son esclave.
Sans doute consulteriez-vous utilement un psychologue pour vous-même de sorte de trouver les ressources psychologiques nécessaires à un départ sans retour.
Qu'en pensez-vous ?
Cordialement,
Yves Lambert

Bonjour,
Jesais que le service d'emails est hors service pour le moment (été 2001) mais je voulais juste répondre à votre question.
J'accepte que vous publiiez ma lettre et mon adresse e-mail (que de toute façon mon ami ne connait pas..). Ce serait peut être constructif pour moi de parler avec d'autres filles dans mon cas... Encore merci pour la lettre que vous m'avez envoyée, cela m'a donné beaucoup à réfléchir. Je vous en remercie vivement.

Plus tard (fin de l'été 2001) :

Je tenais à vous remercier encore une fois pour vos précieux conseils...
Ces vacances m'auront apporté beaucoup de changements et c'est en partie grâce à vous.
J'ai enfin osé quitter mon petit ami, après une énième dispute. Je lui ai dit enfin tout ce que je ressentais depuis tant d'années et je suis partie.
Je réapprends maintenant à vivre seule et je savoure les petites joies de la vie, dont il m'a si longtemps privée.
Pour tout cela je tenais à vous remercier en personne.
Merci du fond du coeur,
Rose Madder2

Bonjour,
Merci beaucoup pour votre gentil message. Cela fait chaud au coeur.
Je suis content pour vous et je vous souhaite bonne route !
Cordialement,
Yves Lambert

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