Quand j'étais
petit garçon
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en pied de message.
Août 2003
J'ai lu
plusieurs témoignages ici. J'ai écrit à certaines,
avouant par là même l'incroyable courage que j'ai perçu
en elle de témoigner, même anonymement. Des témoignages
d'une puissance et d'une force inconcevables.J'ai découvert toute
l'horreur de me reconnaître en elles. J'imaginais qu'un viol était
vécu différemment que l'on soit homme ou femme. Je remarque
que non. Je garderai néanmoins toujours cette impression sordide
que l'on reconnait plus facile une femme violée comme étant
victime, alors qu'un homme violé ...Quand on est
dôté "d'attributs virils", on est censé
pouvoir se défendre. L'homme est conçu pour se défendre
et pour défendre sa femme, c'est bien connu. En tout cas, c'est
toujours ce qu'on m'a fait comprendre.J'ai mis du temps à admettre
mon propre statut de victime. J'avais besoin de me savoir victime pour
guérir. Le plus effrayant étant sans doute que j'en ai
toujours eu conscience mais que je me sois refusé de guérir,
comme pour expier une faute monstrueuse. Laquelle ? Celle de m'être
laissé faire, sans doute. Celle de ne pas avoir témoigné
plus tôt, certainement. Et plus certainement encore, protéger
les miens, ne pas montrer que je souffre, ne pas être victime
pour qu'eux ne souffrent pas de ce que j'ai vécu. Qu'eux ne portent
pas la culpabilité que je portais en moi.J'ai du mal, pardonnez-moi.
J'écris les mots tels qu'ils se bousculent dans mon esprit, sans
réfléchir au delà.Le plus inconcevable dans mon
histoire est la violence inouie de ma réaction. Mon psychologue
(j'ai consulté bien plus tard) a eu du mal à la comprendre
et à me l'expliquer, ma thérapeute (que j'ai consultée
ensuite) également.Je devais avoir onze ans. Je suis incapable
de resituer la scène dans le temps. Tout ce que je sais est que
je suis dans ma chambre, et mes parents dans le salon. Les deux pièces
étant séparées par un couloir et une cuisine. Nous
sommes un samedi (mon père regarde le résumé du
championnat d'Allemagne) et le chef de l'orchestre où je joue
vient me faire répéter mes partitions. Il fait cela avec
tout le monde, et personne n'y trouve rien à redire.A l'époque,
je joue du baryton. Je suis un peu novice mais je progresse à
une vitesse très rapide. Certains disent même que je suis
doué. J'en rigole intérieurement. Dans mon esprit, les
doués n'ont pas besoin de travailler. Or je répète
deux heures par jour.On travaille les gammes, les morceaux dans ma chambre
et je reçois les félicitations du chef. Je suis flatté.
Lui, un professionnel, impressionné par mon niveau ... Mais,
ajoute-t-il, il y a un domaine où je ne suis pas très
bon: la respiration ! J'avoue ma surprise. J'ai une grande
capacité pulmonaire (au centre Psycho Médico Social -
la médecine scolaire, je ne connais pas l'équivalent français),
on m'a dit que j'avais un volume pulmonaire très supérieur
à la moyenne.Lui me répond qu'avec un exercice approprié,
je pourrai respirer mieux et m'explique que la respiration est le premier
élément pour être un bon instrumentiste, surtout
pour les instruments à vent. Je comprends parfaitement son argument.
Il me propose un exercice nouveau de respiration et m'allonge sur mon
lit.Il me fait respirer par le ventre, pose sa
main dessus pour la voir se soulever. J'y arrive. Il sourit et glisse
sa main sous mon short et me retire et le short et le slip, pour, sans
hésiter, prendre mon sexe en main.J'en ai le souffle coupé,
je me rebiffe. Il me dit que cela fait partie de l'exercice. Que maintenant
que j'ai bien maitriser la première étape, il doit m'en
apprendre une seconde : ne pas perdre ma concentration quelque soit
les événements pour toujours bien respirer. Je me concentre.
Cette main sur moi me gêne horriblement mais j'essaie de faire
abstraction. Ma respiration est
saccadée et je m'en veux un peu. Et je sens qu'il décalotte
mon sexe, je veux me redresser. Il me maintient violemment couché.
Je suffoque et ne bouge plus. Sa main libère mon torse puis soudain
une douleur fulgurante au sexe. Je vois noir, je manque de tomber dans
les pommes sous la douleur. Je ne m'évanouis pourtant pas et
le regrette.J'entends "Contrôle ta respiration" dit
d'une voix de plus en plus rauque et de plus en plus sourde. La douleur
reste vive mais je m'y habitue. Mais impossible de respirer. Je veux
voir ce qui se passe. Je remarque alors qu'il a introduit une épingle
à cravatte dans mon méat urinaire qu'il remue en va-et-vientA
bout de souffle je le supplie d'arrêter, que la douleur est insoutenable.
Plein de question trottent dans ma tête. Puis je tourne, tourne,
tourne. Ma vision devient floue. Lors d'un rare moment lucide, je constate
qu'il a un drôle de rictus. Puis la douleur s'estompe, mon méat
est libéré mais reste en feu. Le chef me dit : "Pas
mal du tout, ta respiration pour un premier essai. Tu es doué!"Je
ne sais que dire. Je lui demande si cet exercice est bien
normal. Il me parle de bouquins de médecin où il a lu
cet exercice, que lui même l'a suivi et qu'il est devenu professeur
de trompette à l'académie de musique et chef d'orchestre.
Que je peux en parler à ma mère si je veux. Ca me rassure.
Moi, quand je fais quelque chose de mal (comme voler un bonbon dans
l'armoire - toute proportion gardée), j'ai les mains moites.
La respiration qui coince. Je n'ose pas en parler. Lui veut bien que
j'en parle, il parle de médecine ...Aller chez le médecin,
ce n'est pas agréable. A ma dernière blessure, on m'a
placé des épingles dans le front, on me palpe toujours
l'estomac et je déteste cela. Je me calme. Il doit avoir raison.
Je pourrais en parler à maman mais parler de mon sexe me gêne.
J'ai onze ans. Et je n'ai jamais parlé de quoi que ce soit avec
mon père hormis le foot.Je retourne au salon une fois le chef
parti. Maman est furieuse : "il pourrait au moins dire au revoir,
ce mal poli" puis me demande ce que j'ai, parce que je suis tout
pâle. Je dis juste que je me sens un peu faible. Elle me conseille
de m'asseoir. Mais vite l'angoisse. Une envie d'uriner. Je m'assieds
sur le trône (chose que je déteste, ça fait fille)
mais je sens que je ne saurai pas tenir debout. A nouveau la tête
tourne. Je reprends difficilement mes esprits. J'ai du sang dans les
urines. Là encore je n'ose pas en parler...Trois mois plus tard,
il y aura une seconde séance d'exercice de respiration. A nouveau
cette même douleur. A nouveau la séance qui se termine
par son étrange rictus. Je me dis qu'il ne doit pas s'en rendre
compte. Je lui dis que la douleur est incroyable. Là il éclate
de rire. Ma fureur monte, pour la première fois. Il la voit.
Et me dit : "Maintenant tu maîtrises ta respiration, tu n'as
plus besoin de ces exercices". Je suis abasourdi, mais pour moi,
c'est fini. Je ne dis rien.Quelques semaines plus tard. Des changements
en moi s'opèrent. Le signe de l'adolescence. Je découvre
le plaisir solitaire, ça m'amuse. Puis soudain une montée
en moi, la tête qui tourne, mais c'est plutot agréable.
Et soudain une explosion dans mon bas-ventre, un plaisir très
fort et soudain. Je n'arrive plus à contrôler mon visage,
je sens que j'ai un étrange rictus. Puis la descente, mon ventre
humide, ma surprise. Ces sensations étranges, je veux bien les
connaitre à nouveau.Je repasse le film de mon premier orgasme
dans ma tête. A l'époque, j'ignorais le sens du mot. Puis
je revois mon rictus et d'un flash je repense au sien. Toutes les pièces
s'emboitent soudain. Il s'est servi de moi pour prendre un plaisir sexuel.
Il a joui par ma souffrance. J'ai un haut-le-coeur incontrolable. Je
me vide littéralement.Maman accourt, excessivement inquiète
car cela ne me ressemble pas. J'ai envie de tout lui dire mais ne le
peux pas. Comment dire à sa mère un truc pareil. Que va-t-elle
penser de moi? Je la sens gentille mais j'en ai peur. Tous les grands
sont méchants. Tous se servent de moi. Et moi même je sens
que je ne suis plus un enfant. Je refuse désormais toute idée
du sexe. Et je cacherai ce qui m'est arrivé, j'en fais le serment.Et
j'arrive à respecter mes promesses. Les hormones m'obligent à
quelques plaisirs solitaires (la douleur devenant trop vive si je n'agissais
pas ...) mais rien d'autres ne paraît. Mes notes scolaires remontent
prodigieusement. Le chef d'orchestre m'évite soigneusement. Je
souris béatement, parle gentiment aux autres. Pourtant je me
sens vide. Je suis un
acteur né, mais une coquille vide. Et mon stratagème tient.Bien
sur mes profs et mes parents, avant ma "guérison",
ont vu quelque chose de louche. Mais mes parents divorcaient et j'entrais
dans l'adolescence. Ce qui expliquaient mes sautes d'humeur. "Mais
maintenant, votre fils est charmant et studieux, un modèle à
suivre. Vous pouvez être fière de lui" Petite phrase
de mon prof de français une semaine avant qu'on ne découvre
la vérité.Phrase qui a permis à ma mère
de déculpabiliser un peu, d'ailleurs. Le directeur de l'orchestre
(il y a un chef d'orchestre - mon abuseur - et un directeur plus administratif,
ici c'est l'administratif
qui vient) vient parler à ma mère. D'étranges rumeurs
courent sur le chef du jeune orchestre. Il aurait un comportement équivoque
avec certains garçons. Ma mère est sciée, mais
dit qu'il faut poser la question aux enfants. Puis, elle dit qu'il faut
me le demander aussi, par acquit de conscience. Pour eux, c'est certain,
il ne m'est rien arrivé. Un enfant violé ne peut pas avoir
de si bonnes appréciations de partout. Au contraire, ses notes
chutent, il est perturbé, c'est bien connu (même de moi
à l'époque, raison pour laquelle j'ai fourni un effort
terrible à l'école). Mais, par acquit de conscience, on
me demande. je suis face à eux. Je blémis. Ils le
voient. Je sais qu'ils ont compris. Je dis de ma voix la plus assurée
possible "Mais non, je ne vois pas de quoi vous parler" Mais
je hoquète, ma voix tremble, n'importe quel abruti aurait compris
que je mentais à cet instant. Alors ma mère ...J'espère
quand même. Mais elle est pâle comme une morte. Le directeur
est en larmes. Ils savent. Je m'agrippe au mur car mes jambes se dérobent.
Une douleur encore plus violente que tout ce que j'ai connu transperce
mon cerveau, comme un poignard chauffé à blanc. Cette
fois la douleur est trop violente. Je
sombre dans un trou noir.Soudain je m'éveille, adossé
à un mur, assis sur un carrelage froid, les yeux embués
de larmes, hoquetant, trouvant difficilement ma respiration, mais avec
un sentiment de bien-être inoui. Une voix douce me parle, une
main me caresse la nuque. J'aime bien cette présence.Je me tourne
vers cette voix douce. Je vois une femme dans la quarantaine, un peu
perdue et très douce qui me parle. Pourquoi dit-elle qu'il faut
appeler la police? Là je m'en moque un peu, je savoure cet instant
de grâce. Elle continue de me parler. Je la regarde et lui sourit.
Elle me rend un sourire un peu désespéré. Elle
aussi a les yeux embués.Qui est-elle? Et qu'est-ce que je fais
là? Et pourquoi suis -je là? Et puis, au fond, qui suis-je?
Soudain une angoisse. Je panique, veux me redresser. La plénitude
a pris fin pour laisser place à une panique incommensurable.
Nouveau mal de tête, nouveau coup de poignard, mais je ne m'évanouis
plus. Puis je suis submergé d'images, une douleur au bas
ventre ... un rictus ... un rire ... je vomis ... tout caché
... "mais non je ne vois pas de quoi vous parlez" ... ça
y est, je sais. Je quitte ma torpeur. Je sais qui je suis. Je sais que
cette dame si douce est ma mère. L'homme au téléphone
est le directeur de l'orchestre. Par contre je ne reconnais pas les
autres pièces de la maison, je ne reconnais pas ma petite soeur.
Je ne reconnais pas la voiture. Oui, je vais tout dire. Puisque c'est
tout ce que je sais. Ce que j'ai raconté plus haut, c'est à
peu près tout ce qu'il me reste de souvenirs sur avant qu'on
ne
sache. Deux viols, et des petits détails liés au viol.
Ma vie pré-natale en quelque sorte.Je suis mort à l'intérieur.
Je suis resté vivant pour témoigner contre mon violeur.
Voilà ce qui, dans ma tête de gamin de presque 12 ans,
apparaît brusquement. Mon âme est morte et une fois que
j'aurai témoigner mon corps mourra aussi. Ca ne m'effraie pas,
c'est dans l'ordre des choses.Je témoigne et suis bien accueilli.
Le policier est visiblement horrifié par mon témoignage.
Il le dit lui-même : "il hallucine". Tous les détails
que je lui donne. Le nom de 5 autres victimes (garçons de 10
à 12 ans qui joue d'un instrument à vent) alors qu'on
ne s'est jamais parlé. Il a les larmes aux yeux. Lorsque je pars,
il dit à ma mère : "J'espère sincèrement
qu'il va fuir ou bien se défendre à son arrestation, comme
cela je pourrais le démolir" puis immédiatement après
s'excuse de s'être emporté. Moi je lui dis encore aujourd'hui
merci. Sa réaction m'a fait du bien.Plus tard il nous appelle
pour nous informer de son arrestation. Il est passé aux aveux.
Mon témoignage l'a fait craqué. Je suis satisfait. Je
peux mourir en paix. Je
vais donc me coucher pour fermer les yeux. Je suis en paix avec moi-même.Je
suis surpris qu'on ose réveiller un mort, surtout pour aller
à l'école. Je ne connais pas l'école. Je ne connais
aucun prof. Heureusement pour moi, un élève de ma classe
vient me parler et m'emmène au cours. Je prends mon journal de
classe. Je repère vite qui a cours de quoi et je le suis. Personne
ne s'aperçoit de rien, hormis que je suis très lunatique.
Tout le monde
ignorera mon amnésie.Ca n'a pas été simple. Je
suis devenu taiseux. Je me suis coupé de tous. J'avais le visage
de ma mère en pleurs. Je ne voulais plus qu'elle souffre. Alors
j'ai pris sur moi. Et me suis reconstruit seul, sans amis. Je n'en voulais
pas. Impossible de faire confiance à quelqu'un.Je deviens vite
une tête de turc. Je m'en moque un peu. Comme ça ne me
fait ni chaud ni froid, les élèves s'en prennent à
d'autres et je vis dans mon coin. Je suis presque heureux. Presque s'il
n'y avait le village qui lui est au courant. On parle sur moi. Ce serait
moi qui aurais éveillé les pulsions du chef d'orchestre.
Mon papa était parti, j'avais besoin d'affection. J'ai perverti
ce pauvre gars. CQFD. J'en ai plus que marre et décide que comme
la mort ne vient pas à moi, j'irai à elle. Je planifie
tout. Je veux laisser un bon souvenir aux gens et culpabiliser les mauvais.
Je minute mon déplacement jusqu'au pont où je vais me
jeter. Je repère l'endroit. Je laisse une lettre où j'accuse
les gens du village et de l'orchestre (on a vite ri de MA "mésaventure",
les autres étaient victimes)Le jour où je dois me suicider
(un 30 juin), une force me retient. Maman a déjà perdu
son fils aîné (avant ma naissance) elle ne supportera pas
ma mort. Pourtant j'ai besoin de mourir, maman. J'EN AI BESOIN. Mais
mon amour pour elle est le plus fort, je renonce à sauter. Depuis
je suis sujet au vertige ...J'en veux énormément à
ma mère, de ne pouvoir parler et de ne pouvoir mourir. Je l'aime
mais j'ai suffisamment sacrifié pour elle. Sa vie devient un
enfer. Avoir une ennemie me calme, assez étrangement. A 17 ans,
je me réouvre un peu au monde. Il faut dire que j'atteins le
mètre quatre-vingt-cinq pour 100 kgs et qu'avec ma silhouette,
je me sens en état de me
défendre. Puis surtout on me cherche moins des pous dans la tête.
Alors je me sociabilise, d'autant qu'on ne vit plus dans le village
et que je suis dans une autre école. Ici ils ne peuvent pas savoir,
soyons moins coincé ...Je ne me fais pas d'amis mais ne me fais
pas rejeté non plus. Et c'est neuf pour moi. Je remarque même
que des filles s'intéressent à moi. Ca me choque. Si c'est
pour du sexe, qu'elles oublient. Je les envoie sur les roses. Les
mecs se marrent, mais aucune rumeur à mon sujet. J'apprends à
être plus diplomate avec les filles. Je m'invente une relation
passée qui s'est très mal terminée et qui explique
mon incapacité à ressortir avec une fille. On me croit.
On me laisse tranquille. Et j'ai soudain quelques amies. uniquement
filles. Je n'ai pas confiance envers les hommes. Puis mon image de la
sexualité s'améliore, avec les confidences des gens sur
le sexe, leur première fois,
le plaisir, le fait que les filles savent dire non, qu'elles aussi désirent
un homme (j'ai halluciné, je pensais sincèrement qu'une
fille ne pouvait pas ressentir de désir ou de plaisir avant qu'une
amie ne m'en parle). J'ai envie de franchir le pas soudainement, pour
comprendre. Mais les filles qui me sont proches sont amies, et pour
moi il est impossible de flirter avec une amie. Ce serait la perdre
et j'en ai si peu. Je n'ai jamais dragué et il me semble que
c'est trop tard pour apprendre. Mes rares essais se soldent par des
échecs retentissants (dont un
poème d'amour placardés sur tous les murs de l'école,
- et pourtant il était beau - m'ont dit d'autres filles)A 22
ans, à la fin de mes études, je n'ai pas encore embrassé
une fille. Je me fais une raison, je ne suis pas fait pour ça.
Et puis soudain la voici qui arrive. 21 ans, jolie comme un coeur, intelligente,
séduisante même. Tous les mecs lui courent après
mais elle n'en veut pas. Moi je me sens trop nul pour être avec
elle. Mais je ne suis pas moche (je l'ignorais), j'ai les yeux d'un
mec gentil (je le savais, mais ça faisait plutot de moi une victime
potentielle parce qu'on s'en prend aux faibles - donc aux gentils) et
puis j'ai une voix très douce et sensuelle (tout le monde me
le dit mais je ne trouve pas)Le fait que je ne m'intéresse pas
à elle l'intrigue. Elle fait le pas vers moi. Je lui parle comme
à une amie et non comme à une "petite amie potentielle",
ce qui la vexe et elle se met en tête de me séduire. Je
me rebiffe, elle m'en veut, je reviens vers elle, fais un effort. Enfin
bref nous nous apprivoisons pour finalement sortir ensemble.Embrasser
une fille est très agréable, mais au bout d'un moment
elle me reproche de ne pas être plus entreprenant. Au bout de
3 semaines, elle ne comprend pas que je n'aie même pas tenté
de lui caresser la poitrine. Au début elle appréciait
que je ne lui saute pas dessus et que je la respecte mais là
elle ne le comprend plus. Elle se pose des questions sur mon orientation
sexuelle et me le dit ouvertement. Je suis au pied du mur.Je commence
à lui dire qu'à l'âge de 11 ans, je jouais dans
un orchestre et
je la vois blémir. Elle a déjà compris. Je pleure,
elle aussi. Je suis incapable d'en dire plus. Elle décide de
faire mon éducation, elle m'aime. Cela prendra plus d'un an avant
que nous fassions l'amour pour la première fois. Le temps que
je sois convaincu qu'elle le désirait, le temps de découvrir
que les caresses procurent du plaisir mutuel.La première fois
fut catastrophique, les autres tout autant, mais je me sens sur la voie
de la guérison. J'arrive à cerner quand elle désire
faire l'amour pour elle, et quand elle cherche surtout à me faire
plaisir. je
n'accepte que quand c'est pour elle. Je n'en ressens pas un plaisir
immense, sans doute est-ce lié à la culpabilité
que j'ai conservée par rapport au sexe. Jusqu'au jour où,
j'ignore comment, elle a un orgasme, un vrai, son premier.Je suis terrorisé.
Je m'excuse auprès d'elle. Je n'ai qu'une idée en tête,
me tuer. Je suis convaincu de l'avoir faite souffrir, de m'être
laissé un peu trop emporté par mon plaisir et d'avoir
abusé d'elle. Elle au contraire me sourit, m'embrasse goulument,
n'entend même pas mes propos. Je réalise qu'elle a "pris
son pied"
mais cela ne me rassure pas. Je serai incapable de la toucher pendant
3 mois. Elle a du mal à le comprendre. L'orgasme suivant qu'elle
a connu m'a moins déstabilisé, j'avais vu la différence
entre la souffrance et le plaisir, différence qui aujourd'hui
encore me semble infime, hormis les yeux qui brillent.Je l'ai perdue
suite à une dispute avec son père. Il me traite d'homosexuel
refoulé, et je sais qu'il sait, puisque sa fille leur en a parlé.
Je dis calmement "qu'entendez-vous par là?" et il me
répond qu'un vrai mec ne se serait jamais laissé faire
... Toute la rage que j'avais contenue pendant des années a ressurgi,
uniquement dans le regard. Mais mon regard a fait peur. Lui si doux
était devenu un regard de tueur. Elle a pris peur et m'a quitté.J'ai
entamé une psychothérapie suite à cela. Faire peur
ainsi m'a déstabilisé. Et j'ai compris toutes mes erreurs,
et la marmite qui bouillait en moi. J'ai 24 ans (12 ans après
les faits) quand je consulte pour la première fois. Ca m'a fait
un bien fou.Au bout de deux ans de thérapie, j'ai recommencé
à m'intéresser au sexe opposé. J'ai connu deux
autres filles avant de rencontrer celle qui deviendra mon épouse
l'année prochaine. Malgré tout l'amour que j'ai porté
à ces 4 filles, je suis toujours incapable de prendre l'initiative
de faire l'amour, incapable de demander un acte qui me ferait plaisir,
incapable de me libérer, tout simplement.Aujourd'hui encore,
il me faut être convaincu qu'elle le désire
vraiment pour qu'on fasse l'amour. Et ce sera toujours ainsi. C'est
ma seule garantie pour que je ne viole jamais, même inconsciemment,
quelqu'un. Faire subir cet enfer à une autre me paraît
insupportable.
Voilà.
Si jamais vous vouliez publier mon témoignage, vous le pouvez.
Mon e-mail également, si jamais quelqu'un voulait me parler.
J'ai juste deux questions à vous poser. La première est
: "Avez-vous déjà reçu d'autres témoignages
d'hommes victimes d'abus ? Qu'est-il prévu pour les aider, eux?"
et la seconde "Peut-on qualifier ce qui m'est arrivé de
viol ? (c'est sans doute idiot, mais je ne connais pas la qualification
sous laquelle mon abuseur a été condamné, j'ai
entendu trop de version différente pour le savoir et je n'ai
pas assisté au procès) "Si vous
voulez un titre, je vous fais confiance et vous le laisse choisir "J'avais
onze ans" "Quand j'étais petit garçon"
ou un autre ...J'attends votre réponse.
khayman8@caramail.com
Bonjour,
Il arrive que des hommes témoignent auprès de nous des
abus sexuels ou viols dont ils ont été victimes, mais
c'est assez exceptionnel. Le dernier témoignage qui a été
publié sur le site est celui-ci : message
47.
Il n'existe pas de dispositif spécifique pour les victimes masculines
de viol mais les services existants pour les femmes ne refusent pas
les hommes, notamment le réseau des Centres d'Informations sur
les Droits des Femmes (http://www.infofemmes.com/)
: un nombre non négligeable d'hommes s'adressent à eux.
Il existait un site suisse ayant vocation à venir en aide aux
hommes victimes de viol ou d'abus sexuels mais, vraisemblablement, il
est fermé. Peut-être est-ce temporaire. Il est signalé
sur cette
page de notre site.
Nul ne nie que le nombre de victimes masculines d'abus sexuels soient
négligeables, comme en témoignent régulièrement
des affaires de pédophilie récemment médiatisés.
Il y a sûrement quelque chose à faire ... mais, contrairement
aux femmes qui se sont organisées (en associations notamment)
pour militer et créer des services d'aide (réseau des
CIDF, Mouvement du Planning Familial, etc.), les hommes ne l'ont pas
fait ...
D'un point de vue strictement pénal et si j'ai bien compris ce
que vous en dites, ce que vous avez vécu ne correspond pas à
des viols mais à des agressions sexuelles. Le viol suppose en
effet une pénétration sexuelle (vaginale, anale, orale,
par le pénis ou toute autre chose, doigt, objet, ...). Cependant,
les victimes n'ont que faire de ces distinctions de juristes car les
conséquences sont la plupart du temps très comparables
quoique relatives à la gravité et la nature des agressions.
Je vous souhaite bonne route.
Cordialement,
Yves LAMBERT
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